Paris et Bruxelles débloquent 580 millions d'euros à la Côte d'Ivoire

Par latribune.fr  |   |  987  mots
Copyright Reuters
Aux 400 millions d'euros que la France a promis d'apporter à la Côte d'Ivoire, l'Union européenne en ajoute 180 millions. Laurent Gbagbo arrêté, Alassane est désormais aux commandes du pays après quatre mois de crise.

La Commission européenne a décider de débloquer 180 millions d'euros, disponibles immédiatement, pour aider à la reconstruction économique de la Côte d'Ivoire, la réconciliation, la démocratie. "Nous avons insisté sur la nécessité de participer à la reconstruction de ce pays si gravement éprouvé", a déclaré le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé, à l'issue d'une réunion ce mercredi à Luxembourg avec ses homologues européens.

A cette enveloppe, s'ajoute un soutien "exceptionnel" de 400 millions d'euros apporté par la France et annoncée mardi par Bercy. Dans un communiqué publié mardi, la ministre de l'Economie Christine Lagarde a précisé que cette aide est "destinée, dans un premier temps, à financer les dépenses d'urgence pour les populations, la ville d'Abidjan et le redémarrage des services publics essentiels". Elle "doit également servir, dans une second temps, à relancer l'activité économique et à permettre l'apurement des arriérés vis-à-vis des institutions internationales".

Une nouvelle page

Ces aides arrivent alors que la Côte d'Ivoire tourne une nouvelle page de son histoire après l'arrestation lundi du président sortant Laurent Gbagbo."Notre pays vient de tourner une page douloureuse de son histoire. Après plus de quatre mois de crise post-électorale émaillée par tant de pertes de vies humaines, nous voici enfin à l'aube d'une nouvelle ère d'espérance", a déclaré le nouveau président ivoirien Alassane Ouattara dans son discours prononcé lundi soir, quelques heures après l'arrestation de son rival Gbagbo.

"Nous voulons rassurer les Ivoiriens et la communauté internationale que toutes les dispositions sont prises pour assurer l'intégrité de Laurent Gbabgo, de son épouse et de tous ceux qui ont été appréhendés (...) Je demanderai au Garde des Sceaux d'engager une procédure judiciaire à l'encontre de Laurent Gbagbo, de son épouse et de ses collaborateurs. Il leur sera réservé une procédure digne et leurs droits seront respectés", a -t-il encore déclaré.

"J'en appelle donc à tous mes compatriotes qui seraient gagnés par un sentiment de vengeance à s'abstenir de toute acte de représailles et de violences (...) Je réitère ma volonté de mettre en place une commission vérité et réconciliation qui fera la lumière sur tous les massacres, crimes et autres violations des droits de l'homme".

Ses partisans sont en effet accusés d'être responsables de certaines tueries et violations des droits de l'homme.

Selon l'ONU, les quatre mois de conflit auraient au total causé la mort de 800 personnes.

Transfert dans le Nord du pays

Laurent Gbagbo, tenu prisonnier depuis lundi soir à l'hôtel du Golf à Abidjan, le quartier général du clan Ouattara, a été transféré ce mercredi en dehors de la capitale, au nord du pays. 

Dans la journée de mardi, les anciens chefs militaires qui se sont battus aux côtés de l'ex-président Laurent Gbagbo ont prêté allégeance ce mardi au président Alassane Ouattara, rapporte la Télévision de Côte d'Ivoire (TCI, proche de Ouattara). Il s'agit du général Philippe Mangou, chef d'état-major de l'armée restée fidèle à Laurent Gbagbo, ainsi que de "tous les généraux des forces terrestres, navales et aériennes", précise la TCI.

Divergences sur l'arrestation

Mardi, les interrogations demeuraient quant à savoir si l'armée française est, oui ou non, entrée dans la résidence de Gbagbo pour l'arrêter. Non !, insiste la France. "Je suis absolument certain que nous aurons des images de toute l'opération, non pas de l'armée française mais de l'ensemble des acteurs, et on saura qu'aucun soldat français, aucun soldat de l'Onuci n'est rentré dans la résidence présidentielle" a indiqué ce mardi Gérard Longuet, le ministre de la Défense sur Europe 1.

"Pas un seul soldat français n'a mis les pieds dans la résidence" de l'ex-président ivoirien lors de son arrestation, a réaffirmé le Premier ministre français François Fillon ce mardi devant les députés UMP.

"L'ancien chef de l'Etat a été arrêté ce lundi par les Forces républicaines de Côte d'Ivoire", a indiqué Alassane Ouattara lors de son élocution.

Mais Toussaint Alain, conseiller du président sortant, a annoncé pour sa part que c'était les forces spéciales françaises qui avaient arrêté Gbagbo avant de le remettre aux troupes de Ouattara.

Ce qui est sûr c'est que la chute de Gbagbo est globalement saluée. Reste à ce que la transition s'opère le mieux possible. "Ouattara hérite du chaos" titre le quotidien bruxellois "Le Soir", "La démocratie l'emporte mais à quel prix?", souligne-t-il. La Côte d'Ivoire dispose maintenant d'une "occasion historique" et doit promouvoir la réconciliation nationale, établir un gouvernement d'unité nationale et rétablir l'autorité de l'Etat, a déclaré pour sa part le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon. "Le pire, une guerre civile sans frein, a sans doute été évité", estime Laurent Marchand dans Ouest France. "Le plus difficile commence pourtant: la pacification."

Des avocats français sur le coup?

Un communiqué transmis ce mercredi par un conseiller à Paris du président déchu Gbagbo indique qu'une de ses filles a fait appel à des avocats français pour étudier la "légalité" de l'arrestation lundi de ses parents ainsi que celle de l'intervention militaire française en Côte d'Ivoire.

Président depuis 2000, Laurent Gbagbo refusait de céder le pouvoir à Alassane Ouattara, désigné vainqueur du second tour de l'élection présidentielle en novembre selon des résultats certifiés par les Nations unies. Face à la récente offensive des Forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI, pro-Ouattara), facilement parvenues jusqu'à Abidjan le 31 mars, Laurent Gbagbo s'était refugié dans un bunker de sa résidence en compagnie de ses proches.