Coup de tonnerre dans les droits sportifs à la TV en Europe

Un arrêt de la Cour européenne de justice remet en cause le mode de commercialisation des compétitions et les exclusivités par pays.
Infographie La Tribune

Petit séisme dans le monde du sport. La Cour de justice européenne a rendu un arrêt qui pourrait bouleverser la commercialisation des droits de retransmission des compétitions sportives à la télévision. "C'est peut-être l'arrêt Bosman de l'audiovisuel", indique Philippe Diallo, le directeur général de l'Union des clubs professionnels de football (UCPF), en référence à l'arrêt de 1995 qui a liberalisé en Europe la circulation des joueurs. "Cet arrêt efface la distinction entre la vente des droits domestiques et des droits nationaux". A l'origine de la décision de la Cour, des litiges, qui ont opposé des cafés et des restaurants anglais ayant projeté des matchs de Premier League, en passant non pas par BSkyB, le diffuseur officiel, mais par des décodeurs étrangers. Ainsi, la propriétaire d'un pub a été condamnée à 8.000 livres d'amende pour avoir utilisé une carte de décodeur grec, qui coûte un dixième du prix d'un abonnement BSkyB

Saisie par la High Court anglaise, la Cour de justice a jugé qu'interdire l'utilisation de décodeurs étrangers pour regarder des compétitions sportives dans un pays était contraire au droit européen, fondé sur la libre circulation des services. L'arrêt remet en cause les clauses d'exclusivités territoriales, qui justifient le modèle économique des ligues et des chaînes payantes. Ainsi, la Ligue de football professionnel vend très cher la diffusion du championnat de Ligue 1 (668 millions d'euros par an) en France, et beaucoup moins cher - 17 millions jusqu'ici - à l'étranger. Mais Canal Plus, qui débourse 450 millions d'euros par an pour diffuser la Ligue 1 en France, a la garantie que les chaînes étrangères ne peuvent lui faire concurrence sur le territoire. Même modèle pour la Premier League, qui tire 2 milliards de livres de recettes des matchs vendus au Royaume-Uni sur 2010-2013, essentiellement grâce à Sky, et 1,4 milliard des droits internationaux (dont 350 millions de livres des pays européens).

Effets non mesurables

C'est cet équilibre qui est menacé par l'arrêt de la Cour. Difficile à court terme d'en mesurer son effet. "Il est urgent d'attendre, pour voir si cet arrêt va avoir une portée hypothéthique ou va bouleverser les modèles", indique Laurent-Eric Le Lay, à la tête d'Eurosport. Dans la pratique, des particuliers français sont déjà abonnés à des services étrangers comme Sky.

La donne pourrait changer lors des prochains appels d'offres. Les diffuseurs nationaux, faisant valoir que les droits vendus ne sont plus si exclusifs, pourraient être tentés de faire baisser les factures. En contrepartie, les titulaires de droits pourraient envisager de vendre les droits à un seul acheteur pour toute l'Europe. "Il y aura peut-être des appels d'offres pan-européens, notamment pour la Champions League", imagine Philippe Diallo. L'arrivée de la télévision connectée, qui facilite l'entrée de nouveaux acteurs sur le marché de la TV, pourrait accélérer ces bouleversements. En revanche, les industries culturelles ne seraient pas touchées. "Elles sont protégées par le droit d'auteur. Ce qui n'est pas le cas du sport comme le précise l'arrêt", précise l'avocat Joseph Vogel.

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Commentaires 2
à écrit le 05/10/2011 à 14:10
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Encore de beaux jours pour le foot-fric....pour ceux là pas de crise apparemment.... Panem et circenses

le 05/10/2011 à 14:49
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pas si sûr que ça, en général la vente à la découpe rapporte plus que la vente en gros. Avec cet arrêt, la vente à la découpe par pays de diffusion ne sera plus possible. Une chaine ne mettre pas la même somme pour acheter un droit au niveau européen...

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