Ces 12.000 particuliers qui s'improvisent banquiers solidaires

Par Julien Bonnet  |   |  489  mots
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Babyloan.org, premier site de micro-prêts solidaire européen, permet à des particuliers de financer des projets à travers le monde mais aussi en France. Retour sur une "success story" à l'occasion de ses trois ans de présence sur le web.

Trois ans déjà que le site Babyloan.org développe le microcrédit entre particuliers par Internet. "C'est aujourd'hui le premier site européen de microprêt solidaire et le deuxième mondial. En cumulé, ce ne sont pas moins de deux millions d'euros qui ont permis de financer plus de 6.600 micro-entrepreneurs", se félicite son cofondateur Arnaud Poissonnier. Sur le modèle de l'américain Kiva crée en 2005, Babyloan permet aux particuliers de prêter au minimum 20 euros à des personnes en situation d'exclusion bancaire qui souhaitent démarrer ou développer une activité.

Grâce à une fiche détaillée, les utilisateurs du site sélectionnent le projet de leur choix situé dans dix pays. Au Bénin, par exemple, Josiane a besoin de 380 euros pour acheter un stock de charbon ou au Vietnam, Chinh espère 280 euros pour acheter un fer à friser et des soins pour les cheveux afin d'équiper son salon de coiffure. Les institutions de microfinance locales, sélectionnées par Babyloan, assurent le suivi des dossiers.

Les Babyloaniens peuvent aussi, depuis l'année dernière, soutenir des micro-entrepreneurs en France grâce à un partenariat avec l'Adie (Association pour le droit à l'initative économique), principale association de microcrédit du pays. Déjà 10 % de l'ensemble des prêts de Babyloan financent des projets dans l'Hexagone. "Il suffit à l'Adie de payer les frais minimes d'accès à la plate-forme Babyloan, explique Arnaud Poissonnier, le prêt ne lui coûte rien car l'internaute l'accorde gratuitement".

Réinvestissement de 70 %

Malgré un chiffre d'affaires net multiplié par quatre entre 2009 et 2010, le site n'a réduit sa perte annuelle que d'environ 10 % à 455.075 euros. "Nous sommes actuellement en mode start-up, indique Arnaud Poissonnier, le logiciel qui permet le fonctionnement de Babyloan a été particulièrement coûteux à développer car il réunit les fonctionnalités propres aux sites bancaires, communautaires et marchands. Si tout va bien, nous serons à l'équilibre d'ici à la fin 2013".

Avec un encours global de 120 millions de dollars, les plates-formes « peer to peer » représentent un peu moins de 0,20 % de la production mondiale de micro-crédit. Mais ce canal s'est considérablement développé. "Sa croissance, comprise entre 100 et 200 % par an, lui permettra dans 10 ans d'atteindre un poids significatif, près d'un dixième de la production mondiale", estime Arnaud Poissonnier. Pour Babyloan, près de 12.000 personnes ont déjà été séduites par l'idée de "donner plusieurs vies à leur argent". Une fois leurs prêts remboursés, les Babyloaniens peuvent réallouer leurs fonds à un nouveau projet. "Grâce à un taux de réinvestissement de 70 %, nous bénéficions d'une croissance exponentielle des prêts accordés, explique le fondateur de Babyloan. Seulement 7 % choisissent de sortir leur argent". Près du quart des utilisateurs laissent donc dormir les sommes dans leurs tirelires. Babyloan étudie avec la Banque de France la possibilité d'être mandaté pour placer les "billes inactives" de ceux qui le souhaitent.