CES 2016 : les Français dans les starting-blocks

Le gouvernement met les petits plats dans les grands pour que les startups françaises triomphent au CES 2016, qui se tiendra du 6 au 9 janvier à Las Vegas. L’enjeu : continuer à détruire les clichés tenaces sur la France et s’imposer comme un pays à la pointe de l’innovation auprès des médias et des investisseurs du monde entier.
Sylvain Rolland
Le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron (ici au côté de Xavier Niel lors d'une visite de l'école 42 en octobre), fera le déplacement à Las Vegas, comme l'an dernier. L'enjeu du CES est politique et stratégique pour le gouvernement.

John Chambers, le patron de Cisco, le disait lui-même début octobre : "La France, c'est l'avenir. Il y a une génération de startups françaises qui vont transformer profondément nos modes de vie." Venant d'un ancien détracteur des rigidités hexagonales, le compliment n'est pas passé inaperçu.

Reste maintenant à le prouver, encore et encore. Car si l'écosystème d'innovation français commence enfin à être pris au sérieux outre-Atlantique et en Europe, le chemin est encore long avant d'en finir avec le "french bashing" et la perception, toujours bien ancrée à l'étranger, qu'il est trop difficile d'innover en France en raison des lourdeurs administratives et de la fiscalité.

     | Lire Comment la France veut en finir avec le "french bashing"

Le CES, un enjeu politique et stratégique

Dans ce contexte, le Consumer Electronics Show (CES), qui se tiendra du 6 au 9 janvier 2016 à Las Vegas, revêt une dimension politique et stratégique. Politique, car le gouvernement français tient à surligner au gros feutre rouge qu'il aime l'entrepreneuriat et soutient l'innovation, comme le montrent les multiples initiatives de la Mission French Tech depuis 2013.

Stratégique, car une présence massive des Français au CES, surtout si elle se concrétise par plusieurs prix, peut contribuer à attirer toujours plus d'investisseurs dans le pays. Une condition essentielle au développement de l'écosystème d'innovation.

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Depuis trois ans, le gouvernement travaille donc d'arrache-pied pour que la France fasse bonne figure au CES. Avec succès, d'ailleurs. En 2013, seules 15 startups françaises avaient fait le déplacement. Elles étaient 35 en 2014, et 160 en 2015. La France s'était imposée comme le deuxième pays le plus représenté au monde derrière les Etats-Unis. Mieux : la French Tech ne s'était pas contentée de faire de la figuration. Au total, l'Hexagone était reparti avec 23 prix et des articles élogieux dans la presse américaine et mondiale, y compris venant de journaux qui se prêtent d'ordinaire avec délice à l'art du "french bashing".

Au moins 180 entreprises françaises présentes

Les startups françaises feront-elles aussi bien cette année ? Sur le plan comptable, oui. Selon les informations de La Tribune, environ 120 startups figureront dans l'Eureka Park, l'espace où se concentrent les startups les plus innovantes, contre 66 l'an dernier. Au total, ce sont environ 180 entreprises françaises, des grands groupes comme La Poste (qui emmène avec elle 15 startups) aux PME, TPE et startups, qui feront le déplacement.

Un soulagement pour le gouvernement, même si le succès se mesurera surtout aux retombées presse et aux prix glanés par les pépites françaises. "C'est de bon augure, mais on n'a pas vraiment le choix que de faire mieux que l'an dernier, explique Eric Morand, le directeur du département Tech & Services de Business France. On est attendus au tournant, la France doit à nouveau impressionner pour accélérer le cercle vertueux de l'innovation dans le pays".

Selon plusieurs membres de la Mission French Tech et de Business France, le CES 2015 a beaucoup aidé à l'explosion des investissements en France constaté depuis le début de l'année. "Des fonds chinois ont manifesté leur intérêt pour la France après l'édition de l'an dernier", indique Eric Morand. "L'effet CES" aurait aussi pesé dans la décision de Cisco d'investir 200 millions de dollars en France. Bis repetita cette année ?

