Des bouées de sauvetage pour les banques russes, en attendant un plan global

Par latribune.fr  |   |  751  mots
Avant un plan plus global de renflouement du système financier, l'Etat a a recapitalisé les numéros deux et trois du secteur bancaire

Entre les sanctions occidentales liées à la crise ukrainienne et l'effondrement du rouble, les banques russes abordent 2015 extrêmement fragilisées et l'Etat russe s'empresse de les renflouer pour les préparer à ce qui s'annonce comme une dure récession.

Dans les dernières heures d'une année qui aura vu le rouble perdre 41% de sa valeur par rapport au dollar et la Russie s'isoler comme rarement depuis la chute de l'URSS, le gouvernement russe a recapitalisé coup sur coup les numéro deux et trois du secteur bancaire, VTB et Gazprombank.

Vers un plan global

Ces injections, prévues, précèdent un vaste renflouement du système financier mis sur pied d'urgence pour contrer les effets de la crise monétaire sur les comptes des établissements bancaires.

Le nouveau soutien de l'Etat est prévu pour début 2015 et chiffré à 1.000 milliards de roubles (14 milliards d'euros). Ses bénéficiaires doivent être connus d'ici à la mi janvier-2015.

D'ores et déjà, VTB, s'est vu verser mardi 100 milliards de roubles (1,4 milliard d'euros) et doit recevoir au premier trimestre 150 milliards de roubles supplémentaires (2,1 milliards d'euros).

Gazprombank, établissement créé par le gazier Gazprom en 1990 pour financer la production d'hydrocarbures devenue une banque généraliste complète avec quatre millions de clients, est de son côté recapitalisée à hauteur de 40 milliards de roubles (560 millions d'euros).

Ces deux groupes bancaires avaient été au cours de l'été ajoutées à la liste noire des entreprises sanctionnées par les Etats-Unis pour l'annexion de la Crimée par la Russie et son rôle dans le conflit dans l'Est de l'Ukraine qui a fait plus de 4.700 morts.

L'Etat finance aussi directement des projets prioritaires

Les mesures de rétorsion annoncées dans la foulée par Bruxelles les privent, comme toutes les grandes banques publiques, de financement à long terme sur les marchés européens. Or, ces banques jouent un rôle essentiel pour financer l'activité économique et le gouvernement avait fait savoir rapidement qu'il était prêt à les soutenir, de même que des grands groupes énergétiques comme le pétrolier Rosneft ou le gazier Novatek.

VTB a promis que l'aide versée servirait à financer des travaux d'infrastructures. L'Etat ne compte pas seulement sur les banques puisqu'il a débloqué mercredi des fonds directement pour plusieurs projets cruciaux: 50 milliards de roubles (720 millions d'euros) pour la modernisation des lignes de chemin de fer à travers la Sibérie (Transsibérien et BAM) et 150 milliards (2,1 milliards d'euros) pour la production de gaz sur la péninsule de Iamal dans le Grand Nord.

 Hémorragie

 Le soutien du secteur financier s'annonce indispensable pour traverser 2015: les autorités russes ont d'ores et déjà prévenu que le produit intérieur brut pourrait chuter de plus de 4%, après une croissance évaluée pour 2014 à 0,6%, et aucune reprise n'est prévue avant 2017. Les recettes budgétaires sont plombées par la chute des cours du pétrole et le déficit pourrait dépasser 3% du PIB en 2015 après plusieurs années d'équilibre.

Renforcer les banques est devenu plus que jamais nécessaire vu le plongeon subi par le rouble à la mi-décembre, d'une violence plus vue depuis le placement de la Russie en défaut de paiement en 1998.

800 banques héritées de l'ère post-soviétique

Si la monnaie russe s'est reprise depuis, le prix de cette crise monétaire est lourd pour le secteur, jugé vulnérable avec plus de 800 établissements hérités des années post-soviétiques.

Pour défendre la monnaie, la banque centrale a dû augmenter son taux directeur à 17%, un durcissement monétaire qui renchérit l'accès aux liquidités et risque de rendre intenable tout emprunt pour les ménages et entreprises.

Déjà en manque de carburant, le secteur financier a dû faire face à une hémorragie de la part des déposants lorsque le rouble s'effondrait à vue d'oeil. Les Russes ont converti en masse des roubles en devises étrangères (pour 30 milliards de dollars au total sur l'année selon le ministre de l'Economie). Pire: ils se sont mis à retirer leurs roubles pour les conserver en liquide, de peur d'un effondrement du système, comme dans les années 1990.

Signe de la violence du phénomène, la banque centrale a dû mettre sous tutelle d'urgence une grosse banque, Trust, et la renflouer à hauteur de 127 milliards de roubles (1,8 milliard d'euros), ce qui en fait le deuxième plus gros sauvetage bancaire de la Russie post-soviétique.