Immobilier : l'Etat doit-il favoriser l'ancien plutôt que le neuf ?

En France, 2,6 millions de logements sont vacants. Alors que les aides pour l'immobilier sont massivement dédiées au logement neuf, ne faudrait-il pas plutôt les réorienter vers la mobilisation et la rénovation du parc ancien, de fait bien plus conséquent ?
Mathias Thépot
Les politiques au pouvoir s'accommodent toujours parfaitement du discours des promoteurs immobiliers. Le secteur du bâtiment emploie en effet 1,4 million de salariés dans 13.000 entreprises, soit 16 % des entreprises du secteur marchand non agricole.

Si l'on exclut les prestations sociales dédiées, le budget de l'Etat alloué au logement est majoritairement dirigé vers le logement neuf, que ce soit en matière d'avantages fiscaux, de subventions d'investissements ou d'avantages de taux, trois postes qui pesaient en 2013 pour 20,6 milliards d'euros dans le budget de l'Etat, selon les Comptes du Logement, soit plus de la moitié de l'ensemble des aides au logement (40,8 milliards d'euros).

Mais l'Etat a-t-il réellement davantage intérêt à soutenir la construction et l'acquisition de logements neufs, plutôt que la mobilisation et la rénovation du parc ancien ? Certains, comme les promoteurs immobiliers, répondront sans surprise par l'affirmative. « Il y a un déséquilibre criant entre l'offre et la demande de logements. Le seul moyen d'y remédier, c'est de construire des logements neufs », estime François Payelle, président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI). La démographie croissante et l'inquiétante crise de la construction en France depuis 2011 pousse ainsi les pouvoirs publiques à maintenir leur soutien majoritaire au neuf.

Un non-sens quantitatif ?

Pourtant la question des soutiens publics à l'immobilier ancien mérite d'être posée à un moment où la précarité énergétique concerne 4 millions de ménages et le mal-logement 3,6 millions. Mettre le paquet sur le parc ancien, qui compte 34 millions de logements dont 2,6 millions sont vacants (sic), n'aurait rien d'illogique alors que « seulement » 300.000 à 400.000 logements sont construits chaque année.

« Le parc de logements existant représentera encore 90 % du parc dans 10 ans, et 80 % dans 20 ans ! », faisait remarquer Eric Alauzet, député EELV, lors des matinales de la construction et du Logement. Tout ceci bien évidement sur fond de transition énergétique. « La mobilisation du foncier bâti existant et la rénovation des bâtiments sont deux éléments déterminants de la politique de transition énergétique », rappelle Eric Alauzet. « Travailler sur l'ancien est un enjeu économique, social, environnemental et quantitatif ! », ajoute-t-il.

Les politiques dirigeants préfèrent le neuf

Eric Alauzet regrette ainsi que les promoteurs immobiliers « influencent et orientent les décisions politiques » vers le neuf. Il faut cependant être clair : les politiques au pouvoir s'accommodent toujours parfaitement du discours des promoteurs immobiliers. Le secteur du bâtiment emploie en effet 1,4 million de salariés dans 13.000 entreprises, soit 16 % des entreprises du secteur marchand non agricole.

Relancer le secteur de la construction, c'est souvent relancer l'emploi à court terme. D'où l'adage bien connu "quand le bâtiment va, tout va".  Les lobbys du bâtiment disent d'ailleurs souvent que construire un logement, c'est créer deux emplois. Ces arguments qui passent bien auprès des dirigeants politiques en recherche de chiffres à présenter à l'opinion publique.

Du reste, « il est plus complexe, moins concret en terme de résultats et globalement plus coûteux pour l'Etat de soutenir l'ancien que d'aider à la construction de nouveaux logements », explique Vincent Renard, économiste spécialiste du logement.

Mobiliser le parc vacant ?

