Spotify, un succès mondial, un gros bémol des artistes

Le site lancé en Suède il y a trois ans vient d'ouvrir son 13e pays, l'Allemagne. Il est la 2e plus grande source de revenus de la musique numérique en Europe, derrière iTunes d'Apple. Mais certains artistes lui reprochent de ne pas leur rapporter assez d'argent.
L'Allemagne est le treizième pays dans lequel le site de streaming musical ouvre son service en langue locale
L'Allemagne est le treizième pays dans lequel le site de streaming musical ouvre son service en langue locale (Crédits : <small>Spotify</small>)

Spotify, nouvel ami de l'industrie musicale ou dangereux apôtre du gratuit ? Les avis sont encore partagés dans le milieu du disque, chez les artistes en particulier. Le site d'écoute de musique en streaming (diffusion en continu, par opposition au téléchargement), qui se présente comme « le service de musique digital leader », accélère son expansion géographique et est en train de devenir incontournable : il vient d'annoncer l'ouverture de son treizième pays, l'Allemagne, ce mardi. Fort d'un catalogue de plus de 16 millions de chansons, la start-up suédoise qui a installé son siège à Londres compte aujourd'hui plus de 10 millions d'utilisateurs actifs en Europe et aux Etats-Unis. Plus des deux tiers consomment de la musique gratuitement : le service Spotify Free donne un accès illimité, financé par la publicité, pendant six mois, puis avec des limites (10 heures par mois, 5 écoutes gratuites par titre, etc). Le site compte un peu plus de 3 millions d'abonnés à ses offres payantes sans pub (à 4,99 euros et 9,99 euros par mois pour la version premium multi-écrans). « Depuis notre lancement il y a seulement trois ans, nous avons reversé environ un quart de milliard de dollars (200 millions d'euros) aux labels et aux éditeurs, qui à leur tour redistribuent aux artistes, compositeurs, et auteurs qu'ils représentent. Spotify est la deuxième plus grande source de revenus dans le secteur de la musique numérique en Europe », derrière iTunes d'Apple, selon les chiffres de l'IFPI, « assurant ainsi que les artistes soient rétribués équitablement » souligne l'entreprise.

Rébellion d'artistes comme Coldplay et Adele
Ce petit rappel n'est pas anodin. Plusieurs artistes de premier plan se sont rebellés ces derniers mois contre Spotify, que certains comparent au Napster ancienne version. Le groupe britannique Coldplay a refusé pendant trois mois que son dernier opus « Mylo Xyloto » soit disponible sur la plateforme Spotify, préférant promouvoir les ventes sur iTunes. L'artiste anglaise Adele a demandé que son album « 21 » ne soit accessible qu'aux abonnés payants (soit 20% des inscrits), ce qu'a refusé le site. Certains artistes sont introuvables sur des plateformes de streaming comme les Beatles, Metallica ou AC/DC. D'autres ont fait retirer leurs titres du site jugeant que les royalties perçues étaient dérisoires, estimées à 1 euro pour 1.000 streams, déduction faite de la part revenant à la maison de disque.

En constatant que des milliers de diffusion ne lui rapportaient presque rien, la chanteuse LaRoux s'est écriée « ça suffit, je retire mon album, les royalties couvrent à peine de quoi s'acheter un jeu de cordes de guitare ! » a raconté Jazz Summers, son manager et celui du groupe The Verve, au quotidien « The Independent ». Selon le manager de U2, Paul McGuinness, « Spotify doit encore se rendre populaire aux yeux des artistes, qui ne voient pas l'intérêt financier pour eux. C'est en partie la faute des labels, puisqu'ils possèdent en partie Spotify, et il y a un manque de transparence » a-t-il déclaré le mois dernier au magazine spécialisé américain Billboard. En effet, impossible d'obtenir confirmation de ce secret de polichinelle mais les quatre grandes majors (Universal, Sony Music, Warner, EMI) sont actionnaires de Spotify (à hauteur de 2% à 6% du capital chacune selon Bloomberg), aux côtés d'autres investisseurs : l'été dernier, la société a levé 100 millions de dollars pour se lancer aux Etats-Unis auprès de DST, de Kleiner Perkins et d'Accel, sur la base d'une valorisation de 1 milliard de dollars.


Des utilisateurs qui n'ont jamais acheté de CD
« Spotify génère de sérieux revenus aux ayants droit », rappelle l'entreprise. Ses comptes sont d'ailleurs éloquents : en 2010 (derniers chiffres connus), la société a reversé 64 millions de livres sterling en royalties, soit autant que son chiffre d'affaires (63,2 millions de livres), ce qui s'est traduit par une perte après impôts de 26,5 millions. Le modèle économique reste difficile à trouver, ce qui a conduit son concurrent français Deezer à s'adosser à l'opérateur Orange.

Spotify mise beaucoup sur son intégration avec Facebook, qui favorise le partage, l'écoute par recommandation. Son pari est de convertir au payant ses utilisateurs les plus mélomanes. « Il faudra du temps à certains artistes pour réaliser l'intérêt d'offrir leur musique à notre audience. De nombreux utilisateurs de notre site appartiennent à une génération qui n'a rarement, voire jamais, acheté de CD ou de MP3... » a réagi Spotify quand Coldplay lui a finalement confié son album. Selon le site de streaming, « il n'y a pas la moindre preuve que ne pas diffuser un album sur Spotify soutient les ventes globales d'aucune façon. Cela ne fait que punir les fans actuels ou futurs pour avoir choisi un site légal de musique et cela les contraint à aller sur des sites de bit torrent [de partage de fichiers en général illégaux NDLR] ou sur YouTube » a-t-il plaidé au sujet du refus d'Adele. Car le site rappelle qu'il s'est lancé en 2008 « dans le but de créer une meilleure alternative plus facile et légale face au piratage de musique. »
 

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Commentaires 3
à écrit le 18/09/2012 à 11:12
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Cuny, cuny? Ca me dit quelque chose...Ah, je l'ai sur le bout de la langue...:-)

à écrit le 18/09/2012 à 9:45
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(...) "dans le but de créer une meilleure alternative plus facile et légale face au piratage de musique". Et c'est exactement ça qui me séduit: une offre légale qui est plus facile, plus agréabe, plus axé sur la découverte et presque aussi bon march...

à écrit le 14/03/2012 à 7:50
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Site de musique NUMERIQUE leader, pas DIGITAL (qui, en français, fait référence aux doigts, contrairement au "digital" anglais qui se traduit par "numérique). Merci d'apporter la correction :-)

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