Si les Français s'inquiètent autant pour leur santé que pour leur vie privée, une chose est sûre : en tant que consommateurs, ils veulent, à juste titre, avoir confiance dans la nourriture, l'hôtel qu'ils vont réserver, les emails qu'ils reçoivent. Quant aux entrepreneurs, ils doivent pouvoir compter sur leurs partenaires dans les affaires. Or pour toutes ces activités, la blockchain peut leur venir en aide. Cette technologie de stockage et de transmission d'informations - lesquelles sont regroupées par blocs et validées par des miners, experts en mathématiques complexes - fonctionne sans organe central de contrôle. Elle est transparente, sécurisée et sans duplication possible.
« La blockchain permet ainsi la régulation des acteurs économiques », explique Philippe Mutricy, directeur de l'évaluation, des études et de la prospective pour Bpifrance. Car en l'absence d'organe central de contrôle, ce sont les pairs - les millions d'acteurs de la blockchain - qui surveillent... Pas question de faire passer du cheval pour du bœuf dans les plats préparés dans ces conditions. Et pas question non plus pour un fournisseur de ne pas livrer la machine achetée, par exemple. « Avec l'apport de l'intelligence artificielle et de l'Internet des objets, la blockchain permet d'établir des smart contracts, poursuit ce spécialiste. En géolocalisant la machine, l'industriel peut savoir quand aura lieu sa livraison. Et si elle est mal paramétrée et ne remplit pas ses fonctions, le smart contract peut automatiquement déclencher des pénalités ». On le voit, les enjeux, en matière de perte de valeur, sont élevés pour les industriels.
Ubériser Uber
Mais la blockchain peut faire encore mieux ! « Elle va permettre de 'disrupter' les plateformes de mise en relation des agents économiques », avance Philippe Mutricy. Ce qu'il veut dire, c'est que la blockchain pourra, demain, et certaines initiatives ont déjà été prises, offrir à un chauffeur d'Uber, par exemple, d'établir directement un smart contract avec un client, et de rester maître des données, au lieu de devoir rétrocéder une partie de ses gains à la plateforme. De quoi libérer les forçats de la route ou des livraisons... Même chose pour les sites de réservation d'hôtels, qui font souvent pression sur les établissements. Ces sites aussi pourraient bien un jour être ubérisés. « Il ne s'agit pas tant de désintermédiation que de multi-intermédiation », précise cet expert, chacun pouvant directement se connecter via la blockchain pour offrir conseils et services, et être rémunéré par des jetons sur le système. Quand cela arriver a-t-il ? « Tout dépend de la vitesse d'adoption des utilisateurs », répond Philippe Mutricy. Mais déjà, des startups proposent des services fondés sur la blockchain, utilisés aussi bien par des fabricants de produits de luxe que des acteurs de la grande distribution.