ManoMano lève 110 millions pour convaincre bricoleurs et pros du bâtiment de lâcher Amazon

Le site leader en Europe de bricolage et de jardinage revendique plus de 20 millions de visites par mois pour 2,5 millions de clients actifs. Il mise sur le service aux professionnels et sur la consolidation de sa présence en Europe pour devenir plus attractif que l'ogre Amazon pour les bricoleurs.
Sylvain Rolland
Les fondateurs Christian Raisson et Philippe de Chanville.
Les fondateurs Christian Raisson et Philippe de Chanville. (Crédits : ManoMano)

Après Doctolib (150 millions d'euros), et Ÿnsect (110 millions d'euros), la French Tech génère une nouvelle méga-levée de fonds. La plateforme de vente en ligne d'outils de bricolage et de jardinage ManoMano annonce mardi 2 avril le succès de son quatrième tour de table, d'un montant de 110 millions d'euros.

Cocorico : alors que la scale-up avait fait appel au fonds américain General Atlantic pour sa dernière levée de 60 millions d'euros en septembre 2017, les fondateurs Christian Raisson et Philippe de Chanville confient le lead aux fonds français Eurazeo Growth, Aglaé Ventures et Large Ventures de Bpifrance. Les investisseurs historiques CM-CIC, Partech, le britannique Piton et l'américain General Atlantic remettent au pot.

Lire aussi : Comment la startup française Doctolib est devenue une licorne

Une croissance exponentielle en six ans

Si ManoMano revient à des fonds français, c'est parce que la pépite de la French Tech préfère consolider ses positions en France et en Europe plutôt que d'étendre sa conquête du monde. Depuis sa création en 2013, la startup a vécu une croissance exponentielle. À l'époque, ManoMano vendait 30.000 références, employait 9 personnes et réalisait 1 million d'euros de chiffre d'affaires. Fin 2017, la plateforme revendiquait 1,2 million de références, 1,9 millions de clients, employait 145 personnes et réalisait 250 millions d'euros de chiffre d'affaires.

Aujourd'hui, ManoMano affiche 3 millions de références, 2,5 millions de clients actifs, emploie plus de 370 personnes et opère sur six marchés : la France, la Belgique, l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne et le Royaume-Uni. Son chiffre d'affaires aurait progressé de 85% en 2018 et la startup vise le milliard d'euros de chiffre d'affaires en 2019.

Son secret : un positionnement technologique avant tout. ManoMano ne se définit pas comme un simple vendeur en ligne spécialisé dans l'aménagement de la maison, mais comme une véritable place de marché, c'est-à-dire un intermédiaire entre les marchands de produits de bricolage et les clients. Ce positionnement lui permet, comme Amazon, de négocier des tarifs très concurrentiels. Ses algorithmes maison - ManoMano a longtemps employé davantage de data scientists que d'ingénieurs -, lui permettent d'offrir une expérience client visiblement satisfaisante si on en croît la croissance du volume d'affaires, avec des recommandations personnalisées et la mise en avant des avis de la communauté, entretenue via un blog, des fiches pratiques, une chaîne YouTube et des conseils en temps réel. De quoi apporter le meilleur du web (une richesse incomparable du catalogue, l'esprit de communauté) et le meilleur des magasins (le conseil des vendeurs, le service après-vente).

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Conquérir le BtoB pour être plus attractif qu'Amazon

Malgré son hypercroissance, ManoMano reste un petit acteur de niche dans un secteur, le e-commerce, dominé par un géant, Amazon, qui a lui aussi décidé de conquérir le marché du bricolage, qui pèse en Europe 365 milliards d'euros. Pour s'assurer un avenir, Christian Raisson et Philippe de Chanville ont décidé de ne pas se limiter à la satisfaction du client final, mais de conquérir aussi le segment du BtoB. En novembre 2018, ManoMano a lancé une plateforme logistique performante pour ses vendeurs, avec un service de facturation, des outils d'optimisation des ventes et des datas marché.

Désormais, la startup lance ManoManoPro, une nouvelle plateforme spécialement dédiée aux professionnels du bâtiment. L'objectif : « disrupter le processus d'achat des artisans, en s'attaquant au marché des fournitures du bâtiment », un segment encore peu digitalisé et estimé à 200 milliards d'euros en Europe.

« Notre ambition est de véritablement transformer les usages de l'industrie, pour cela, nous avons besoin des meilleurs talents tech d'Europe », indique Philippe de Chanville alors que la startup prévoit de recruter « une centaine » d'ingénieurs data dans ses bureaux de Paris, Bordeaux et Barcelone.

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Consolider ses positions en Europe sans ouvrir de nouveaux pays

Enfin, ManoMano compte sur cet afflux d'argent pour poursuivre sa conquête de l'Europe, dont les cinq marchés représentent déjà 25% du chiffre d'affaires de l'entreprise, avec "une croissance à trois chiffres" en 2018.

L'objectif est que ces marchés « puissent suivre la trajectoire de la France », en se concentrant d'abord sur l'Italie et l'Espagne, tout en continuant de développer le catalogue et le portefeuille client au Royaume-Uni et en Allemagne. ManoMano se lance donc dans une véritable course de vitesse :

« Face aux géants chinois et américains de l'e-commerce, l'enjeu de souveraineté européenne est de taille et notre plateforme data ingénieuse et techniquement très avancée est clé pour se différencier », se persuadent les fondateurs de la startup.

S'ils poursuivent sur cette lancée, nul doute que leur prochaine levée de fonds fera de ManoMano une nouvelle licorne française.

Sylvain Rolland

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Commentaires 2
à écrit le 02/04/2019 à 11:57
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Tiens! Le Maire doit se dire qu'il va pouvoir bientôt accrocher une nouvelle entreprise à son tableau de chasse de la taxe à 3% du chiffre d'affaires. Les affaires sont bonnes, enfin si on a une vision à courte vue.

à écrit le 02/04/2019 à 11:54
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J'adore "ManoMano a longtemps employé davantage de data scientists que d'ingénieurs ". Ah bon??? Ils ont peut etre fait des études de psycho ou bien de lettres les "data scientists" chez ManoMano? J'espère que même si ils n'ont pas tous fait une éc...

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