Faudrait-il alors s'atteler à mobiliser le parc de logements vacants (2,6 millions d'unités selon l'Insee) ? Un raisonnement qui consisterait à dire que tout ces logements sont mobilisables serait trop simpliste. Car s'il est incontestable que des logements sont vacants dans des zones urbaines, d'autres le sont aussi dans des zones en déshérence, où personne ne veut habiter. « Nous sommes dans une phase d'urbanisation continue, et il se rajoute aujourd'hui à cela un phénomène de métropolisation dont la tendance semble aller vers des métropoles régionales. Il faut donc augmenter l'offre là où il y a des tensions », estime François Payelle.

Du reste, si l'on se concentre sur la vacance en zones urbaines, force est de constater que les pouvoirs publics, par le biais de politiques de taxation des propriétaires de logements vacants, n'ont jamais réellement trouvé la solution. Pour Vincent Renard, il faudrait que l'Etat tape encore plus fort. « Il faut que l'Etat taxe les logements vacants à leur valeur vénale », estime-t-il. De quoi provoquer l'ire des propriétaires bailleurs dans les centres urbains.

Mathias Thépot

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Commentaires 28
à écrit le 23/06/2015 à 0:50
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Les lois actuelles protègent exagérément les droits des locataires aux détriments des bailleurs:un locataire ne voulant pas payer,est inexpulsable avant des mois de procédures où les frais d'huissier s'ajoutent...quand le jugement ne tombe pas,en plu...

à écrit le 17/06/2015 à 10:46
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Un logement neuf crée deux emplois polonais.

à écrit le 16/06/2015 à 23:49
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Le neuf a un prix délirant. seuls les investisseurs et les offices de l'habitat achetent. les autres ne peuvent pas car ils paient plein pot.

le 23/06/2015 à 0:56
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Tout dépend de la zone tendue ou pas. Se plaindre de la moindre productivité des travailleurs forcés de se loger loin de leur travail...Mais qu'attendent les pouvoirs publics pour relancer l'aménagement du territoire,la délocalisation d'administrati...

à écrit le 16/06/2015 à 16:08
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Il y a deux cas ou l'état est dans son rôle de subventionner l'immobilier, 1 aider les couples pauvres si possible avec enfant à leur première acquisition immobilière (neuf, ancien, location vente avec éventuellement quelques restrictions pour des li...

le 16/06/2015 à 16:26
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Si vous êtiez banquier vous prêteriez pendant 20 ans à 2% cela ne paie même pas les employés , donc comprendre la situation actuelle n'est pas celle que l'on nous présente.

le 23/06/2015 à 1:06
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Le taux de prêt de la BCE est actuellement de...0,05%. Donc,à court terme écart encore avantageux,d'autant plus que les prêts immo fidélisent,en général ,la clientèle. ,Mais à long terme,si retour de l'inflation,si remontée du taux de financement de...

à écrit le 16/06/2015 à 15:11
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Le secteur du bâtiment emploi 1,4 million de salariés; Combien sous la directive Bolkenstein ?

le 16/06/2015 à 15:51
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@Iciailleurs "Le secteur du bâtiment emploi 1,4 million de salariés; Combien sous la directive Bolkenstein ?" Vous mettez le doigt là où ça fait mal. Sur tous les chantiers où j'ai pu passer dernièrement, ça ne parlait jamais français. Ce n'est p...

le 23/06/2015 à 1:12
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Et dans l'agriculture ,l'industrie...aussi.Les instances européennes ont sciemment choisi le moins-disant social au détriment des emplois,de la protection sociale et de la santé économique des pays d'Europe de l'Ouest.

à écrit le 16/06/2015 à 14:44
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C'est tellement mieux de faire grimper les prix de l'immobilier cela arrangent pas mal de monde et fait grimper les loyers ,avec à la clé la déduction d'impôts .ELLE EST PAS BELLE LA VIE .

le 17/06/2015 à 0:19
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Plus les prix sont élevés, plus l'Etat et les communes taxent sans changer le taux.

à écrit le 16/06/2015 à 13:13
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Les dispositifs scellier duflot et autres pinel ont pour but de soutenir la construction et de limiter les loyers. Le problème est que les logements anciens ne peuvent plus rivaliser car dans pas mal de cas les charges sont élevées et le loyer charg...

