Levée de boucliers contre les évaluations en primaire

Par Clarisse Jay  |   |  670  mots
Les évaluations en classe de CM2 se déroulent cette semaine.
Les évaluations en CM2 se déroulent cette semaine. Les syndicats sont vent debout contre ces tests initiés par Xavier Darcos en 2009.

Elles ont été lancées il y a seulement 2 ans mais elles sont déjà un "marronnier". Cette semaine, jusqu'au vendredi 21 janvier, les 800.000 élèves de CM2 sont soumis aux évaluations nationales lancées par Xavier Darcos en 2009. Du 16 au 20 mai, ce sera au tour de leurs cadets de CE1.

Ces évaluations ne cessent depuis deux ans d'être vilipendées par les syndicats d'enseignants et les fédérations de parents d'élèves (FCPE). Depuis la semaine dernière, les dénonciations pleuvent. La majorité des syndicats persistent à en réclamer, "comme en 2009", le retrait. "Il est grand temps de mettre un terme à ce dispositif devenu désormais caduque, sauf à considérer que le bachotage tient lieu de méthode pédagogique", insiste ainsi le SE-Unsa. La FCPE en réclame, elle, le  "blocage" et invite les parents d'élèves à "manifester par courrier leur refus de la transmission des résultats de leur enfant".

Depuis 2009, les récriminations des enseignants, relayées involontairement par quelques "couacs" du dispositif, ont certes conduits à des ajustements. "Nous avons fait évoluer la codification", avance-t-on au ministère de l'Education nationale. De fait, d'un système binaire (juste/faux) ne permettant pas d'évaluer finement les acquis des élèves, le ministère propose désormais une échelle de quatre niveaux permettant une évaluation plus fine.

Le contenu même des tests, jugé trop difficile, a également été aménagé. Mais pour le reste "on ne touche à rien", insiste-t-on rue de Grenelle. D'où la grogne persistante des enseignants. "Ces évaluations sont utilisées par l'administration pour vérifier que les apprentissages recommandés sont suivis. Mais ces derniers ne sont pas achevés au mois de janvier ! » ironise Thierry Cadart, le secrétaire général du Sgen-CFDT. Le calendrier choisi par l'ancien ministre de l'Education national, en particulier pour les CM2, est l'un des principaux griefs. Mais un test en fin d'année serait assimilé à un examen d'entrée en 6ème ; quant au début d'année, il ne permettrait pas de valider une partie des nouveaux programmes de 2008... D'où la volonté du gouvernement de ne pas bouger sur ce front.
 

Diagnostic

Sur le fond, ce n'est pas le principe des évaluations en primaire qui est remis en cause par les enseignants, mais leurs modalités. "Nous demandons l'abandon du dispositif afin de le remettre à plat. Les évaluations doivent être un outils de progression pour les élèves et les enseignants", explique Sébastien Sihr, le secrétaire général du Snuipp-FSU, citant le système qui avait cours avant 2009. A savoir des évaluations pratiquées en octobre en classes de CE2 et de 6e. "Il s'agissait plus d'évaluations-diagnostics, dont pouvaient se servir les enseignants pour adapter leurs pratiques pédagogiques. Nous voudrions revenir à cette philosophie. Les évaluations actuelles se limitent à un outil purement statistique", estime Sébastien Sihr.

Les syndicats critiquent également la lourdeur du dispositif dont le coût s'élève à 25 millions d'euros. D'aucuns lui préfèrent un système d'échantillonnage. Mais sur ce point, c'est le dialogue de sourds. Le ministre Luc Chatel continue à défendre "des évaluations bilan" et non "de diagnostic". Par ailleurs, la prime annuelle de 400 euros versées aux enseignants des classes de CE1 et de CM2 est condamnée, en ce qu'elle "crée des distorsions entre collègues" par son aspect individuel.

Enfin, bien que le gouvernement ait reculé il y a deux ans en renonçant à publier école par école les résultats de ces évaluations, le spectre d'un "classement" plane toujours a fortiori dans un pays avide de palmarès. "Si l'on reste pendant des années avec ce palmarès potentiel à portée de main, je ne donne pas dix ans avant qu'il ne soit publié à la Une d'un hebdomadaire !", anticipe Thierry Cadart. La publication ce week end par plusieurs sites Internet des tests 2011 de CM2, vivement condamnée par Luc Chatel, illustre bien les craintes véhiculées pas de telles évaluations nationales.