Immobilier : les grands syndics seront-ils affectés par la loi Alur ?

L'UFC-Que Choisir et l’association des responsables de copropriété (Arc) craignent que les promesses de la loi Alur en matière d'encadrement des tarifs des syndics restent lettre morte, faute de volonté politique.
Certains grands syndics de copropriété continuent d'appliquer des tarifs abusifs.

Les grands syndics de copropriété continuent de pratiquer des tarifs excessifs, tout en introduisant dans leurs contrats des clauses abusives. Tel est le constat commun de l'UFC-Que Choisir et de l'ARC (responsables de copropriété) qui s'inquiètent de voir les promesses de la loi Alur rester lettre morte, en l'absence de décret d'application. Leur étude 2014 sur les contrats des principaux syndics de copropriété - Foncia, Nexity, Citya, Immo de France, Loiselet & Daigremont - qui représentent 70% du marché, a donné un "résultat aussi désolant, voire plus affligeant" qu'en 2013, selon les deux organisations.

Les grands syndics contournent la loi Alur…

Cet observatoire y épingle notamment une "présentation artificieuse des forfaits", une "prolifération des clauses abusives", des "prix excessifs de prestations particulières", comme l'an dernier. Mais d'autres dérives s'y sont ajoutées : les nouvelles obligations créées par la loi Alur (Accès au logement et urbanisme rénové) adopté au Parlement en mars, visant à renforcer la protection des consommateurs, seraient déjà contournées par les principaux syndics.

"Il y a tout un tas de techniques pour vider de sa substance et de sa pertinence cette loi, qu'on avait tant attendue et espérée", s'est ainsi inquiété Alain Bazot, président de l'UFC-Que Choisir, lors d'une conférence de presse. "Il y a du retard à l'allumage pour sortir les décrets d'application, et enfin mettre fin à cet enfumage qui vient de syndics", a-t-il ajouté.

… et continuent d'appliquer des tarifs abusifs

"Mais il n'y a sans doute pas une volonté de donner pleine force et efficacité à ce qui est dans la loi", de la part du ministère du Logement a estimé M. Bazot. Ainsi, alors que cette loi prévoit la mise en place obligatoire d'un compte bancaire séparé par copropriété, sans frais supplémentaires, afin de rendre leur gestion plus transparente, les syndics, à l'exception de Citya, "continuent d'appliquer un surcoût abusif par rapport au compte unique, allant de 20% à 29%", ont constaté l'UFC et l'Arc.

Et ce surcoût a grimpé par rapport à 2013 pour trois contrats, "Nexity Classique", "Formule 1 par 1" (Foncia) et "Foncia Horizon", expliquent les deux associations. En outre, les finances de 9 copropriétés sur 10 sont toujours gérées par un compte unique, alors même que celui-ci leur est "plus défavorable" que le compte séparé, soulignent l'Arc et l'UFC, craignant que ce passage au compte séparé, possible jusqu'en 2018, ne se traduise en réalité par "un juteux surcoût" appliqué par les syndics.

Des forfaits "tout compris" qui posent problème

Aussi, les syndics continuent à se rémunérer jusqu'à 7,2% (Nexity) ou 7,8% (Loiselet) du montant des "travaux exceptionnels" exécutés dans les copropriétés... ce que la loi Alur interdit. L'observatoire épingle aussi des forfaits "tout compris", incluant des pseudos prestations particulières - dont le contenu et les tarifs doivent être fixés par décret -, qui sont en réalité des services obligatoires. Ainsi ces forfaits "masquent une kyrielle de prestations particulières connexes payantes".

Il en a dénombré 11 pour le "forfait" de Nexity et 18 pour le contrat "Horizon Plus" de Foncia, premier gestionnaire de biens en France. Et les clauses abusives ou illicites sont au nombre de 17 en moyenne sur les contrats étudiés, avec un record de 25 pour le contrat "Formule 1 par 1" de Foncia (frais facturés pour la location d'une salle pour l'assemblée générale, la délivrance d'informations pour le diagnostic de performance énergétique...).

Beaucoup moins de problèmes avec les petits syndics

Toutes ces irrégularités sont susceptibles d'être sanctionnées par la DGCCRF, le service de répression des fraudes, qui a déjà lancé 29 procédures contre des professionnels, selon l'Arc et l'UFC. "Nous avons beaucoup moins de problèmes avec les petits syndics: ils sont beaucoup plus ouverts à la discussion, n'imposent pas leurs contrats, ils acceptent des évolutions et la transparence", a noté Emile Hagège, juriste de l'Arc. Et d'ajouter :  "les gros syndics, qui ont les reins les plus solides et dégagent des profits qu'on peut constater, sont ceux qui se plaignent le plus: c'est inadmissible !".

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