Budget 2012 : les collectivités territoriales prises à la gorge

Par Clarisse Jay  |   |  720  mots
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Attendant des recettes supplémentaires cette année, les collectivités apparaissent comme une possible source d'économies supplémentaires pour l'Etat. Mais leurs finances se dégradent.

A l'heure où le gouvernement, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances (PLF) pour 2012, est à la recherche d'économies supplémentaires, il apparaît tentant de ponctionner encore un peu plus les collectivités territoriales. "Il faut qu'une partie de cet effort soit supporté par les collectivités locales, où 2 milliards d'euros supplémentaires pourraient être dégagés", estime ainsi Hervé Morin, le président du Nouveau Centre.

Réaffirmant les objectifs du gouvernement de réduction du déficit public (5,7 % du produit intérieur brut en 2011, 4,5 % en 2012) malgré la révision à la hausse du déficit de l'Etat, la ministre du Budget avait récemment argué de meilleures recettes fiscales pour les collectivités cette année. Plus précisément, ce sont essentiellement les départements qui ont bénéficié du boom du marché immobilier et donc des droits de mutation, dont les recettes ont augmenté de 26 % entre juillet 2010 et juillet 2011.

Effet de ciseaux

Un optimisme taclé par plusieurs membres de la commission des finances de l'Assemblée lors de l'audition de la ministre le 31 août. Car les finances des collectivités se dégradent. Certes, comme le précise le rapport du député UMP Gilles Carrez sur le deuxième collectif budgétaire, leurs besoins de financement devraient être inférieurs aux prévisions et s'établir à environ 1,5 milliard, comme en 2010. Toutefois, leur situation commence à être critique.

L'impact des réformes récentes

Le cas des régions est assez révélateur. Selon une récente note de l'agence Fitch Ratings, leur situation reste certes "globalement saine" mais se dégrade," mise à mal par les réformes récentes. Alors que la crise économique a été un "révélateur des disparités régionales", elles ont, avec le remplacement de la taxe professionnelle par des recettes non modulables (dont la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, CVAE) perdu leur autonomie fiscale et donc aussi une partie de leurs marges de man?uvre. "Cela ne devrait pas fortement affecter les régions qui abritent des entreprises à forte valeur ajoutée, comme l'Ile-de-France ou Rhône-Alpes mais les régions ne pourront plus recourir au levier fiscal pour compenser leurs dépenses croissantes", explique Christophe Parisot, analyste chez Fitch. Quant à la TIPP (taxe intérieure sur les produits pétroliers) perçue, elle dépend des seuls volumes de carburant consommés puisque les régions n'en maîtrisent pas le tarif.

Désengagement de l'Etat

Parallèlement, depuis les lois de décentralisation, les régions doivent faire face à des charges structurelles (transports, lycées, formation professionnelle...) que l'Etat ne compense plus. "On risque un effet de ciseau entre dépenses et recettes", note Christophe Parisot. "Les région sont les collectivités locales les plus fragilisées par la réforme fiscale. Elles se retrouvent étranglées", tempête Alain Rousset, le président de l'association des régions de France, qui rappelle que les collectivités, contraintes d'équilibrer leurs budgets de fonctionnement, ne peuvent pas emprunter pour leurs dépenses de fonctionnement.

L'Etat a par ailleurs gelé sa dotation globale de fonctionnement aux collectivités de 2011 à 2013. "Face à cela, leurs investissements progressent, dans le cadre des contrat de plan Etat-région (CPER) notamment", note Christophe Parisot. Et pour cela, elles recourent à l'emprunt. Leur endettement, encore correcte en 2008, devrait passer de 17 milliards d'euros en 2010 et à 23 milliards en 2013. Du coup, leur capacité de désendettement s'allonge, passant en moyenne de 1,9 an en 2005 à 3,8 ans en 2010 . Et les difficultés d'accès au crédit n'arrangent rien, d'où le projet en cours de création d'une agence de financement.

Difficiles efforts supplémentaires

Dans ces conditions, difficile de leurs demander des efforts supplémentaires. Gilles Carrez assure d'ailleurs que cela n'est pas au programme. Pour autant, les collectivités peuvent encore dégager des marges de man?uvre, notamment sur leurs dépenses de fonctionnement et, en 2014, dans le cadre de la réforme territoriale. En attendant, "le vrai budget test sera celui de 2012, quand les pleins effets de la réforme de la TP auront pu être appréciés dans les comptes administratifs 2011", indique Christophe Parisot. Pour l'heure, Fitch note l'Ile-de-France et Rhône-Alpes AAA (long terme),
Paca AA et la Picardie AA -.