"Si la Grèce sort aujourd'hui de la zone euro, demain ce sera l'Italie"

Par Propos recueillis par Elisa Perrigueur, à Athènes.  |   |  572  mots
Katerina Igglezi est députée du Syriza, la principale formation d'opposition, elle est membre de la commission économique du Parlement grec. Copyright Elisa Perrigueur
Katerina Igglezi est députée du Syriza, la principale formation d'opposition, et membre de la commission économique du Parlement. Elle analyse la politique du Premier ministre grec qui multiplie les entretiens avec les chefs d'Etat européens dans l'espoir d'assoupir les mesures d'austérité, et alerte sur les risques de détérioration sociale dans le pays.

Antonis Samaras rencontre ces prochains jours François Hollande et Angela Merkel. Il espère obtenir un délai pour mener à bien les réformes prévues par le plan d'aide européen. Comment jugez-vous son action ?
Antonis Samaras veut deux ans de répit pour économiser 13,5 milliards d'euros, mais « rallonger » encore ne changera rien. A Syriza, nous pensons qu'il faut suspendre ce plan d'économies, annuler et revoir le mémorandum. Il faut nous laisser le temps de renouer avec la croissance, or nous ne pouvons rien faire sous une telle pression économique ! Dans sa démarche actuelle, Antonis Samaras n'a aucune revendication. Il reste fidèle au mémorandum et dit oui à tout ce que lui impose Angela Merkel. Son seul but est de rester dans la zone euro et se ranger du côté des banques, même si cela se paie par la souffrance de ses électeurs. Il existe d'autres moyens pour relancer l'activité économique. A la rentrée, nous proposerons au Parlement des propositions de lois plus sociales. Nous voterons contre les nouvelles mesures d'austérité.

Après Nicolas Sarkozy, François Hollande avait suscité un espoir auprès de nombreux Grecs. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Le président français avait annoncé de nombreuses mesures avant son élection. Il s'est effectivement montré plus ferme que Nicolas Sarkozy avec Angela Merkel, mais nous avons vite été déçus. Cet été, il s'est montré moins agressif que ce que nous avions espéré. Il est suiviste et ne s'élève pas contre ce qu'on nous impose. Nous continuons dans la même voie de l'austérité à l'échelle européenne.

Le gouvernement Samaras doit procéder à 28 privatisations d'ici 2015. Cette année, il en effectuera deux. Comment expliquer que ces privatisations soient difficiles à lancer ?
Nous trouvons au contraire que les privatisations vont très vite ! Le mois dernier par exemple, la banque agricole de Grèce (ATE Bank) a été très rapidement privatisée malgré les protestations salariales. Pour Syriza, les entreprises doivent rester dans le domaine public, elles rapportent encore de l'argent, nous pouvons en bénéficier.

Le chômage atteint 23% de la population dont plus de 45% chez les moins de 25 ans. Plus de 400.000 personnes travaillent sans être payées. La récession va atteindre 7%. La rentrée s'annonce très sombre...
Jamais nous n'aurions imaginé en arriver là. Le gouvernement veut encore baisser le niveau des retraites, le prix du gaz augmente et nous ne savons même pas comment les gens vont se chauffer cet hiver. Le pays est sous tension, et il y aura forcément des manifestations. A mon avis, ces mouvements sociaux seront pires qu'en février dernier, malgré les nombreux policiers présents dans les rues d'Athènes. Il y a déjà une manifestation générale prévue le 8 septembre prochain à Thessalonique. Ce n'est pas Syriza qui les influence, les mouvements émergent d'eux-mêmes, car les gens sont à bout. Nous les soutenons.

Quel impact aurait une sortie du pays de la zone euro ?
Syriza est toujours favorable à un maintien de la Grèce dans la zone euro. Tous les pays seront concernés, même si certains tentent de minimiser les conséquences d'une sortie de la Grèce et d'un retour à la drachme. Si nous sortons aujourd'hui, c'est l'Italie qui sortira demain. C'est la zone euro qui implosera. Cette crise n'est pas grecque, elle est européenne.