E-mail : la boîte est pleine !

Les critiques se multiplient contre les messages électroniques qui ont envahi nos vies professionnelles et privées. Et les réseaux sociaux, Facebook en tête, offrent aux internautes des outils de substitution.
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Inventé dans les années 1970, le bon vieux courrier électronique - l'e-mail - perd peu à peu de sa superbe. Pas une semaine sans qu'il subisse des attaques en règle. La plus violente est venue récemment du site de TechCrunch, le site d'actualité qui fait la pluie et le beau temps dans la Silicon Valley : « L'e-mail est le diable absolu », tonne le journaliste MG Siegler dans un message en forme de cri de colère intitulé « I'm Quitting Email » (« J'arrête l'e-mail »). « Il y en a trop. Cela ne s'arrête jamais. Et cela ne fait qu'empirer. »

Pourquoi tant de haine pour cet e-mail, qui a explosé à la fin des années 1990, avec la percée d'Internet dans le grand public et chez les professionnels ? La réponse se résume en deux mots : harcèlement et... désorganisation. Le constat est flagrant dans beaucoup d'entreprises : le temps consacré à trier, à répondre ou à supprimer les courriers électroniques n'a cessé de croître ces dernières années. « Certains cadres passent jusqu'à vingt heures par semaine et traitent entre 100 et 200 mails par jour. C'est un facteur de perturbation important », indique Marc-Henri Desportes, vice-président stratégie et innovation de la SSII Atos. L'arrivée du BlackBerry a, à cet égard, marqué un tournant, en « mettant à disposition » ses détenteurs vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

À l'origine, l'e-mail était « une métaphore du courrier traditionnel », explique Jean-Luc Valente, PDG de BlueKiwi, éditeur de réseaux sociaux pour entreprises. Mais très vite, il a largement débordé le cadre de l'échange privé entre deux individus. Il est maintenant utilisé pour converser en direct, échanger à plusieurs, organiser des événements, faire office de boîte à idées. « Sur un mail, il peut y avoir soixante échanges. À la fin, on ne sait plus où l'on en est », indique une victime de cette inflation.

Le déploiement de Facebook change la donne, en bouleversant les modes de communication. Tchatter, échanger à plusieurs, ou en privé, s'inviter à des spectacles, à des concerts, partager de l'information, des photos, des vidéos, donner son avis, l'internaute retrouve l'usage qu'il faisait du mail, mais de manière fluide et organisée. Du coup, parallèlement à l'explosion du réseau social, l'audience du mail a commencé à baisser. Aux États-Unis, la fréquentation des messageries électroniques grand public (Gmail, Yahoo, Hotmail, etc.) a reculé de 4,1 % entre novembre 2009 et mai 2011 à 156 millions de visiteurs uniques en mai, selon Comscore. Ce phénomène d'érosion est encore circonscrit. Ainsi en France, la conversion au numérique des seniors, qui apprécient « le confort de l'e-mail », maintient les audiences, indique une étude Comscore. Même constat dans le monde du travail, où beaucoup de salariés ne sont pas encore équipés. « Sur 25 millions d'actifs, 12 millions ont une boîte mail, mais 13 millions n'ont pas de PC. La demande est grande. Nous constatons une forte croissance d'Exchange [la messagerie de Microsoft] », indique Marc Jalabert, directeur du marketing opérationnel de Microsoft France.

Certains signaux sont tout de même révélateurs. Les messageries Internet les plus anciennes du Web - Hotmail ou Yahoo - ont enregistré en un an et demi des baisses d'audience respectives de 16 et 10 % en France. La mort de l'e-mail n'est bien sûr pas pour demain. « Il reste l'outil phare pour les conversations très privées ou pour gérer sa vie numérique : achats sur Internet, gestion de factures, des relations bancaires », indique Pierre-Éric Jacoupy responsable de Windows live. Mais il est à l'évidence condamné à évoluer.

La déferlante se déplace sur le mobile

La baisse de l'usage du Webmail (en consultant sur le site Web de la messagerie) constatée par Comscore aux États-Unis est concomitante de l'essor de l'usage du mail depuis son mobile. Dans sa dernière étude sur le sujet en janvier, le cabinet relevait que plus de 43 millions d'Américains possédant un mobile avaient consulté leurs e-mails sur leur smartphone en novembre 2010, une proportion en hausse de 40 % en un an. Le cabinet Gartner estime que le nombre d'utilisateurs de l'e-mail depuis un mobile devrait grimper à 1 milliard dans le monde d'ici à 2014.

Un phénomène lié à la démocratisation accélérée des smartphones dans le grand public et en entreprises. Le nombre d'utilisateurs professionnels du mail sur mobile devrait dépasser les 250 millions dans le monde en 2014 selon IDC, alors qu'ils sont estimés autour de 80 millions actuellement. Par ailleurs, le mobile est souvent le premier moyen d'accéder à Internet dans les pays émergents. Nokia en avait fait un des axes de sa stratégie et avait créé Ovi Mail, permettant de créer son compte directement depuis un portable basique. Le service, qui avait séduit plus de 5 millions d'utilisateurs, est en train de migrer vers Yahoo Mail. (D.C.)

