La BCE appelle à des réformes structurelles pour libérer la croissance

Par Sophie Rolland  |   |  717  mots
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La Banque centrale européenne n'a manifestement pas l'intention de mettre en œuvre de nouvelles mesures de soutien dans l'immédiat.

Il est urgent d'attendre... Voilà en somme le message délivré par la Banque centrale européenne (BCE) ce jeudi. L'institut monétaire a laissé son principal taux directeur inchangé, à 1%, comme cela était attendu. Il n'a pas non plus annoncé de nouvelle mesure de stimulation « non conventionnelle », en dépit de la très nette dégradation de plusieurs indicateurs de conjoncture et des difficultés du secteur bancaire en Espagne.

Même diagnostic économique qu'en avril
Le diagnostic de la BCE sur la situation économique reste inchangé. L'activité s'est « stabilisée à un bas niveau » et « les perspectives économiques restent soumises à des risques orientés à la baisse ». Mario Draghi a reconnu que l'incertitude avait augmenté mais il juge qu'il aura une vision plus claire de l'orientation de la conjoncture en juin.

La BCE ne montre aucune intention d'adopter des mesures supplémentaires.
La BCE estime par ailleurs que les indicateurs de tension sur les marchés sont plus favorables et souligne le redémarrage de la croissance du crédit. Une façon d'obliger certains opérateurs de marché à revoir leurs attentes. Avant la réunion de la BCE, certains anticipaient une réactivation des mesures non conventionnelles. « Il y a très peu de chances que la BCE intervienne à nouveau avant d'avoir les résultats des prochains tests de résistance bancaires », estime Laurence Boone, économiste chez Bank of America Merrill Lynch.
Aucune activation de l'ESM, ni du FESF n'est à l'ordre du jour. « Le programme de rachat d'obligations de la BCE n'est ni éternel, ni infini », a même déclaré Mario Draghi, qui a également - et c'est nouveau - pointé les faiblesses du FESF.

Rendez vous en juin pour la décision sur la poursuite des LTRO
« Pour ce qui concerne les LTRO [opérations de refinancement à long terme] à allocation intégrale, ce sera en juin que nous communiquerons », a-t-il déclaré. En décembre dernier la BCE avait indiqué qu'elle assurerait aux banques de la zone euro un accès illimité à ses financements au moins jusqu'au 10 juillet. « La BCE explique qu'elle a fait sa part du travail : les LTRO ont permis de gagner du temps et d'éviter un credit crunch. Maintenant, elle appelle les pays de la zone euro à mettre en ?uvre les réformes nécessaires pour soutenir la croissance », commente Pierre Barral, gérant de portefeuille chez Convictions AM.

La BCE encourage les gouvernements à poursuivre les réformes
Pour la première fois, le Président de la BCE a intégré dans son communiqué un paragraphe sur les « réformes structurelles » que devraient mettre en ?uvre les pays de la zone. « La croissance et le potentiel de croissance de la zone euro doivent être amplifiés par des réformes structurelles décisives », a-t-il expliqué. L'occasion pour lui d'expliquer sa vision du « pacte de croissance ». Pour Mario Draghi, la croissance doit être une priorité de la zone euro mais pas au détriment de la discipline budgétaire. Selon lui, il n'y a « pas la moindre contradiction » à poursuivre un pacte de croissance tout en continuant sur la voie de l'assainissement des finances publiques. Un discours en ligne avec celui du patron de la Bundesbank. Il y a peu, Jens Weidmann avait déclaré à l'hebdomadaire Die Zeit qu' « un assainissement budgétaire pertinent et des réformes structurelles résolues [constituaient] la meilleure politique de croissance parce que de cette manière on rétablit la confiance et la performance économique s'en trouve renforcée ».

Les conseils de « Super Mario » aux gouvernements
Parmi les réformes préconisées, Mario Draghi recommande de « libérer l'énergie du secteur privé », et appelle à davantage de « flexibilité, de mobilité et d'équité » sur le marché du travail. Pour lui, il convient de réduire les finances publiques de fonctionnement, sans entamer les dépenses d'investissement, qui peuvent être soutenu en redéployant les fonds européens. Enfin, l'Europe doit retrouver un cap. « Pour le président de la BCE, si on veut avancer vers plus de fédéralisme budgétaire, il convient d'appliquer pleinement le pacte de stabilité renforcé - afin qu'une telle union ne soit pas une « union de transferts » - et de préparer des transferts de souveraineté budgétaire », décryptent les économistes d'Aurel BGC dans une note.