Faut-il mettre les clients des prostituées en prison ?

Par latribune.fr  |   |  487  mots
Prostituées dans les rues de Berlin. A la différence de la France, le racolage n'est pas interdit en Allemagne, les Länder peuvent néanmoins interdire l'exercice de la prostitution à certains moments de la journée ou dans certains endroits
Une mission d'information parlementaire propose la pénalisation du recours à la prostitution. Les clients se verraient, comme en Suède, passibles d'une amende et même de peines de prison.

C'est un rapport de près de 400 pages qui devrait faire grand bruit. Ce mercredi, la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la prostitution en France doit présenter le fruit de son travail. Et les parlementaires qui se sont attelés à cette tâche n'ont pas hésité à faire des propositions en rupture avec la tradition française.

Les auteurs du rapport suggèrent en effet de créer un délit qui sanctionnerait le recours à la prostitution. A l'instar de ce qui se fait en Suède, les clients des "filles de joie" et des gigolos pourraient ainsi écoper d'une amende et même d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à six mois.

Pour inciter les futurs éventuels contrevenants à revenir dans le droit chemin, le rapport préconise la diffusion pendant les six mois précédant l'entrée en vigueur de cette nouvelle loi d'une campagne nationale de communication sur la prostitution.

L'échec de la loi sur le racolage initiée par Sarkozy

Sans remettre explicitement en cause, le choix de Nicolas Sarkozy qui, ministre de l'Intérieur, avait en 2003 misé sur la pénalisation du racolage pour lutter contre la prostitution, la mission estime que ce délit est destiné "à une lente extinction" du fait notamment de "la réticence constatée des magistrats à prononcer des condamnations sur ce fondement". Les auteurs de ce rapport proposent d'ailleurs d'évaluer, un an après l'entrée en vigueur du dispositif sanctionnant pénalement les clients, la pertinence et l'utilité du maintien de délit de racolage créé en 2003 par la loi sur la sécurité intérieure présentée par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur.

Aider les prostituées étrangères à obtenir le droit d'asile

Pilotée conjointement par une député socialiste des Côtes d'Armor, Danielle Bousquet, sa présidente, et Guy Geoffroy, un élu UMP de Seine-et-Marne, son rapporteur, cette mission s'est également penchée sur les difficultés sociales des personnes faisant commerce de leur corps. Selon leur rapport, la prostitution est exercée "à plus de 80% par des personnes étrangères dans nos villes alors qu'elles n'étaient que 20% au début des années 1990. Ils proposent donc une série de mesures visant à améliorer leur éventuel accès à un titre de séjour, voire du droit d'asile.

18.000 à 20.000 personnes feraient commerce de leur corps en France

Le rapport, citant des chiffres de l'Office central pour la répression de la traite des êtres humains, estime qu'il y aurait entre 18.000 et 20.000 personnes prostituées en France aujourd'hui, un chiffre inférieur à d'autres pays européens. En Allemagne, où les maisons closes ont pignon sur rue, on en compterait 400.000.

Le rapport précise également que, selon la Direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne, il y avait le 1er octobre 2010 très précisément 837 personnes prostituées dans les rues de Paris.