Pour les médias, « Ignorer les réseaux sociaux, c'est courir à la catastrophe »

Samantha Barry, directrice senior de la stratégie de la chaîne de télé américaine CNN, a présenté au GEN(*) les opérations menées depuis sa prise de fonction, il y a un an. Pour cette ancienne de la BBC, qui a aussi goûté à la radio et au Web, les médias ne peuvent plus ignorer les réseaux sociaux.
Selon Samantha Barry, directrice senior de la stratégie de CNN, les réseaux sociaux sont "l'éléphant dans le salon" : si dérangeant qu'on préfère nier sa présence. Les médias qui continuent d'ignorer cette révolution courent à la catastrophe.

LA TRIBUNE - Pourquoi un média comme CNN met-il les réseaux sociaux au coeur de sa stratégie ?

SAMANTHA BARRY - Les usages changent. Les gens veulent dialoguer autour de l'actualité et non plus recevoir un récit, surtout les jeunes. Ils picorent l'information 24 h/24 via leur smartphone, au gré des articles qu'ils voient passer sur les réseaux sociaux plutôt qu'en se connectant à un site média. Il faut donc aller chercher l'audience là où elle se trouve, et l'inciter à rester fidèle. Nous avons des chaînes de télévision et un site Internet puissants, des applications mobiles et des comptes Facebook et Twitter très suivis, mais nous devons continuer à expérimenter. Les réseaux sociaux sont « l'éléphant dans le salon » des médias : si dérangeant qu'on préfère nier sa présence. Les médias qui continuent d'ignorer cette révolution courent à la catastrophe.

Comment vous lancez-vous à la conquête des réseaux sociaux ?

Les médias intègrent les réseaux sociaux à la fin de leur processus de production : c'est une erreur. Nous avons fait le pari d'une production spécifique pour les réseaux sociaux, avec des contenus conçus pour chaque plateforme. Nous nous concentrons sur Snapchat [une plateforme de vidéos courtes, supprimées au bout de vingt-quatre heures, ndlr], qui est très populaire aux États-Unis auprès des jeunes. Par exemple, nous avons réalisé un sujet sur les effets de la marijuana sur le corps, un autre sur le réchauffement climatique, ou encore sur les enfants pauvres de la Silicon Valley. Lors des élections générales au Royaume-Uni en mai dernier, nous avons mené une édition spéciale avec les internautes et 12 journalistes.

Nous soignons la qualité, dans le fond comme dans la forme. Je ne crois pas aux contenus divertissants d'audience, car ils ne sont pas représentatifs de notre marque. Néanmoins, nos sujets doivent répondre aux préoccupations des gens. Nous suivons de près la performance des sujets.

Comment monétisez-vous ces contenus spécifiques diffusés sur les réseaux sociaux ?

La part des revenus du groupe générés par nos actions sur les réseaux sociaux est difficile à quantifier. Nos productions pour les réseaux sociaux visent à toucher des personnes qui ne nous connaissaient pas jusqu'alors. Cette prise de contact avec la marque permet ensuite de diriger les gens vers nos plateformes traditionnelles, que ce soit la télévision ou notre site Web, monétisés par la publicité.

Nous avons aussi conclu un accord de partage des revenus avec Snapchat et Youtube. Enfin, nous vendons notre savoir-faire à des marques pour les accompagner sur les réseaux sociaux. Nous avons réalisé une première opération pour Philadelphia, avec de bons résultats. Nous allons continuer dans cette voie.

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(*) Le Global Editors Network (GEN) est, selon ses concepteurs, "une communauté de plus de 2.300 rédacteurs en chef appartenant à tous les types de médias : papier, radio et télévision, web, agences de presse, etc." dont la mission est de "de définir le journalisme du futur, en privilégiant l'innovation au sein des salles de rédactions."

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