Manifestations des enseignants-chercheurs et des étudiants

Par latribune.fr  |   |  840  mots
Bâtiment de l'université de Strasbourg.
Etudiants et enseignants-chercheurs ont manifesté ce jeudi dans toute la France pour renouveler leur opposition à la réforme du statut d'enseignant-chercheurs. A Strasbourg, l'inauguration de la nouvelle université, la plus grande de France, par la ministre Valérie Pécresse a été chahutée.

Des milliers de manifestants, étudiants et enseignants-chercheurs, ont défilé ce jeudi à Paris depuis Jussieu, en se dirigeant vers le ministère de l'Enseignement supérieur, dans le cadre de la journée d'actions des universités.

"Pour la recherche et l'enseignement supérieur: des postes statutaires, des crédits de base et la liberté scientifique", était-il écrit sur la banderole de tête de la manifestation. "Pécresse démission", "De l'argent pour étudier, pas pour les banquiers", "Pas de facs d'élite, pas de facs poubelles, à bas les facs concurrentielles", scandaient les manifestants, venus de nombreuses universités parisiennes et franciliennes et de plusieurs IUFM et IUT.

A Strasbourg, l'inauguration de la nouvelle université par la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, a été chahutée tandis que des incidents éclataient entre la police et des manifestants. "Elle est unique, elle est en grève", proclamait une banderole déployée pour railler le slogan "Elle est unique" de cette université de 42.000 étudiants née le 1er janvier de la fusion des universités de sciences, de droit et de lettres.

La journée d'actions de ce jeudi dans toute la France a été lancée par la coordination nationale des universités qui rassemble entre autres le Snesup, premier syndicat du supérieur, et les associations Sauvons l'université et Sauvons la recherche. La coordination a voté lundi la grève "illimitée" pour obtenir le retrait de deux projets gouvernementaux contestés, la réforme du statut des enseignants-chercheurs et celle de la formation des enseignants.

Cette dernière prévoit que la formation des enseignants soit dorénavant assurée par le biais de masters au sein des universités et non plus par les actuels IUFM (Instituts universitaires de formation des maîtres). Jeudi soir, la Fédération des maires des villes moyennes (FMVM), qui craint que la réforme ne concentre la formation des enseignants dans les grands centres universitaires, a annoncé avoir obtenu de Valérie Pécresse des garanties sur le maintien d'antennes locales des IUFM, dans le cadre de leur réforme. Selon la fédération, la ministre a affirmé que "les antennes de proximité des IUFM continueront d'accueillir des étudiants, parce que ceux-ci ont besoin d'une formation effectuée au plus près des territoires et au plus près des classes".

 

Les motifs du mécontentement du monde universitaire :

La réforme du statut des enseignants-chercheurs : la modification du décret de 1984 sur le statut des enseignants-chercheurs concrétise le transfert de la gestion des carrières des personnels aux universités, qui découle de la loi sur l'autonomie. Elle leur confie la possibilité de "moduler" le service des enseignants-chercheurs (répartition entre enseignement, recherche, tâches administratives ou pédagogiques). Elle prévoit une évaluation renforcée, portant sur l'ensemble de leurs activités, tous les quatre ans, par le Conseil national des universités (CNU, composé en totalité de leurs pairs). La question est de savoir si son avis sera suivi par le président d'université. Les décisions des présidents d'université doivent être motivées et publiques et l'enseignant-chercheur peut solliciter un réexamen, souligne le ministère. Les enseignants-chercheurs craignent l'arbitraire des présidents, une hausse des heures d'enseignement et une atteinte à leur indépendance. Dans sa version du décret transmis en Conseil d'Etat, Valérie Pécresse a apporté deux modifications : un professeur bien évalué ne pourra pas se voir imposer plus d'heures de cours que le service de référence ; par ailleurs, plus de poids a été donné au CNU dans les promotions. Des modifications qui n'ont pas pour autant convaincu ses opposants.

La réforme de la formation des enseignants : à partir de 2010 tous les enseignants du primaire et secondaire seront recrutés au niveau "master 2" (bac +5). La formation est donc confiée aux universités. Dans ce cadre, l'année de stage en classe effectuée actuellement en 2e année d'IUFM (Institut de formation des maîtres) sera supprimée. Selon les étudiants et les syndicats enseignants, les stages d'observation en master 1 ou 2 ou celui (3 mois) de responsabilité en master 2 proposés à la place ne remplaceront pas cette année professionnelle. En outre, pour eux, la réforme vise à économiser en 2010 des milliers de postes d'enseignants stagiaires qui aujourd'hui sont rémunérés. Par ailleurs, les présidents d'université, chargés de proposer au ministère de nouvelles maquettes de "master d'enseignement" d'ici le 15 février, critiquent la précipitation dans laquelle s'est faite la réforme. Nombre d'universités ne rendront pas les maquettes à temps et entendent en proposer en 2010 également.

Les suppressions de postes : le supérieur bénéficie en 2009 de 1,8 milliard d'euros supplémentaires. Syndicats et étudiants dénoncent un budget en "trompe l'oeil" (nombreux dispositifs fiscaux) et déplorent la suppression de 900 postes (aucun enseignant-chercheur n'est concerné, affirme le ministère) alors que les universités sont amenées à se réformer.