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Commentaires 22
à écrit le 27/07/2011 à 7:38
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Si on n?a rien à se dire, on ne s?écrit pas, pas plus sur les réseaux sociaux que sur les e.mails. Donc, on écrit pour communiquer. A quoi servira donc de changer le support si au final il s?agit de communiquer malgré tout ? Pour envoyer moins d?e.ma...

à écrit le 26/07/2011 à 14:38
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Bonjour, Cela arrangera certainement l'entreprise qui a un logiciel approprié pour limité le nombre d'email non sollicités, qui semble être seule sur le marché! Coprdialement, giantpanda

à écrit le 26/07/2011 à 12:46
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Quel est donc l'intérêt de faire la promotion des réseaux sociaux ? Comme si ils en avaient besoin... L'auteur de cette article ne sait t-il pas que depuis 2-3 mois facebook commence à s'essoufler aux états-unis (plus de desinscriptions que de nouvea...

à écrit le 26/07/2011 à 12:08
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Pour un particulier, c'est aussi exaspérant de recevoir sans cesse des invitations de toutes sortes, aussi dès que j'en reçois, je me désinscris et je les classe "indésirable", par contre, on reçois aussi de plus en plus de chaînes, promettant la fo...

à écrit le 26/07/2011 à 10:28
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Il y avait aussi la fin du téléphone fixe , la fin des cables etc .....

à écrit le 26/07/2011 à 10:04
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L'e-mail inventé dans les années 70 ???

le 26/07/2011 à 12:35
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Oui! Parfaitement, inventé par des universitaires américains pour le D.O.D. Dans les années 80, vous pouviez même, grâce à cela, vous connectez au site de la Nasa depuis.... votre minitel (le minitel en X25 étant interconnecté avec le réseau IP d'Ar...

le 27/07/2011 à 22:15
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Il y avait aussi une université de Genève (Suisse) en 1969.

à écrit le 26/07/2011 à 9:43
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Il me semble que tout ceci est avant tout une offensive marketing, soutenue par ceux qui souhaitent la fin du mail, système "ouvert", pour le remplacer par des systèmes fermés contrôlés entièrement par quelques boites privées (facebook, microsoft ou ...

le 26/07/2011 à 11:35
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euh, ce sont des entreprises qui s'expriment. Leur interet c'est de gagner l'argent en productivité. Elles en ont rien à faire de qui fait quoi du moment que ça marche. S'il y a une manigance à voir, ce serait plutôt du même type que le remplacem...

le 26/07/2011 à 12:33
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C'est surtout une aberration de certains PDG comme celui d'Atos qui pour régler un problème supprime une conséquence en la remplaçant par une autre plutôt que la cause.

le 31/07/2011 à 5:19
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Des "internets cloisonnés" dans internet, éco système, consommateurs captifs. Voila comment est pensé le web de demain par les marchands du temple.

à écrit le 26/07/2011 à 8:59
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Il y a 349 milliards (arrondi à 350) d'e-mails journaliers. En admettant qu'il y ait 3 milliards d'ordinateurs dans le monde (ce qui m'étonnerait...), cela ferait donc 117 e-mails par jour/ordinateur. Trés étonnant??...

le 26/07/2011 à 9:20
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Ne pas oublier les quantités monstrueuses de publicités par mail...

à écrit le 26/07/2011 à 8:32
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A contrario, la vérité est là. L'e-mail est un facteur consommateur de temps, trop de temps, et de désorganisation : Il suffit d'envoyer un mail pour demander de faire quelque chose en passant outre les processus.

le 26/07/2011 à 9:09
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Comme il suffit d'aller 2 bureaux plus loin pour demander à quelqu'un de faire quelque chose sans demander au responsable! Donc le problème reste un problème de COMPORTEMENT!

à écrit le 26/07/2011 à 8:04
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Quel est le progrés!? Lire et répondre ponctuellement a ses emails ou rester 24h/24 sur les réseaux sociaux pour pouvoir intervenir?

à écrit le 26/07/2011 à 7:45
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Le mail est un outil! Il ne fait donc que ce que les HUMAINS en font! Le problème n'est pas le mail mais le comportement des personnes qui envoient des mails à tord et à travers, ceux qui répondent de la même manière et les spam. Remplacer le mail ...

à écrit le 26/07/2011 à 7:18
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Promotion des réseaux sociaux? Personnellement, je doute vivement de la pertinence de cet article.

le 26/07/2011 à 9:45
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Je suis d'accord avec vous. Cela doit faire partie d'un plan marketing, d'un plan de communication, et les journalistes se sont fait avoir.

le 26/07/2011 à 12:47
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Bien d'accord ! Qualifier d'échanges par FB comme "organisés" à l'inverse du mail, c'est de la prop' ! Mais bon, après Apple, il faut bien que les journaleux répètent ce que les "chargés de comm" leur dictent...

à écrit le 26/07/2011 à 6:48
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La question ne réside pas dans le moyen de communication utilisé mais dans le temps qu'on peut lui consacrer. Et une constante demeure incontournable : les journées ne font toujours que 24 heures !

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