Qui est Gotham City, le superhéros qui a fait chuter Gowex ?

Au lendemain de la confession du PDG du spécialiste espagnol des accès WiFi, la "mystérieuse" société américaine qui avait dénoncé des comptes falsifiés publie sa "réponse". Elle y invite les acteurs et les médias à enquêter davantage sur les fraudes de la finance... mais elle garde le secret sur sa propre identité.
Giulietta Gamberini
Gotham City Research, qui emprunte son nom de la ville de Batman, indique sur son site qu'elle se concentre sur des investissements dans des "cas spéciaux", en s'appuyant sur l'audit des comptes. | Reuters

"Gowex vaut 0 € euro par action. Plus de 90% du chiffre d'affaires déclaré de Gowex n'existe pas. Nous pensons que ses revenus réels sont inférieurs à 10 millions d'euros."

En ces trois phrases pouvait se résumer le contenu de l'étude de 90 pages, publiée mardi par la société américaine Gotham City Research, qui a suffi pour faire perdre à l'espagnol Gowex, spécialiste des accès WiFi dans les transports et les lieux publics, 600 millions d'euros de capitalisation boursière en une séance.

Ni un courtier ni un cabinet ayant pignon sur rue

Non signée mais présentée comme la conclusion de "huit mois d'audit", l'étude était d'abord rejetée en bloc par le directeur général de Gowex, Jenaro Garcia Martin, qui parlait de déclarations "diffamatoires" visant délibérément à nuire au cours de Bourse de sa société. Le caractère "mystérieux" de Gotham City, qui n'est pas un courtier ni un cabinet ayant pignon sur rue, avait d'ailleurs suscité une certaine méfiance, partagée par les analystes comme par les médias: sur son site, pour toute présentation, la société indique qu'elle se concentre sur des investissements dans des "cas spéciaux", en s'appuyant sur l'audit des comptes (due diligence), laissant ainsi entendre qu'il s'agit probablement d'un fonds spéculatif (hedge fund). Elle admet d'ailleurs pouvoir avoir "des positions d'acheteur ou de vendeur" sur les valeurs qu'elle couvre.

S'appuyant sur ces soupçons, l'autorité boursière espagnole (CNMV) annonçait son intention d'enquêter sur Gotham City, pour déterminer si son rapport pouvait "constituer un abus de marché présumé"... avant que le PDG de Gowex ne reconnaisse dimanche avoir effectivement falsifié les comptes de sa société.

Un deuxième rapport en cours de préparation

Le lendemain de cet aveu, qui vaut preuve de légitimité pour l'auteur du rapport, Gotham City Research publie sa"réponse formelle", où il se réjouit:

 "C'est une chance pour Gotham City Research comme pour l'Espagne que le PDG Jenaro Garcia Martin ait confessé ses erreurs hier, épargnant à nous tous beaucoup de temps (nous étions en train de préparer un deuxième rapport, au cas où la société aurait continué sa charade)".

Quid des autres n'ayant pas confessé?

"Mais une autre question reste ouverte", insiste néanmoins Gotham city: "Quid du 99,99% des autres cas de fraudes financières, dans lesquels les PDG et les sociétés, une fois mis en cause, ne confessent pas?"

La société cite notamment quelques-unes des autres victimes de ses rapports dévastateurs, qu'elle a commencé à publier en février 2013: Quindell et Ebix notamment, ainsi que leurs PDG, respectivement Robert Terry (aujourd'hui évincé) et Robin Raina, coupables selon ses dires d'avoir continué de mentir.

Les États-Unis plus sévères vis-à-vis d'un voleur de pain que d'un fraudeur financier

Elle s'interroge:

"Pourquoi aux États-Unis un pauvre étant accusé d'avoir volé un pain peut être détenu dans l'attente de la décision (malgré la présomption d'innocence), alors que des fraudeurs tels Jenaro Garcia Martin, Robert Terry et Robin Raina ont le droit de prospérer et de s'enrichir injustement, y compris après des accusations accablantes et fondées sur des éléments factuels?".

Et de conclure: "Les Américains devraient apprendre deux ou trois choses de l'Espagne, en matière d'honneur personnel, d'intégrité et de responsabilité".

Un même objectif: le profit

Puisque les faits montrent que les vendeurs à découvert sont les mieux placés pour détecter ces fraudes, les acteurs du marché, les médias et les régulateurs devraient enquêter sur les faits illicites perpétrés, plutôt qu'accabler ceux qui les dénoncent, insiste Gotham City.

