Quand les entreprises jouent leur survie

La dixième édition des « Transformer Friday » a récemment réuni une centaine de personnes - DRH, Directeur de la transformation, consultants - à Paris. Témoignages sur la transformation, inéluctable pour nombre de sociétés. De quoi faire le plein de conseils et de bonnes pratiques.
(Crédits : Dr)

Qu'est-ce qui pourrait bien lier Sony Music France, une société mondialement reconnue dans l'industrie du disque, et Veolia, toute aussi connue, mais pour, entre autres, le recyclage et la valorisation des déchets ? C'est Lara Pawlicz, CEO de 2Spark, une start-up accompagnant la transformation des entreprises, qui sert de fil rouge, comme elle l'a fait lors de la dixième édition du Transformer Friday, le 7 septembre dernier à Paris.

De fait, et presque à marche forcée, les deux entreprises venues témoigner ont dû, chacune dans son domaine, se transformer. La première, parce que son chiffre d'affaires s'est littéralement écroulé, sous la pression du piratage sur le net, qui représente désormais 80% de la consommation de musique, sans oublier, avoue Claude Monnier, le DRH de la société, « le manque de vision et d'anticipation d'une partie des anciennes équipes, alors que la vente de CD représentait 90% du chiffre d'affaires de Sony... ». Et Claude Monnier n'hésite pas à demander à la centaine de participants au Transformer Friday s'ils ont déjà téléchargé illégalement de la musique - pour voir, comme d'habitude, de nombreuses mains se lever... Conséquence de cette crise, aussi profonde que la débâcle, quelques années plus tôt, de la métallurgie, la société a dû mener cinq plans de sauvegarde de l'emploi (PSE) en 12 ans. Aujourd'hui, Sony, que Claude Monnier a rejoint lors du cinquième PSE, ne compte plus que 200 permanents, contre 1000 avant ce changement d'habitudes des consommateurs, mais elle a survécu. Mieux, elle voit son avenir avec confiance.

La deuxième société, Veolia, a elle aussi opéré une mue radicale, parce qu'après quelques cafouillages en matière d'écologie au niveau gouvernemental - « les plans ont bien été votés mais les décrets ne sont jamais sortis », indique sobrement Bernard Harambillet, le directeur général de l'activité Recyclage et Valorisation des déchets France chez Veolia - certains métiers du secteur ont disparu sans que de nouveaux émergent. Résultat, « il a fallu faire un plan d'économie de 40 millions d'euros, assorti d'une réduction de 1000 postes », soupire le DG. Mais là aussi, la société a su se réinventer, en transformant les déchets en ressources et en redéfinissant collectivement l'avenir de nos métiers que composent les 150 sociétés de Veolia.

D'abord, élaborer une nouvelle vision

Tout n'a pas été facile, loin de là. « 75% des projets de transformation échouent », pointe d'ailleurs Lara Pawlicz. Si la transformation de Sony et de Veolia Recyclage et Valorisation des déchets a réussi, c'est d'abord parce que les deux sociétés ont su réfléchir à leur marché et se doter de nouveaux services, sans oublier d'embarquer les collaborateurs. Ainsi, Veolia a par exemple proposé des contrats de performance aux communes pour éviter de ramasser trop souvent des poubelles à moitié vides. Et aujourd'hui, la société élabore pour la fin de cette année sa vision pour 2022 - fondée notamment sur un écosystème de start-up/fournisseurs. Quant à Sony, elle mise sur la R&D pour proposer sans cesse de nouveaux services, puisque l'achat de musique s'est mué en consommation sur des plateformes comme Spotify ou YouTube. Après une étude de segmentation des clients, Sony peut mieux les cibler, notamment via les réseaux sociaux.

Ensuite, changer les modes de travail

Au-delà de la stratégie industrielle, c'est l'organisation même de ces deux entreprises qui a évolué. « En un an, 25% de l'encadrement a changé de poste », indique ainsi Bernard Harambillet. « Soixante de nos 200 salariés actuels occupent des postes qui n'existaient pas il y a cinq ans et un tiers des métiers actuels vont disparaître dans les deux à trois ans qui viennent », déclare de son côté Claude Monnier. Autant de situations complexes. Chez Veolia, c'est l'indépendance, quelque peu intempestive, des directeurs régionaux qui pêchait, chez Sony, c'était l'employabilité de certains salariés. « Contrairement à ce que l'on pense, les professionnels du secteur sont loin d'être jeunes », relève ainsi le DRH. Mais aujourd'hui, tous sont motivés. Et c'est d'autant plus remarquable que « les salaires sont généralement 30% plus faibles dans l'industrie du disque que dans d'autres secteurs, même si le niveau d'affect y est plus élevé », constate Claude Monnier.

Comment ces deux spécialistes s'y sont-ils pris pour faire adhérer les collaborateurs ? « D'abord en jouant la transparence et en parlant vrai », déclare Bernard Harambillet, qui doit gérer une quinzaine de métiers et des salariés de 80 nationalités. Son parcours, qu'il a débuté par un stage d'éboueur pour finir DG de l'entreprise, ne peut que l'aider... « Il faut faire confiance aux salariés, ajoute à cet égard Lara Pawlicz, ils se rendent compte que l'entreprise doit changer et qu'il n'y a pas le choix, puisque c'est souvent sa survie qui est en jeu. »

Contacts de qualité, transmission d'informations claires, exemplarité : les DRH sont au cœur du dispositif de la transformation sur le terrain. Pourtant, s'ils portent le changement, eux aussi doivent parfois apprendre. Ou désapprendre, comme le dit Claude Monnier. « J'ai voulu répliquer ce que j'avais fait ailleurs en arrivant chez Sony. Cela a duré trois jours ! », s'amuse-t-il aujourd'hui. Mais il a su profiter de ce qu'il appelle des « temps faibles ». Des périodes de doutes, de déprime, même, mais qui, en particulier chez les artistes, peuvent être synonymes de grande création. « Claude François n'a pas écrit Comme d'habitude lorsqu'il allait bien », avance-t-il... « En fait, on ne transforme pas l'entreprise, mais la façon dont les collaborateurs travaillent », conclut Bernard Harambillet. Une transformation quotidienne, permanente, même, que 2Spark appelle de ses vœux et accompagne chez chacun des collaborateurs de ses sociétés clientes, grâce à leur application intelligente qui permet de déployer avec succès les transformations en embarquant dans ces projets, chacun des collaborateurs de son entreprise.

Lire aussi : Révolutionner la transformation des grandes entreprises selon Lara Pawlicz

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