L'OPE chahutée d'Altice sur SFR

Cette opération, qui doit permettre à Patrick Drahi de prendre totalement le contrôle de l’opérateur au carré rouge en le retirant de la cote, a été retardée de deux semaines par l’AMF. En outre, certains actionnaires minoritaires s’estiment trop désavantagés par la parité d’échange proposée.
Pierre Manière
Dans une lettre à l'AMF, le fonds CIMA fustige les « travaux d’expertise effectués dans le cadre de l’attestation d’équité relative à la parité d’échange proposée par Altice aux actionnaires minoritaires de SFR ».

Au début du mois, Michel Combes présentait le projet d'OPE d'Altice sur SFR comme une initiative somme toute naturelle, visant à « simplifier la structure capitalistique du groupe ». Et pourtant, depuis la rentrée, des voix s'élèvent et s'interrogent sur cette opération. Laquelle permettra à Altice (qui possède déjà près de 78% de SFR), si elle réussit, de retirer l'opérateur au carré rouge de la cote. Initialement, celle-ci devait être lancée ce jeudi 22 septembre. Mais ce ne sera pas le cas puisque l'AMF, le gendarme de la Bourse, n'a pas encore donné son feu vert. Ce mardi, elle a même repoussé l'opération d'au moins deux semaines en raison « de demande de documents additionnels », explique une responsable de la communication.

« Cela n'a rien d'exceptionnel: pour des opérations de ce type, il est très courant que les procédures soient interrompues par des demandes d'informations », poursuit-elle. Pourtant, la semaine dernière, des actionnaires minoritaires de SFR se sont rebiffés contre les modalités cette OPE, jugeant que la parité d'échange (huit actions Altice contre cinq actions SFR) leur est trop défavorable. Parmi eux, il y a Charity & Investment Merger Arbitrage (CIMA). D'après l'AFP, ce fonds s'est fendu d'une lettre à l'AMF. Dans cette missive, ses responsables fustigent les « travaux d'expertise effectués dans le cadre de l'attestation d'équité relative à la parité d'échange proposée par Altice aux actionnaires minoritaires de SFR ». Avant de dézinguer, entre autre, « la méthodologie d'évaluation suivie par le cabinet Accuracy [l'expert indépendant, Ndlr] », laquelle serait « tronquée et partiale ».

Racheter les minoritaires pour « pas cher »

A ce sujet, la responsable de la communication de l'AMF ne fait « pas de commentaire », et refuse de faire le lien avec le rallongement de la procédure en cours. Quoi qu'il en soit, ce délai donnera un peu plus de temps à CIMA pour mobiliser d'autres minoritaires. Et pourquoi pas, pousser Altice à formuler une nouvelle offre plus intéressante.

Reste que le contexte actuel n'est guère à leur avantage. « D'une certaine manière, à court terme, les difficultés de SFR [qui a signé une perte de 84 millions au premier semestre et dont le titre est au plus bas en Bourse, Ndlr] arrangent Patrick Drahi, décrypte un analyste. En communicant sur le fait que ça va mal, il justifie la parité actuelle et argue qu'il n'y a nul besoin de la réviser à la hausse... »

De quoi, in fine, racheter les minoritaires pour « pas cher », juge notre analyste. Pour lui, Patrick Drahi parie probablement sur un rebond de l'opérateur en 2017 « grâce aux économies de coûts et à l'amélioration du réseau ». Ce qui lui permettra, à ce moment-là, de rafler « 100% des dividendes ».

Pragmatisme financier

Un pragmatisme sur le plan financier qui lui ressemble parfaitement. A ce sujet, en avril dernier, il avait fait la leçon aux étudiants de Polytechnique : « Souvent, la grande différence entre un créateur d'entreprise qui est très bon dans les idées, et quelqu'un qui va savoir développer son entreprise à très long terme, c'est justement la capacité à maîtriser ce dont on n'aime pas beaucoup parler en France mais qui est fondamental : la finance. »

Pierre Manière

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