Twitter et les applis, une histoire d’amour… et d’argent

Le réseau social aux 288 millions d’utilisateurs actifs dans le monde se pose en lieu de découverte privilégié des applications, de services ou de jeux. Il incite les développeurs à en faire la promotion sur son site, par le biais de tweets sponsorisés ciblés.
Delphine Cuny
« Un tiers des utilisateurs français de Twitter considèrent la plateforme comme un endroit formidable pour découvrir des applications. Les développeurs et éditeurs d'applications ont tout intérêt à investir sur Twitter » fait valoir l'entreprise de San Francisco.

Peut-être avez-vous entendu parler - et même testé - la dernière application à la mode, Meerkat, qui propose de « tweeter des vidéos live », de diffuser en direct à ses abonnés sur Twitter une vidéo éphémère, impossible à voir en différé - sauf si l'auteur l'enregistre et la rediffuse. Lancée fin février, cette application iPhone de la startup israélienne Life On Air était la vedette du festival très tendance SXSW d'Austin et a effectué un démarrage sensationnel (on parle de 300.000 utilisateurs), grâce à la viralité de Twitter... qui a pourtant acquis une startup au produit concurrent, Periscope. Moins exploité que Facebook par les annonceurs, Twitter, qui a besoin de doper ses revenus publicitaires, espère s'imposer comme le lieu de découverte privilégié des applications mobiles, de jeux, de marque ou de services, et possède un certain nombre d'atouts pour cela.

Des Twittos amateurs d'applis et prescripteurs


Le site de « gazouillis » en 140 signes, qui vient de fêter ses neuf ans d'existence, met en avant que « le mobile c'est l'ADN de Twitter » : ses cofondateurs l'ont pensé comme une plateforme de communication de messages courts, sur le modèle des SMS. Aujourd'hui, 80% des 288 millions d'utilisateurs actifs par mois du site consultent leur fil d'actualité de tweets depuis leur smartphone. Né sur mobile, Twitter est avant tout « une plateforme de centres d'intérêts » et de découverte de contenus, sur laquelle les utilisateurs se rendent « pour s'informer et échanger sur leurs sujets de prédilection », plutôt que pour regarder les exploits du petit dernier de leurs amis d'enfance ou cousins...

Les « twittos » français auraient 16% d'applications installées de plus que l'ensemble des internautes et en utiliseraient 28% de plus, selon une enquête en ligne réalisée en février par Research Now pour Twitter. 56% d'entre eux auraient téléchargé une appli au cours du mois précédent et 40% seraient prêts à en télécharger une vue sur Twitter. Ils seraient aussi « 2,2 fois plus susceptibles de télécharger une appli payante et 3,1 fois plus » enclins à réaliser un achat intégré au sein d'applications que la moyenne des utilisateurs de smartphone. Selon l'enquête Research Now, les utilisateurs français de Twitter auraient dépensé pour 30 millions d'euros dans les applis payantes et achats intégrés au cours du mois précédent. Ce sont aussi des prescripteurs : 53% des twittos français parleraient des leurs applis préférées à leurs amis et leurs familles.

« Un tiers des utilisateurs français de Twitter considèrent la plateforme comme un endroit formidable pour découvrir des applications. Les développeurs et éditeurs d'applications ont tout intérêt à investir sur Twitter » fait valoir l'entreprise de San Francisco.

Sortir du lot en ciblant par centre d'intérêts


Dans les magasins d'applications, il est devenu de plus en plus difficile de sortir du lot, sachant que Google Play en propose 1,4 million et l'App Store d'Apple autant. Twitter invite les développeurs et éditeurs d'applications à « transformer ces utilisateurs en potentiels ambassadeurs, par exemple en leur proposant du contenu exclusif, des offres spéciales, ou en répondant directement à leurs besoins exprimés sur la plateforme. » Mais aussi à utiliser « ses outils de promotion d'application extrêmement puissants », les tweets sponsorisés (c'est-à-dire payants) - l'App Store d'Apple lui-même achète des tweets sponsorisés pour découvrir « les meilleures nouvelles apps incontournables » - ainsi que la « carte d'application », un tweet qui décrit l'application, présente une photo et un lien direct pour la télécharger d'un simple clic, sur les magasins d'apps de Google ou d'Apple.

Twitter souligne qu'il est possible de cibler par centre d'intérêts, par mot-clé, par nom d'utilisateurs pour s'adresser aux abonnés d'une célébrité, d'un sportif, mais aussi par modèle d'appareil, par type de connexion (en WiFi pour les applications lourdes à télécharger). Cette carte de promotion permettrait de réduire le "coût par installation" (CPI) par rapport à d'autres canaux marketing. L'éditeur de jeu vidéo EA a été un des pionniers de cet outil en bêta, comme le service de VTC Lyft et les services de streaming musical Spotify et Deezer, qui se déclarent satisfaits des résultats.

Ce marché de la publicité de promotion d'applications à installer aurait atteint  6 milliards de dollars dans le monde l'an dernier selon le cabinet Flurry, tandis qu'eMarketer ne l'évalue qu'à 1,67 milliard pour le seul marché américain, tout en prédisant une très forte croissance (+80% en 2015).

En France, le site de covoiturage BlaBlaCar utilise la promotion d'application depuis l'été dernier dans plusieurs pays, notamment l'Espagne et plus récemment la Turquie, et s'en dit «assez content. »

« Nous utilisons Twitter principalement pour son outil « Mobile App Card » qui permet de faire la promotion de notre application dans le fil d'actualité avec un « call to action » [lien, bouton ou visuel] de téléchargement. C'est un produit très orienté sur la performance, plus que le tweet sponsorisé, puisque son prix est fixé au nombre de clics externes. Le trafic est de bonne qualité : le téléchargement est généralement suivi d'actions, de la publication de trajet (de covoiturage) par exemple » confie à La Tribune Martin Boutges, chargé de projets de croissance chez BlaBlaCar.


Il relève que Twitter a l'avantage de proposer des options de ciblage sur les émissions de télévision, ce qui permet des opérations en soutien d'une campagne pub télévisée. L'un des atouts de Twitter est aussi qu'il y a « un peu moins de compétition » que sur Facebook notamment, où les prix sont en train de grimper.

Un défaut perdure : la taille restreinte de l'audience


Mais revers de la médaille, « Twitter manque un peu d'inventaire » observe celui dont le job est de faire croître le nombre d'utilisateurs de l'application de covoiturage (5 millions de téléchargements revendiqués), et ce particulièrement en France, où le profil des twittos est technophile et connecté, un handicap pour des marques cherchant à ratisser plus large, vers des profils plus seniors par exemple. « Les volumes de téléchargement dépendent de la force de la communauté dans le pays » note Martin Boutges.


Twitter ne communique pas non plus le nombre de ses utilisateurs actifs ni son audience par pays, même aux annonceurs. Le cabinet eMarketer estime à seulement 2,9 millions le nombre d'utilisateurs actifs en France en 2014 (3,2 millions projetés en 2015), soit à peu près autant qu'en Allemagne.

Selon les tous derniers chiffres du cabinet ComScore, l'audience de Twitter aurait atteint un pic de 7,1 millions de visiteurs uniques en janvier et serait retombée à 5,3 millions en février 2015. Un chiffre quatre fois inférieur à l'audience de Facebook (26,8 millions contre 6,5 millions selon Médiamétrie)...

Article publié dans notre édition quotidienne réservée aux abonnés le 25/03/2015.

Delphine Cuny

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