Une première, les armateurs grecs acceptent de payer des impôts

Par Elisa Perrigueur à Athènes, avec latribune.fr  |   |  540  mots
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La Grèce va faire payer des impôts à ses armateurs de bateaux battant pavillon étranger, une première depuis des décennies, même si le régime fiscal du secteur reste privilégié. Les armateurs ont accepté l'accord le temps que le pays sorte de la crise.

Les armateurs étaient intouchables depuis 1955 en Grèce. Mais la crise qui secoue le pays a eu raison d'une partie de leurs privilèges fiscaux. Pour la première fois, Athènes va faire payer des impôts à ses armateurs de bateaux battant pavillon étranger.

Nikos Vernicos est l?un des rares armateurs à s?exprimer publiquement sur cette mesure. Selon cet entrepreneur, « cette taxation devrait être provisoire le temps de la crise en Grèce. » Elle est « acceptée » de l?ensemble des armateurs. « Aucun d?entre nous n?a contredit cette réforme, insiste-t-il, personne n?envisage de changer de pavillon pour un autre pays, nous comprenons qu?il faut donner pour le pays.» Les armateurs grecs qui ont, d?après Nikos Vernicos, « souffert » de la crise depuis trois ans représentent 7,7% de la flotte mondiale. En 2012, 862 navires sur les mers et océans naviguaient sous pavillon grec contre 917 l'année précédente. « Le principal danger aujourd?hui serait que ceux qui nous financent nous demandent, eux, de changer de pavillon pour des raisons de profit », précise Nikos Vernicos.

En juin dernier, à l?aube des élections parlementaires, les armateurs grecs étaient montrés du doigt pour leurs privilèges fiscaux, inchangés depuis 1955. Nikos Vernicos alertait alors : « Si le prochain gouvernement prend des mesures défavorables pour les sociétés maritimes, elles changeront de base. » Et d?ajouter : « Si la Constitution ne protège pas notre investissement, ce sera la réaction des marchés financiers qui nous obligera à changer de drapeau.»

"Accord amiable"

La nouvelle disposition, incluse dans le projet de loi fiscale qui a été adoptée dans la nuit de vendredi, est le résultat d'un "accord à l'amiable" entre le gouvernement et les armateurs. L'amendement prévoit que la taxe forfaitaire en vigueur pour la flotte grecque, en fonction du tonnage, soit étendue "aux propriétaires étrangers ou aux sociétés de navigation pour les bateaux sous pavillon étranger qui sont gérés par des sociétés grecques ou étrangères installées en Grèce.

Une importante partie de la flotte grecque sous pavillon étranger, la première au monde, entre dans cette catégorie. En pratique, la Grèce percevra la différence entre la taxe forfaitaire qu'elle impose et les impôts, très peu élevés, perçus par les dispensateurs de pavillons étrangers.

Des retombées pour l'Etat difficiles à calculer

Les autorités grecques espèrent que cette mesure ne provoquera pas de fuite généralisée des sociétés concernées, au vu notamment de son coût relativement faible pour les nouveaux contribuables. Mais le ministère n'était pas en mesure de fournir dans l'immédiat d'estimations chiffrées, alors que la contribution fiscale du secteur reste de toute manière inconnue de longue date. Selon des sources proches du dossier, les revenus attendus tournent dans l'immédiat autour de 100 millions d'euros par an. L'opposition de gauche radicale, Syriza, a pour sa part dénoncé un effet de manche sans réelles retombées financières, visant surtout à calmer la grogne montant dans le pays surendetté et soumis à une rigoureuse austérité contre les privilèges fiscaux des armateurs.