19 startups distinguées au CES Innovation Awards 2016

Les enjeux sont importants. Heureusement, le cru 2016 commence plutôt bien. Les CES Innovation Awards 2016, qui se sont tenus le 10 novembre, ont récompensé 19 startups françaises. Beaucoup mieux que l'an dernier (5), même si le pays s'était rattrapé dans les concours qui se tiennent pendant le CES (23 récompenses au total).

Parmi les lauréats de ce prix pré-CES qui sert surtout à révéler les tendances, la France s'est particulièrement illustrée dans le domaine de la domotique et des objets connectés. Le boîtier de stockage personnel sécurisé Lima, disponible depuis le 25 novembre, est même reparti avec deux prix, l'un dans la catégorie "maison intelligente", l'autre dans "applications mobiles et tablettes". Prizm, le "cerveau des enceintes" qui choisit automatiquement la musique appropriée à l'ambiance de la pièce et aux personnes qui sont présentes, a, sans surprise, retenu l'attention du jury. Le produit impressionne partout où il passe depuis quelques mois.

Les CES Innovation Awards ont aussi honoré des startups prometteuses, qui pourraient faire parler d'elles dans les mois à venir. Notamment MyECG, le 1er électrocardiogramme de poche, créé par Bewell Connect. Un petit objet de la taille d'une télécommande, capable de surveiller l'activité cardiaque régulièrement, partout, et d'envoyer directement les données au médecin.

Autres innovations à suivre : le thermostat intelligent Ween et le comparateur de consommation énergétique Luminion, d'Ubiant. Grâce à la géolocalisation, Ween adapte en temps réel la température de la maison selon l'occupation des pièces, baisse le chauffage quand le logement est vide, et le remonte progressivement à mesure que le propriétaire se rapproche de son domicile. Peut-être le futur concurrent de Nest et Netatmo, les leaders du secteurs ?

Coaching spécial de Business France

Même si l'édition 2015 a été considérée comme un immense succès, beaucoup de startups n'avaient pas réussi à accrocher suffisamment les distributeurs et les médias.

Business France a donc organisé mardi une journée de formation spéciale. Les 22 startups lauréates du concours pour figurer dans le "French Tech Pavillon" y participaient, dans les locaux du Wai de BNP Paribas. Au programme : des conseils pour aborder et séduire les distributeurs, les médias (7.000 titres sont attendus), mais aussi des conseils d'ordre juridique pour raccourcir le délai entre la présence au salon et la commercialisation du produit.

"Il faut rentabiliser au maximum ces quatre jours, ne rien laisser rien au hasard", confie Eric Morand.

De son côté, le site de la French Tech, l'initiative créée en 2013 pour promouvoir l'écosystème d'innovation made in France, multiplie lui aussi les conseils à destination des startups. L'objectif ? Faciliter la tâche en amont et sur place, par exemple en leur fournissant les contacts pour réserver un stand.

La French Tech a même créé un groupe (privé) sur Facebook, baptisé "La French Tech @ CES", pour interagir directement avec les startups et faciliter la logistique de celles qui hésitent à faire le déplacement. L'idée ? Créer une "communauté » d'entrepreneurs français à Las Vegas. La startup Immersit, qui a développé un "canapé dynamique" qui vibre ou bouge selon ce qu'il se passe dans le film, en a profité pour lancer un appel à d'autres startups pour partager le coût de la location d'une maison pendant le salon.

D'ici à l'ouverture du salon, le 6 janvier à Las Vegas, de nombreux événements se tiendront, à Paris, pour "faire monter la sauce" autour des startups de la French Tech. La course contre la montre a commencé.

Sylvain Rolland

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Commentaires 2
à écrit le 26/11/2015 à 22:03
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Rappelons que le taux d'imposition maxi en France est toujours de 75% (taux du plafonnement ISF°. Comment défendre un taux d'impôt à 75% ?

à écrit le 26/11/2015 à 18:02
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M'enfin, on dit "dans": Les Français "dans" les starting-blocks. Ah bien sûr c'est plus facile à comprendre si l'on a déjà calé ses "pointes" dans, oui dans, ce curieux appareil. Allez donc tâter du tartan, vous m'en direz tant.

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