Pourquoi la loi Élan manque de souffle

Par César Armand  |   |  559  mots
L'avant-projet de loi Évolution du logement et aménagement numérique (Élan), censé favoriser un « choc d'offre » de logements, peine à satisfaire les acteurs concernés, professionnels comme collectivités. Le texte est en effet loin de faire l'unanimité, malgré un effort pour simplifier les normes et pour libérer du foncier, principale cause de la hausse des prix dans le neuf.

Parmi les aspirations du gouvernement : « construire plus, mieux et moins cher, répondre aux besoins de chacun et améliorer le cadre de vie », pour reprendre les mots de Jacques Mézard, le ministre de la Cohésion des territoires, le 8 février en clôture de la conférence de consensus sur l'avant-projet de loi. Sauf qu'au regard du texte dévoilé le 12 décembre dernier, le sujet de l'explosion annoncée de la population des seniors n'est abordé qu'en une seule et unique phrase lapidaire :

« Le vieillissement de la population pose de nouvelles questions en termes d'innovation sociale et de solidarité intergénérationnelle dans l'habitat. »

Un peu court, alors que c'est une question majeure pour anticiper les besoins et l'évolution des usages du logement.

Au-delà de cette classe d'âge, « les besoins démographiques sont oubliés », selon Alain Dinin, PDG de Nexity, leader de la promotion immobilière en France : « Cette loi ne pose pas la question de la démographie. Où sont les 6 millions de ménages à venir ? Les familles monoparentales ? Les personnes âgées ? »

Un bail mobilité qui fait débat

En revanche, sur l'aménagement numérique, le ministère de la Cohésion des territoires semble avoir pris la mesure de la révolution en cours :

« La généralisation de la digitalisation du secteur du logement sera promue. Le but est d'accélérer l'insertion du logement connecté et, plus généralement, du bâtiment intelligent dans le cadre d'une ville connectée, sobre en carbone et désirable, où la digitalisation articulera les services de mobilité et les réseaux au service de l'habitant », peut-on lire sur le site de l'institution.

Il serait temps en effet, à l'heure des réseaux sociaux, que le citoyen lambda puisse obtenir, en ligne et dans les délais impartis, toutes les pièces administratives exigées lors d'une location, d'un achat ou d'une vente : documents d'urbanisme, autorisations de la mairie concernée, etc.

« La conférence de consensus n'avait de consensuel que le nom », concédait un député de la majorité au lendemain de la conclusion de cette dernière.

Et pour cause : le bail mobilité de un à dix mois non renouvelable fait toujours débat. S'il donne les clés d'un logement sur une courte durée - pour un stagiaire en fin d'études, par exemple -, il risque de précariser les locataires. « Cette offre supplémentaire libérera les contraintes d'accès, mais elle sera accompagnée de garde-fous », assure ce même parlementaire.

Les intercommunalités, aujourd'hui chefs de file des politiques locales de l'habitat (PLH), se sont, elles, inquiétées des hésitations sur les objectifs SRU (loi Solidarité et renouvellement urbains), dont les communes conserveraient l'obligation de production de logements sociaux :

« Arrêtons les allers-retours centralisation/décentralisation. C'est une mécanique sensible. Qu'on laisse la main aux territoires, auquel cas on risque d'avoir une année de perdue. Ce stop-and-go perturbe le choix des investisseurs. Au lieu de créer des chocs, on met des chocs partout », prévient Nicolas Portier, délégué général de l'Association des communautés de France (AdCF).

En attendant la présentation du texte en Conseil des ministres le 28 mars puis son examen au Parlement, le débat risque donc d'être animé.