Jeff Bezos, le divorce le plus cher de l'histoire

La séparation de l'homme le plus riche du monde, Jeff Bezos, et de son épouse éveille des inquiétudes quant à l'avenir d'Amazon.
Jeff (55 ans) et MacKenzie Bezos (48 ans) se sont rencontrés il y a vingt-six ans, en 1993, soit avant la création du géant mondial de l'e-commerce et du cloud. Le divorce du couple pourrait avoir un impact sur l'avenir d'Amazon.
Jeff (55 ans) et MacKenzie Bezos (48 ans) se sont rencontrés il y a vingt-six ans, en 1993, soit avant la création du géant mondial de l'e-commerce et du cloud. Le divorce du couple pourrait avoir un impact sur l'avenir d'Amazon. (Crédits : ZZ/Dennis Van Tine/ Star Max / IPX 2019)

Le divorce de Jeff Bezos, annoncé par l'entrepreneur sur son compte Twitter le 9 janvier dernier, n'en finit pas de faire couler de l'encre aux États-Unis. Certes, la vie sentimentale des célébrités a de longue date suscité l'intérêt des tabloïds américains. Mais ici, l'affaire intéresse tout autant la presse people que les journaux économiques. Car au-delà de la vie privée du couple, elle concerne aussi l'avenir d'Amazon. Les deux époux se sont rencontrés en 1993, soit avant la création du géant mondial de l'e-commerce et du cloud. À l'époque, ils travaillent tous deux pour le fonds d'investissement E. D. Shaw, à New York. Après avoir fait ses armes dans la banque, Jeff Bezos y occupe alors le poste de Senior Vice President. Sa future femme, MacKenzie S. Tuttle, travaille de son côté comme assistante administrative, afin de payer les factures, tandis qu'elle planche sur un premier roman. Ils se marient quelques mois après leur rencontre.

Mais Jeff Bezos, qui a toujours été un lecteur vorace, et nourrit de longue date des ambitions entrepreneuriales, souhaite surfer sur la vague internet et lancer une plateforme de vente de livres en ligne. Sa femme, qui a étudié la littérature à Princeton, est enthousiaste. En 1994, le couple empile ses bagages dans sa voiture et prend la route pour la côte ouest et Seattle, l'épouse de Jeff Bezos au volant tandis que celui-ci griffonne le plan d'affaires de sa future entreprise et multiplie les coups de fil aux investisseurs potentiels. Parmi ceux-ci figurent ses propres parents, auxquels il emprunte la coquette somme de 300.000 dollars.

MacKenzie devient ensuite l'une des premières employées d'Amazon, où elle officie comme comptable, négocie le tout premier contrat de l'entreprise avec la chaîne de librairies Barnes & Noble, et assiste son mari pour diverses tâches, y compris la manutention des envois, dans leur garage aménagé en bureau de fortune. En 1995, Amazon vend son premier livre (consacré à... l'intelligence artificielle). Quatre ans plus tard, en 1999, Jeff Bezos est nommé personnalité de l'année par le magazine Time. À mesure que l'entreprise grandit, MacKenzie Bezos s'efface peu à peu pour se consacrer à sa carrière d'écrivain. Mais le rôle clef qu'elle a joué aux débuts d'Amazon pourrait aujourd'hui avoir un impact sur la séparation des biens.

Un risque de taille pour Amazon

Homme le plus riche du monde selon le dernier classement Forbes, Jeff Bezos est à la tête d'une fortune estimée à 131 milliards de dollars. La quasi-totalité provient d'Amazon, dont il détient 16 % des parts, ce qui en fait l'actionnaire majoritaire. En vertu de la loi en vigueur dans l'État de Washington, où réside le couple, en cas de divorce, les biens acquis depuis le mariage doivent être répartis de manière « équitable » entre les époux. Dans le cas présent, étant donné que le couple s'est marié avant la création d'Amazon, et que MacKenzie Bezos a largement participé à lancer l'entreprise, « il semble probable que les actions soient divisées à peu près en deux », selon l'analyse de James Spencer, avocat chez Brothers & Henderson, rapportée par Business Insider.

> Lire aussi : Divorce de Jeff et MacKenzie Bezos : Quelles répercussions sur Amazon ?

