Les sénateurs renoncent à légaliser l'euthanasie

Par latribune.fr avec Reuters  |   |  620  mots
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Les sénateurs ont fait marche arrière sur la proposition de loi permettant de légaliser l'euthanasie en adoptant un texte vidé de sa substance. Le Premier ministre n'y était pas favorable.

La légalisation de l'euthanasie continue de diviser. Les sénateurs ont mis un terme ce mardi au débat sur la légalisation de l'euthanasie en France, une semaine après l'avoir eux-mêmes lancé.

La commission des Affaires sociales du Sénat a adopté des amendements qui vident de sa substance la proposition de loi que cette même commission avait adoptée le 18 janvier dernier. Ces amendements suppriment notamment l'article premier du texte, qui autorisait les patients atteints d'une maladie incurable à recourir à "une assistance médicalisée permettant, par un acte délibéré, une mort rapide et sans douleur".

Le revirement des sénateurs fait suite à une vive polémique qui a vu notamment le Premier ministre, François Fillon, dire son opposition au texte. La proposition de loi telle que modifiée par la commission des Affaires sociales sera examinée mardi soir en séance publique de nuit par les sénateurs.

Le texte original, résultat d'une fusion de trois propositions présentées par Alain Fouché (UMP), Jean-Pierre Godefroy (PS) et Guy Fischer (PC), avait été adopté la semaine dernière par 25 voix contre 19. Le débat sur la légalisation de l'euthanasie, récurrent en France depuis des années, se referme donc pour l'instant.

François Fillon y a certainement contribué avec sa tribune publiée lundi par Le Monde. "La question est de savoir si la société est en mesure de légiférer pour s'accorder le droit de donner la mort. J'estime que cette limite ne doit pas être franchie", avait notamment écrit le Premier ministre.

Les socialistes partagés

Le texte avait également été critiqué par le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, et par le président du Sénat, l'UMP Gérard Larcher. Le débat continue de diviser, à droite comme à gauche, avec notamment des opinions divergentes émanant du Parti socialiste.

"Il faut accompagner la fin de vie dans la dignité mais, personnellement, j'ai de grandes réserves sur la législation concernant l'euthanasie", a ainsi déclaré mardi Ségolène Royal sur Europe 1. Un avis que ne partagent ni Martine Aubry, ni François Hollande. Tous deux ont dit que, s'ils avaient été sénateurs, ils auraient voté pour la proposition de loi.

Le gouvernement a fait savoir qu'il ne souhaitait pas légiférer mais défendait, selon les mots de Xavier Bertrand, l'application "pleine et entière" de la loi Leonetti de 2005 qui prévoit le développement des soins palliatifs.

En Europe, l'euthanasie est légale en Belgique, aux Pays-Bas, en Suisse et au Luxembourg. La situation est plus floue en Allemagne, où aucune peine ne la sanctionne.

Selon le plus récent sondage sur la question, publié en octobre dernier par Sud-Ouest Dimanche, 94% des Français approuvent l'idée d'une législation permettant l'euthanasie, même si 58% souhaitent qu'elle soit autorisée seulement "dans certains cas".

Le programme gouvernemental, dévoilé en 2008, prévoit le doublement en quatre ans, de 100.000 à 200.000, du nombre de patients en fin de vie pris en charge ainsi que la création de 1.200 nouveaux lits de soins palliatifs dans les hôpitaux. Les partisans de la légalisation ne désarment pas, à l'image de Marie Humbert, qui avait porté le sujet sur la place publique en mettant fin à la vie de son fils tétraplégique, Vincent, en 2003.

"Si je pouvais leur dire quelque chose, je leur dirais : "messieurs les sénateurs, laissez le choix à tous ceux qui le demandent, à ceux qui n'ont plus d'espoir, qu'on puisse leur permettre de partir dans la paix sans les obliger à souffrir encore pendant des années, surtout si les personnes le demandent"", a-t-elle dit mardi sur Europe 1.