à écrit le 16/06/2015 à 11:55
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Faux l'ancien est pleinement subventionner dans la rénovation et l'isolation !

à écrit le 16/06/2015 à 11:42
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Le neuf : favoriser la rente foncière. L'ancien : favoriser les conditions d'usage. À vous de choisir, mais sans clientélisme!

à écrit le 16/06/2015 à 8:42
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votre article est revelateur de la france, atteinte du syndrome ' taxe' les taxes ne resolvent pas tous les pbs, bien au contraire !

à écrit le 16/06/2015 à 8:29
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L'état doit surtout se retirer et baisser les taxes. Problème: que faire des fonctionnaires? Ils sont là pour taxer et appliquer les réglementations. Pourquoi ne pas les laisser ne rien faire du tout? Ce serait déjà une avancée positive pour la socié...

à écrit le 16/06/2015 à 8:19
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La question serait plutot pourquoi l etat doit subventionner le logement ? Ca ne sert qu a faire monter les prix (c est sur que c est bien pour les boomers qui votent beaucoup) mais c est du gaspillage d argent. Ce qu il faudrait c est investir dans...

le 16/06/2015 à 13:41
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@cd : et bien je vais vous réexpédier. .quand l état donne 1 euro il perçoit 1.50 e avec comme meilleur exemple le duflot 20 % de TVA perçue pour 18% d avantage fiscal mais sans parler de la fiscalité sur loyer ( ir csg taxe foncière. ..) . L état (...

le 16/06/2015 à 14:39
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Votre ex est faux. que l etat subventionne l immobilier ou un autre sectuer, il percevra autant de TVA. Si on pousse votre raisonnement au bout, letat devrait subventionner l achat de voiture car non seulement il recupere la TVA sur les voitures mais...

le 16/06/2015 à 15:46
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Cher malcomprenant, En plus de ce qu'a pointé le damoiseau qui a commenté au dessus de moi, j'ajoute qu'une fois de plus, vous employez votre méthode fallacieuse qui consiste à considérer que 100% des recettes fiscales de l'Etat dans l'immo sont dûe...

le 16/06/2015 à 16:39
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@@malcomprenants toujours invisibles : oui les subventions ont participé à l augmentation des prix mais de manière très relative ..L an dernier il s est construit 330 000 logements neufs dont 30 000 "duflot" au mieux , on peut donc dire que l effet ...

le 17/06/2015 à 16:29
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@malcomprenant Merci de représenter de manière aussi caricaturale cette manière de voir les choses. A quel moment est-ce que dans notre chez pays on s'est mis à construire des logements exclusivement pour les "zinvestisseurs" et non pour tous ces...

à écrit le 16/06/2015 à 7:51
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Concentrer tous les efforts vers la baisse des prix, notamment par l'arret immediat de tout aide de tout type: allocations, subventions.... Aussi taxer au maximum en pourcentage de la valeur reele du bien y compris la residence principale sera souhai...

le 16/06/2015 à 13:19
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@tt "taxer au maximum en pourcentage de la valeur reele du bien y compris la residence principale sera souhaitable" Même pas besoin de chercher à taxer "au maximum", il suffit d'adopter le même comportement que certains pays comme les USA : suppr...

le 16/06/2015 à 13:26
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Imaginez : si vous supprimez les aides, vous mettez des milliers de gens à la rue, les investisseurs (même les plus modestes) sont obligés de vendre, les prix baissent, mais pas suffisamment pour que ceux qui n'ont plus de logements achètent, il y a ...

le 16/06/2015 à 14:41
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Votre idee revient a taxer les vieux (proprietaires voire multi proprios) au benefice des jeunes (qui paieront moins cher). Suicidaire electoralement meme si surement une bonne idee economiquement (et socialement). ca ne se fera donc jamais

le 17/06/2015 à 9:38
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Et pourquoi devoir se déplacer pour aller travailler ? Beaucoup d empois du secteur tertiaire peuvent être completement a distance Raz le bol des chef aillons incompétents qui ont besoin de leurs équipes competentes pour se cacher Et pourquoi cet...

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