L'épouse de Jeff Bezos pourrait donc se retrouver demain avec 8 % des parts, ce qui ferait d'elle la seconde actionnaire majoritaire et lui donnerait un pouvoir décisionnaire important. Pour peu que les choses aillent mal entre les ex-époux, on comprend qu'une telle perspective ait de quoi inquiéter les marchés financiers et le reste des actionnaires... Une autre possibilité serait que MacKenzie Bezos touche une somme en espèces représentant la valeur de la moitié des actions. Mais dans ce cas-là, Jeff Bezos serait contraint de vendre une fraction de ses parts pour réunir la somme nécessaire, ce qui pourrait faire plonger la valeur boursière d'Amazon. Ainsi, alors que le géant du commerce en ligne est en plein essor, le divorce de son fondateur constitue la première menace sérieuse, depuis plusieurs années, sur sa bonne santé économique.

L'ombre de Trump

Mais l'affaire revêt également un aspect politique. Le 10 janvier dernier, soit le lendemain de l'annonce du divorce, le National Enquirer, un tabloïd américain, consacre un long article à la liaison de Jeff Bezos avec l'ancienne présentatrice Lauren Sanchez, qui est à la ville la femme du patron de l'une des plus grandes agences de talents d'Hollywood, et publie des textos échangés entre les deux amants. Jeff Bezos a dans la foulée ouvert une enquête pour découvrir comment ces messages avaient été obtenus, ainsi que les éventuels motifs politiques derrière leur publication. Le National Enquirer appartient en effet à l'American Media Inc., dont le CEO, David Pecker, est un proche de Donald Trump.

Or, le 7 février dernier, dans un article publié sur Medium, le patron d'Amazon a exposé comment le journal avait ensuite tenté de le faire chanter en le menaçant de publier des photos intimes, et davantage de SMS coquins, s'il ne renonçait pas à son investigation. « Plutôt que de capituler face à ces tentatives de chantage et d'extorsion, j'ai décidé de publier exactement ce qu'ils m'ont envoyé [...] Si, dans ma position, je ne peux résister à ce type de pratiques, qui d'autre le pourrait ? » écrit Jeff Bezos.

Il n'en fallait pas plus pour que certains soupçonnent le président américain d'avoir exercé son influence sur le National Enquirer pour entacher la réputation de Jeff Bezos, à qui on a prêté des ambitions politiques. D'autant que celui-ci est un opposant affiché de Donald Trump, dont il a notamment critiqué la politique migratoire. Trump, de son côté, s'en est souvent pris au CEO d'Amazon sur Twitter, accusant le Washington Post (qui lui appartient) d'être biaisé politiquement à son encontre et affublant Jeff Bezos du sobriquet de « Jeff Bozo » (« Jeff L'idiot »).

Lire aussi : Amazon déclaré persona non grata à New York

Il n'est pour l'heure nullement prouvé que le président américain soit impliqué dans l'affaire. Elle permet cependant à Jeff Bezos de s'affirmer comme opposant politique à Trump et ardent défenseur de la protection de la vie privée. Un comble à l'heure où son entreprise est sous le feu des critiques pour avoir vendu ses algorithmes de reconnaissance faciale au gouvernement américain. Fortunes colossales et avenir stratégique d'Amazon en jeu, le tout sur fond de chantage et de suspicions de magouilles politiques... bref, loin d'être cantonné à la chambre à coucher, le divorce de Jeff Bezos est d'ores et déjà une affaire publique, dont nous n'avons pas fini de suivre les rebondissements.

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JEFF BEZOS EN 4 DATES

  • 1994 : il fonde Amazon
  • 2000 : il lance la société de tourisme spatial Blue Origin
  • 2013 : il rachète le Washinton Post pour 250 millions de dollars
  • 2017 : il devient l'homme le plus riche du monde, avec une fortune alors estimée à plus de 90 milliards de dollars, devenue depuis 131 milliards.

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Commentaires 3
à écrit le 20/03/2019 à 10:38
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et voila le sérieux du système du marché financier, l'action monte si le pdg embrasse sa femme ou baisse s'ils s'ignorent ou ne se tiennent pas la main lors d'une festivité..... l'économie est une science n'oubliez pas ....... pendant ce temps d'autr...

à écrit le 20/03/2019 à 9:44
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ce ne sera pas très grave si amazon disparait.....il est entrain de mettre la main sur la planète.... la nature ayant horreur du vide......ce qui ne se vend pas sur amazon se vendra ailleurs

à écrit le 20/03/2019 à 8:38
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Amazon n'est qu'un site marchand si jamais il devait vaciller ou tomber cela ne serait pas bien important. Comme toutes les multinationales me direz-vous, elles sont remplaçables, seule l’orthodoxie européenne néolibérale impose des multinational...

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