Abstention : Hollande à la recherche d'une solution

Par Ivan Best  |   |  652  mots
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Le chef de l'Etat consultera les partis en vue d'une réforme institutionnelle, notamment du scrutin législatif. Les solutions simples, telles que le couplage du vote présidentielle-législatives, n'apparaissent pas à la hauteur du problème. Le mal est plus profond.

François Hollande lui-même avoue sa perplexité. L'abstention record lors du premier tour de ces élections législatives (42,7%) pose problème. C'est l'un des sujets qu'il abordera à l'automne avec les représentants des différents partis, qu'il a l'intention de consulter sur une réforme des institutions. Celle-ci portera sur la présidentielle, le financement des partis... mais d'abord sur les législatives et leur calendrier. Le chef de l'Etat n'a pas de solution clés en main, c'est le moins que l'on puisse dire.  « C'est très difficile à mener après une présidentielle, une campagne législative. Ça revient toujours à la même question : cohérence ou cohabitation ? » estimait-on dimanche soir, dans l'entourage du chef de l'Etat.

Pas de solution évidente
« Certains disent qu'il faut voter (pour les législatives) en même temps que l'élection présidentielle, mais c'est compliqué parce que pour l'élection présidentielle, il y a quinze jours entre les deux tours », également fait-on remarquer également à l'Élysée. « D'autres disent qu'il faudrait les faire avant, mais à ce moment-là on change le calendrier électoral. Il n'y a pas de solution d'évidence, donc il y aura une réflexion là-dessus.»
La perplexité du chef de l'Etat n'a d'égale que celle des experts constitutionnalistes. Faut-il coupler élections présidentielles et législatives, qui auraient lieu le même jour, comme le suggèrent fortement les Verts, aujourd'hui, après d'autres (la député UMP Marie-Jo Zimmermann avait déposé une proposition de loi en ce sens, et le comité Balladur chargé de réfléchir aux institutions avait proposé en 2008 un rapprochement des deux scrutins) ? A priori, c'est une solution simple, qui permettrait de limiter l'abstention. Les électeurs n'auraient plus à se déplacer quatre fois les années de présidentielle et législatives. Leur mobilisation, confirmée cette année, en faveur de la présidentielle, profiterait au scrutin législatif.

Un choix des candidats qui apparaît opaque
Peut-être... mais le dossier apparaît plus complexe. Ce sont les élections législatives en tant que telles qui apparaissent déclassées. Ce n'est pas seulement une question de déplacement supplémentaire des électeurs, deux dimanches consécutifs, au bureau de vote.
« D'abord, il y a le choix de ces candidats, qui apparaît particulièrement opaque aux yeux des électeurs » analyse Luc Rouban, chercheur au Cevipof. « Ensuite, il existe toujours une grande incertitude, source de confusion, entre le poids des enjeux locaux et/ou nationaux. Enfin, il y a distorsion entre l'importance des partis et leur représentation à l'Assemblée nationale. Le meilleur exemple en est les Verts, qui obtiennent un accord avec le PS sur plus de 60 candidatures, alors qu'Eva Joly n'a récolté que 2% des suffrages à la présidentielle... Cette question des alliances est fondamentale, elle brouille la perception des électeurs, dont la confiance dans le personnel politique ne cesse de baisser».

Risque de multiplication des parachutages
Les réformes envisagées, telles que le couplage du vote, qui conduirait à institutionnaliser la faiblesse ou le non cumul des mandats accentueraient la coupure entre les circonscriptions et leurs élus. « Le risque est grand, si l'on supprime le cumul, de voir se multiplier les parachutages, et donc le sentiment existant d'une opacité, pour ne pas dire plus, dans le choix des candidats » souligne Luc Rouban. « Car la longévité en politique est directement liée à l'ancrage territorial", lequel tient bien sûr à la possibilité d'être à la fois maire et député, par exemple. D'un point de vue sociologique, le risque existe en outre de voir alors se creuser l'écart entre un parlement composé d'apparatchiks, d'un niveau de plus en plus... moyen,  en regard d'un exécutif peuplé d'énarques parmi les plus brillants. Ce n'est pas demain que l'Assemblée nationale aura le poids, la capacité de contre pouvoir, de ses homologues britannique ou américaine.