Confusion et divisions au sommet de l'euro

Par Frank Paul Weber, mis à jour par latribune.fr  |   |  995  mots
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Le sommet européen de ce dimanche ne suffira pas à résoudre la crise grecque, acter une recapitalisation des banques européennes, réformer la gouvernance de la zone euro et renforcer le Fonds européen de stabilité financière (FESF). Une seconde réunion aura donc lieu le mercredi 26. Les Allemands parlent de sommet en deux phases, les décisions devant intervenir mercredi. La confusion est de mise à tous les niveaux.

"Nous voulons absolument dissiper les incertitudes pour les marchés financiers et ce avant le sommet du G20", des 3 et 4 novembre. Jeudi, la Commission européenne plaçait ainsi la barre très haut pour la réunion des chefs d'Etat ou de gouvernement de la zone euro prévue ce dimanche. Tellement haut qu'elle sera impossible à franchir ce week-end : Paris et Berlin ont reconnu mercredi soir qu'il ne serait pas possible d'arriver à un accord dès dimanche, et annoncé la tenue d'un second sommet mercredi 26. De son côté, un porte-parole du gouvernement allemand parle de sommet européen en deux phases, les décisions devant intervenir uniquement mercredi.

Berlin tient à rassurer en justifiant la tenue de ce nouveau sommet. "Je veux dissiper l'impression que c'est du fait de divergences de position" qu'un nouveau sommet se tiendra mercredi, a déclaré Steffen Seibert lors d'une conférence de presse. "Des décisions n'auraient pas pu être prises dimanche parce que sans discussion et approbation de la commission du Budget, la chancelière aurait dû se rendre à Bruxelles sans mandat sur ces questions", a-t-il expliqué.

La commission du Budget au Bundestag doit en effet examiner toute modification éventuelle du Fonds européens de stabilité financière, l'un des principaux points de division entre la France et l'Allemagne. Le représentant du gouvernement a également démenti l'information du quotiden Bild selon laquelle Mme Merkel aurait déploré en petit comité que "les Français ne bougent pas d'un iota" dans les négociations.

Toutefois, signe de divisions bien réelles, le commissaire européen aux Affaires Economiques, Olli Rehn, a appelé la France et l'Allemagne à s'entendre sur les mécanismes de sauvetage de la zone euro, dans un entretien publié vendredi en Allemagne. "Il est très important que l'Allemagne et la France coopèrent bien et progressent ensemble", a dit le commissaire finlandais au quotidien financier Handelsblatt. Une nouvelle preuve que la confusion règne presque à tous les niveaux.

Pas de report mais un nouveau sommet

La rumeur d'un possible report de la réunion, lancée par le quotidien Die Welt, en raison d'un désaccord sur le fonds de sauvetage européen (FESF), a alerté les marchés financiers. Il n'en est apparemment rien mais le président français et la chancelière allemande ont indiqué dans un communiqué commun jeudi soir que la "réponse globale et ambitieuse à la crise que traverse actuellement la zone euro" pourrait "être adoptée définitivement par les chefs d'Etat et de gouvernement lors d'une deuxième rencontre au plus tard mercredi"... La chancelière a en tout cas renoncé à son discours à ce sujet ce vendredi devant le Bundestag.

Le FMI se désolidarise

A Athènes, un syndicaliste de 53 ans est décédé d'une crise cardiaque au cours des violents affrontements contre la politique d'austérité. Jeudi le Parlement hellène devait voter à nouveau une loi réduisant salaires et retraites, les suppressions de postes dans la fonction publique. La "troïka" formée par la Commission européenne, la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI) et chargée d'estimer la situation économique et financière de la Grèce est de plus désormais divisée. Le FMI ne partagerait pas "l'optimisme" des Européens concernant le niveau d'endettement de la Grèce: "le FMI pense que les estimations par les deux autres membres de la troïka sont trop optimistes" a indiqué une source de l'UE à Reuters.

Le FMI et les partenaires de la Grèce dans la zone euro doivent débloquer le versement d'un chèque de 8 milliards d'euros permettant à Athènes d'éviter une faillite à la mi-novembre. Dimanche, les dix-sept pays membres de l'euro doivent surtout se mettre d'accord pour trouver "une solution pérenne pour la Grèce", souligne la Commission, "afin de sortir de cette situation de crise permanente".

Recapitaliser les banques

Une des clés de la sortie de crise pour Athènes est l'éventuel effort supplémentaire «volontaire» demandé aux investisseurs, surtout les banques et les assureurs, détenant des emprunts publics grecs. Il est clair que les dirigeants politiques veulent que les établissements financiers acceptent de perdre plus que les 21% de leur investissement initial en titres grecs, encore faut-il en convaincre un très grand nombre de banques. Cette concession bancaire est évidemment étroitement liée à l'effort de recapitalisation qui leur est demandé.

Ce point semble le moins controversé à la veille du sommet de la zone euro. Au total 100 milliards d'euros d'injection de capital dans les banques européennes est envisagé. Le ratio de fonds propres «core tier one» exigé des banques européennes serait élevé à 9%, soit un peu moins que ce que le FMI réclamait (10%) mais beaucoup plus que les 5 à 6% planchers utilisés pour les "stress tests" bancaires du début de l'été dernier. Mais s'il y a consensus sur la recapitalisation des banques, pour les rendre immunes à un défaut d'un pays de la zone euro et éviter un nouveau cas Dexia, il n'est pas encore clair où elles trouveront l'argent pour renforcer leur capital.

L'effet de levier du FESF en question

Au-delà d'investisseurs privés, la contribution du Fonds européen de stabilité financière (FESF) pourrait être nécessaire pour les Etats qui ne peuvent renflouer eux-mêmes leurs banques, sauf à se mettre eux-mêmes en difficulté...

A un montant maximum de 440 milliards d'euros, le FESF (ou son successeur au plus tard en 2013 le MES, Mécanisme européen de stabilité, à 500 milliards) ne pourra faire face à ces sollicitations. D'où l'idée de le rendre "plus efficient", d'y introduire "un effet de levier" permettant de décupler "la puissance de feu" du fonds à hauteur de 1.000 milliards d'euros.

Mais sur cette "efficience" du FESF, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel sont en désaccord. Leur entrevue de mercredi à Francfort n'a pas permis d'avancer. Ils se retrouveront samedi soir à Bruxelles pour essayer à nouveau.