La hausse du taux d'épargne en France doit-elle inquiéter ?

Par source Reuters  |   |  687  mots
Les résultats détaillés des comptes nationaux publiés vendredi par l'Insee montrent que les prestations sociales versées en espèces ont augmenté de 3% au deuxième trimestre, conséquences des aides décidées par le gouvernement pour venir en aide aux ménages défavorisés.

Le taux d'épargne des Français est monté en flèche au deuxième trimestre mais les économistes sont partagés quant aux conséquences éventuelles sur la consommation et la croissance.
 

Les résultats détaillés des comptes nationaux publiés vendredi par l'Insee montrent que les prestations sociales versées en espèces ont augmenté de 3% au deuxième trimestre, conséquences des aides décidées par le gouvernement pour venir en aide aux ménages défavorisés.
 

Couplée à la baisse de l'inflation (passée en mai en territoire négatif), la hausse des transferts sociaux a compensé l'effet négatif de la montée du chômage et permis au revenu disponible des ménages de croître de 1,1% sur ces trois mois.
 

Or la consommation n'a progressé que de 0,2% sur la période et le surcroît de revenu s'est transformé en épargne. Selon l'Insee, le taux d'épargne a grimpé à 16,7%, contre 16,0% au premier trimestre et une moyenne de 15,3% sur l'ensemble de 2008. Il faut remonter à 2002, quand il était à 16,9%, pour retrouver de tels niveaux.
 

"Ce phénomène est une vraie menace pour les mois qui viennent", avertit Alexander Law, économiste au cabinet de recherche Xerfi.
"Avec l'inflation qui va repartir à la hausse et les destructions d'emplois qui vont se poursuivre, il n'y a pas lieu de penser que la consommation puisse résister indéfiniment", prévient-il.
 

La nette baisse des achats de produits manufacturés en juillet (-1,2%) et en août (-1,0%) constitue selon lui une première alerte, même si les dépenses en produits durables ne représentent que le quart de la consommation totale des ménages.
 

"Il est possible que ce soit le premier signal qu'il y a une épargne de précaution qui est en train de se constituer suite au choc de la crise", convient Karine Berger, directrice des études chez l'assureur-crédit Euler Hermes Sfac.
 

"Il faut être très prudent parce qu'on a des séries heurtées et à ce stade je suis plus préoccupée par les chiffres de baisse de la consommation en juillet-août, qui sont très nets, que par la montée trimestrielle du taux d'épargne", nuance-t-elle.
"Mais s'il devait rester au-delà, cela signifierait une chute de la consommation beaucoup plus forte en 2010".
 

MATELAS DE SÉCURITÉ
 

Les économistes d'Exane BNP Paribas estiment au contraire que la hausse du taux d'épargne permet de lisser sur le moyen terme les effets de la hausse du chômage sur la consommation.
"En période de chômage c'est plutôt une bonne chose que les ménages aient un certain matelas d'épargne pour continuer à soutenir la consommation", expliquent-ils en relativisant en outre la baisse des dépenses en juillet-août. "C'est vrai que la consommation a reculé cet été mais les chiffres de l'Insee ont été brouillés par des effets statistiques sur les immatriculations de voitures et sur les soldes et sont donc à analyser avec prudence", font-ils valoir.
 

Pour les économistes d'Exane, les aides aux ménages modestes leur ont permis d'épargner davantage sans couper trop dans leur budget. "Cela ne se transforme pas tout de suite en dépenses mais ça permet de lisser sur le moyen terme les effets de la hausse du chômage sur la consommation."
 

Marc Touati, chez Global Equities, évoque aussi un soutien à moyen terme. "Les ménages se sont constitué un matelas de sécurité pour maintenir un niveau de consommation appréciable pour la fin 2009 et le début 2010", estime-t-il.
 

"L'augmentation du taux d'épargne ne correspond donc pas à un mouvement de panique mais au fameux principe de précaution", ajoute-t-il en y voyant pour preuve l'amélioration du moral des ménages en septembre, également annoncée vendredi par l'Insee.
"Ces évolutions confirment que l'économie française pourra encore compter sur la résistance des dépenses des ménages. Ce sera insuffisant pour retrouver le chemin d'une croissance forte mais cela permettra tout de même d'éviter le retour de la récession", conclut Marc Touati.