Les Allemands face à la crise européenne : qui pense quoi ?

Par Marc Meillassoux, à Berlin  |   |  738  mots
Copyright Reuters
Le ton monte en Allemagne au sujet de la Grèce et de la politique européenne de la chancelière Merkel. Après l'échange entre la BCE et la Bundesbank, la fièvre gagne la coalition conservatrice. Tour d'horizon d'un pays en pleine ébullition et de ses protagonistes.

Angela Merkel : La chancelière caracole toujours en tête des sondages et jouit d?un fort soutien de la population (70% lui font confiance). Jusqu?ici sa stratégie a consisté à se montrer intraitable face à ses partenaires européens sur la nécessité de réformes puis à faire quelques concessions de dernière minute. C?est, d?après Niels Annen, spécialiste des questions européennes à la fondation Friedrich Ebert, une de ses faiblesses : « Angela Merkel n?a pas de solution durable pour cette crise, elle joue au coup par coup, en essayant de ménager ses alliés ».


La CSU : Premier allié de la CDU, la CSU bavaroise se montre de plus en plus critique. Ce dimanche, le secrétaire général de la CSU, petite soeur bavaroise de la CDU, a déclaré dans le Bild Am Sonntag « s?attend(re) à une sortie de la Grèce de l?euro en 2013 » et ainsi désavoué la chancelière. Il a été suivi par le chef de la CSU, Horst Seehofer : « nous sommes arrivées à un point où le gouvernement de Bavière et la CSU ne peuvent plus dire « oui ». Avant de menacer de ne plus respecter les accords de coalition.


Le FDP : véritable poil-à-gratter de la coalition, le ministre libéral de l?Economie Philipp Rösler sème les petites phrases contre la politique européenne d?Angela Merkel. Fin juillet, il assure qu?une « sortie de l?euro ne lui fait pas peur » et fera tanguer la coalition. Pour Niels Annen, « Rösler joue sa survie en politique et son parti subit une crise existentielle, avec moins de 5% d?intentions de vote. Seehofer voit lui venir l?élection au parlement de Bavière, l?an prochain. Il essaye un positionnement sur une ligne plus dure pour progresser dans les intentions de vote. »


La CDU : le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble, est considéré comme le plus pro-européen des ministres CDU. S?il appelle constamment à des contreparties des Etats en difficultés, il se veut conciliant. Sa relation avec la chancelière est cependant plus compliquée qu?il n?y parait, notamment en vue des législatives de septembre 2013.

Le SPD : Les sociaux-démocrates allemands peinent à trouver la bonne ligne de conduite. Pro-européen, les députés socialistes ont jusqu?ici voté tous les plans de sauvetage au Bundestag. Plusieurs leaders du parti se sont prononcés pour une mutualisation de la dette, un positionnement qui fait le jeu de la coalition, laquelle accuse depuis le SPD de vouloir dilapider l?argent du contribuable allemand.


Dans les plus petits partis, les Verts sont favorables à une politique solidaire envers les pays en difficultés alors que le parti d?extrême gauche die Linke souhaite faire annuler le vote du Mécanisme européen de stabilité après avoir saisi la cour constitutionnelle de Karlsruhe.

Le rôle des institutions et des instituts économiques

Karlsruhe : La cour constitutionnelle allemande va rendre un jugement clé le 12 septembre prochain : elle devra statuer si le MES 'Mécanisme européen de stabilité) et le paquet fiscal sont compatibles avec la loi organique allemande. Si une décision négative est peu probable, l?institution à plusieurs fois sérieusement menacé les politiques allemands de donner raison aux plaignants. Une déconvenue serait catastrophique pour la chancelière.

Bundesbank : Dans un entretien au Spiegel, Jens Weidmann, le président de la « Buba », s?est dressé contre un possible un rachat d'obligations publiques par la Banque centrale européenne (BCE) pour soulager l'Espagne ou de l'Italie, un scénario qu'il assimile à un "financement des Etats par la planche à billets". Le successeur de l?intransigeant Axel Weber a depuis reçu le soutien d?Angela Merkel.

Les instituts économiques : que ce soit l?Institut bavarois Ifo et ou le DIW berlinois, les Instituts économiques allemands s?opposent souvent à la politique de Merkel et refusent toute mutualisation des dettes ou union des transferts. Le très médiatique chef de l?Ifo, Hans-Werner Sinn, s?agite de toutes ses forces pour infléchir la politique européenne d?Angela Merkel et demander une sortie de la Grèce de l?euro. Une position partagée par le président de l?association des exportateurs allemands la BGA, Anton Börner, et les 150 universitaires allemands qui s?opposent au refinancement des Etats par le MES.