La France dans l'Otan : le PS s'oppose mollement, l'UMP approuve

Par latribune.fr  |   |  793  mots
Les réactions à la réintégration quasi complète de la France dans le commandement intégré de l'Alliance atlantique sont finalement assez convenues, la gauche s'opposant à cette décision mais sans grande virulence, tandis que l'UMP - hormis sa frange souverainiste, représentée par exemple par Jacques Myard, ou quelques villepinistes - l'approuve globalement.

A droite, la majeure partie de l'UMP et le Nouveau Centre devraient se ranger derrière François Fillon, qui engagera la responsabilité de son gouvernement sur la politique étrangère de la France, le 17 mars à l'issue du débat sur la réintégration de l'Otan. "Nous voulions un débat et un vote", s'est réjoui François Sauvadet (NC) en apportant le soutien de l'ensemble de son groupe au Premier ministre.

La question divise en revanche l'UMP, tiraillée entre ceux qui craignent trahir l'héritage du général de Gaulle et les autres, pour lesquels il faut mettre fin à une hypocrisie. "La France n'a pas le choix", juge le député de Paris Claude Goasguen, qui "suivra le gouvernement mais avec beaucoup d'inquiétude" quant au "changement de la diplomatie américaine".

Pour Pierre Lellouche, récemment nommé à la tête d'une mission sur l'Afghanistan, "cela fait vingt ans que la France se rapproche de manière rampante" des Etats-Unis et "le président a raison de mettre fin à un tabou et une hypocrisie". "C'est notre intérêt national, cela ne gêne en rien notre indépendance et il a obtenu des contreparties extrêmement importantes", dit-il.

A l'UMP, villepinistes et souverainistes - minoritaires au sein du groupe - sont sur la même longueur d'ondes que certains socialistes : "c'est un signe que la France est totalement pieds et mains liés aux Américains, on aurait pu se passer de ce message", confie Jean-Pierre Grand. Selon François Goulard, une quarantaine de députés UMP partagent cette inquiétude, déjà exprimée par deux anciens Premiers ministres de Jacques Chirac, Dominique de Villepin et Alain Juppé.

Tous ne devraient cependant pas l'exprimer lors du vote du 17 mars. Evitant de poser directement la question de l'Otan, le vote de confiance portera en effet sur l'ensemble de la politique étrangère de la France.

C'est une "mauvaise manière", qui vise à "empêcher les députés de s'exprimer", traduit l'ancien ministre François Goulard. Comme ses deux collègues, Jacques Myard ne prendra pas part au vote, estimant que le retour dans l'Otan est "une faute diplomatique".

Le retour complet de la France dans le commandement intégré de l' OTAN est un "pari" qu'il faut accepter, a de son côté déclaré ce jeudi Alain Juppé. Sur Europe 1, l'ancien Premier ministre s'est cependant interrogé sur le calendrier de cette réintégration. "Est-ce que c'était absolument le bon moment? Je n'en suis pas sûr (...) La démarche qui nous a conduit à cette réintégration était tout à fait naturelle et elle se situe dans la continuité de ce qu'ont fait les présidents antérieurs", a expliqué le maire de Bordeaux.

Au PS, Martine Aubry a estimé que "rien aujourd'hui ne justifie de rentrer dans le commandement militaire de l'Otan. Il n'y a pas d'urgence ni de raison fondamentale, si ce n'est un atlantisme qui devient une idéologie". Les socialistes s'opposeront bien sûr, sans illusion, lors du vote du 17 mars.

Pour l'ancien Premier ministre socialiste Lionel Jospin, Nicolas Sarkozy a concédé une "adhésion sans condition" à l'Alliance atlantique, détruisant du même coup un "consensus gauche-droite de quarante ans" en France. "Je ne vois pas l'intérêt de nous banaliser (...) Nous sommes originaux, restons-le", a-t-il lancé sur RTL ce jeudi. "Nous sommes solidaires de nos alliés mais nous ne serons jamais une deuxième Angleterre, fille aînée et docile des Etats-Unis".

Les anciens ministres Hubert Védrine et Jean-Louis Bianco se sont aussi élevés contre l'idée selon laquelle le retour complet de Paris dans l'Otan serait une suite logique de la politique menée depuis plus de vingt ans : ce "n'est pas l'aboutissement d'un processus lancé par François Mitterrand en 1990-1991", insistent-ils pour "dédouaner" l'ancien président socialiste.

C'est une "erreur diplomatique", commente Noël Mamère (Verts), selon qui "rejoindre l'Otan, qui ne sert plus à rien, ne fait que confirmer la tendance atlantiste du président de la république". Et, au nom du PCF, qui réclame un référendum, Marie-George Buffet juge que le retour dans l'Otan est "une perte d'indépendance" pour la France. "On ferait mieux de travailler à la construction de l'Europe (sic !) au lieu de se mettre sous le couvert de l'Otan sous l'égide des Etats-Unis".

A noter, comme le fait l'excellent blog "Secret défense", que "l'histoire offre parfois de sérieux retournements. En 1966, l'opposition socialiste et centriste au général de Gaulle avait déposé une motion de censure contre le gouvernement Pompidou pour dénoncer le retrait de la France de l'organisation militaire intégrée."