Tant de fois annoncée comme étant la dernière, l'audience de ce vendredi matin 20 décembre consacrée à Kem One SAS devrait être pour de vrai… la der des ders. Sur son bureau, le tribunal de commerce de Lyon n'aura à étudier qu'une seule offre de reprise du fabricant de chlore et PVC, placé en redressement judiciaire le 27 mars dernier, huit mois seulement après sa cession à l'homme d'affaires anglo-américain Gary Klesch par Arkema.
Deux plans concurrents
Mercredi après-midi dernier encore, les magistrats consulaires auraient dû départager deux plans concurrents : l'un porté par Alain de Krassny, industriel franco-autrichien, et l'autre par Open Gate Capital, fonds d'investissement installé à Los Angeles, Paris et Sao Paulo. Or, ce jour-là et à la surprise générale, les deux rivaux avaient alors annoncé leur décision de se rapprocher.
Coup de théâtre
Un coup de théâtre qui avait obligé les juges à reporter la dite audience de deux jours. Les représentants du personnel qui, le matin même, avaient, pourtant, été consultés sur les deux projets voulaient en savoir davantage sur cette fusion avant de se prononcer. L'offre restant sur la table leur a donc été détaillée ce jeudi lors d'un nouveau CCE. Les représentants du personnel a cependant préféré s'abstenir, à l'unanimité, sur le projet de reprise.
Problème avec EDF
Retour sur la genèse de cette fusion. « Depuis plusieurs semaines l'Etat nous suggérait ce rapprochement. Les problèmes rencontrés avec EDF sur les conditions de fourniture d'énergie nous ont convaincus de faire front commun sur ce point. Rapidement nous sommes arrivés à la conclusion qu'il était plus intelligent d'aller plus loin en nous unissant. Et nous avons signé un accord le 18 décembre à 13h50 », assure Lionel Spizzichino, avocat d'OpenGate Capital.
Alain de Krassny, président
C'est au projet estampillé par Alain de Krassny, qui prendra la présidence, que le fonds américain se raccroche. Ensemble ils s'engagent à créer une holding de reprise à 50/50 à laquelle chacun apporte 5 millions d'euros de fonds propres. Pour le reste, rien n'est changé. Ils ont recours à une ligne d'affacturage pour un montant de 45 millions d'euros.
Soutien des pouvoirs publics
Les pouvoirs publics soutiennent le plan de redressement à hauteur de 128 millions d'euros: 80 millions d'avances remboursables, 33 millions de prêts du fonds de résistance économique (RSE) et 15 millions de subventions d'investissements. Pas de changement non plus pour le volet social: 1.200 salariés sont conservés et le plan de sauvegarde de l'emploi se limite à 48 personnes, qui toutes se verront proposer un poste par Arkema.
Les prochaines étapes
Que va-t-il se passer dans les prochains jours si le tribunal valide, en définitive, l'offre des deux repreneurs ? La première étape sera l'intégration dans la nouvelle Kem One d'Innovative Vinyls, autrement dit toute l'activité aval que Gary Klesch s'est formellement engagé à rétrocéder pour un euro symbolique dans le cadre d'une solution globale de reprise de l'ancien pôle vinyle d'Arkema.
Accord avec Solvay
Sur ce point, les avocats des repreneurs mettent en avant l'intérêt de l'alliance de leurs clients : « Alain de Krassny est un spécialiste de l'amont, Open Gate a déjà un pied dans l'aval », rappelle Stéphane Vital-Durand, avocat d'Alain de Krassny. Propriétaire depuis janvier dernier de Profialis, spécialisé dans les profilés, le fonds d'investissement a récemment conclu un accord d'exclusivité avec le chimiste franco-belge Solvay pour acquérir Benvic (200 salariés), un des premiers spécialistes de la formulation de PVC possédant trois usines en France, Italie et Espagne.
Engagement de long terme
Pour la suite des opérations, cette association a-t-elle vraiment vocation à durer ? « Les deux actionnaires ont pris l'engagement de rester ensemble sur le long terme », affirme Lionel Spizzichino. « Des actionnaires qui se mettent ensemble, c'est plutôt rassurant pour l'avenir, reconnaît Rémy Lasnet, délégué CFDT. Nous sommes passés d'une période où nous risquions de nous retrouver en liquidation à cette possibilité de figurer parmi les premiers européens ».
Arnaud Montebourg réjoui
De son côté, Arnaud Montebourg, dont le ministère du Redressement productif s'est beaucoup impliqué dans ce dossier, s'est réjoui de ce rapprochement de deux acteurs complémentaires, lors d'une visite effectuée ce jeudi dans l'usine Kem One de Balan, dans l'Ain.
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