"Sur 1.000 voire 10.000 sociétés, PDG ou promoteurs ayant tiré profit de comportements illicites, il y a peut-être un vendeur à découvert ayant fait de même", souligne d'ailleurs la société.

Pas d'illusion d'ailleurs: ces acteurs partagent tous la même motivation du profit. La seule "bonté" ne peut donc résider que dans la vérité des analyses... et, en cas de mensonges, les marchés seraient, selon Gotham Project, bien plus sévères avec les vendeurs qu'avec les PDG, les banques d'investissements ou les promoteurs.

Un "groupe de vendeurs à découvert"

Dans sa tirade, Gotham City Research, qui emprunte son nom de l'univers des superhéros (il s'agit de la ville de Batman), ne lève pas pour autant le "mystère" sur son identité.

Selon le Financial Times, qui s'y était penché en avril dernier, à l'occasion de la publication d'un "rapport très critique" de la société sur le cabinet de conseil britannique Quindell (qui avait envoyé son cours au tapis dans un scénario comparable à celui de Gowex), ce "groupe de vendeurs à découvert" serait lié à un certain Daniel Yu, présent sur Twitter sous le pseudonyme @LongShortTrader.

Une attitude "optimiste"

Pour sa part, dans sa réponse du 7 juillet, Gotham City se limite à ajouter un élément d'identité: ne pas "être macro-économiquement pessimiste (pour la plupart du temps)".

"Gotham Project tend à être globalement optimiste. Nous croyons qu'il est fou de parier contre l'humanité et l'ingéniosité humaine, sur le long terme".

Il insiste : les accusations des sociétés accusées de fraudes à son encontre son diffamatoires, et pouvoir le prouver, mais déclare ne pas compter intenter d'action légale pour le moment. D'une manière quelque peu mystérieuse, il conclut:

"Ce n'est pas ce que nous sommes en-dessous, mais ce que nous faisons qui nous définit".

Giulietta Gamberini

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Commentaires 11
à écrit le 26/07/2014 à 21:43
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"Ce n'est pas ce que nous sommes en-dessous, mais ce que nous faisons qui nous définit". ou "It's not who i am underneath, but what i do, that defines me". Aucun mystère, c'est une phrase que Batman dit à Rachel dans Batman Begins de Christopher Nol...

à écrit le 08/07/2014 à 14:43
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"Ce n'est pas ce que nous sommes en-dessous, mais ce que nous faisons qui nous définit". WTF? Elle ne veut rien dire cette phrase! Il faut arrêter Google traduction...

à écrit le 08/07/2014 à 11:24
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Cette affaire montre surtout la défaillance des cabinets d'audit qui ont certifié les comptes. Comment certifier une coquille vide. Cela montre bien qu'il y a un problème. Les investisseurs devraient se retourner vers m&a et Ey sont suppléants car il...

à écrit le 08/07/2014 à 8:57
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La tribune: "sur son site, pour toute présentation, la société indique qu'elle se concentre sur des investissements dans des "cas spéciaux", en s'appuyant sur l'audit des comptes (due diligence), laissant ainsi entendre qu'il s'agit probablement d'un...

le 08/07/2014 à 10:08
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Bien souvent les escrocs avancent masqués...

à écrit le 08/07/2014 à 5:27
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Vos traduction de l'anglais sont très mauvaises...

à écrit le 08/07/2014 à 3:30
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C'est la meilleur de l'année, il faudrait refiler une médaille aux vendeurs à découvert qui empruntent (sans leur consentement) les titres des petits porteurs pour les descendre plus bas que terre et les rachetant pour une bouchée de pain après avoir...

le 08/07/2014 à 10:23
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la vad est le pendant nécéssaire à toute valorisation délirante, excéssive, sans fin qu' exigerait le mouton.. revenir sur terre çà fait du bien aussi.. Si on vous écoutait le cours de fte serait sur 5 millions d' euro, enron sur 10 milliards de doll...

le 08/07/2014 à 11:33
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Les petits porteurs ne sont pas floués par Gotham City ou les vendeurs à découvert, mais par les dirigeants de ces sociétés qui falsifient les comptes! N'accusez pas à tort ceux qui vous ouvrent les yeux! Si cette société n'investit pas dans le cap...

le 09/07/2014 à 3:24
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Tiens c'est le festival des vadeurs pour justifier leur escroquerie... le marché c'est l'offre et le demande, quand bien même il serait "délirant", cela ne serait pas plus "délirant" que n'importe quel trafic illicite (drogue, services sexuels, etc)....

à écrit le 08/07/2014 à 3:16
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Gotham City c'est François Hollande, la finance est mon ennemi, , pas de nom , pas de visage, tout ça, tout ça...

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