Elections cantonales : ce qu'il faut retenir de ce premier tour

Par latribune.fr  |   |  1249  mots
Copyright Reuters
Le PS obtient 25% pour ce premier tour des élections cantonales, l'UMP tombe à 16%, le FN décroche quelque 15%. La participation pour le premier tour des élections cantonales françaises a été l'une des plus faibles sinon la plus faible de l'histoire électorale française.

Selon les chiffres du Ministère de l'Intérieur, le PS (Parti Socialiste) a obtenu 25% pour ce premier tour des élections cantonales, l'UMP du président de la république Nicolas Sarkozy seulement moins de 16% et le FN (Front National) 15%.

La participation pour le premier tour des élections cantonales françaises a atteint 55,63% des électeurs inscrits. C'est l'un des taux les plus faibles voire le taux le plus faible de l'histoire électorale française. Il est vrai que ces élections sont les dernières du genre ce qui n'est guère enthousiasmant pour les électeurs et qu'elles n'étaient pas pour une fois couplées avec les régionales. Lors des élections cantonales de 2004, l'abstention avait été de 36,09% au premier tour, et de 33,51% au second tour, et pour celles de 2008, de respectivement 35,12% et 44,53% au second. Le record d'abstention pour des cantonales reste celui de 1988 : 50,8% au premier tour, 52,9% au second.  Les élections européennes de 2009 avaient connu enore pire 59,37% (et 57,24% en 2004).

Traditionnellement, en cas de très faible participation, ce sont les partis dits "extrêmes" notamment le Front National (FN) dont les militants restent mobilisés, qui réalisent de bons scores. Ce scrutin n'a pas échappé à la règle, même si le FN n'était présent que dans 1.400 cantons. Le parti de Marine Le Pen est en mesure de se maintenir dans près de 400 cantons. Et cette situation met l'UMP dans une situation embarrassante. 

La fille de Jean-Marie Le Pen a salué dimanche soir le désir de changement des Français en matière de politique et a appelé à une mobilisation encore plus forte au second tour alors qu'a ses yeux, ce scrutin de "notables" qui favorise les sortants n'est traditionnellement pas favorable à son parti qui ne compte d'ailleurs pour l'instant aucun élu dans les cantons. Elle a stigmatisé la violence qui touche selon elle non seulement les villes mais aussi les campagnes et brandit une nouvelle fois la menace d'une vague d'immigration illégale accrue avec la crise dans les pays arabes notamment depuis l'île italienne de Lampedusa où elle s'est récemment rendue.

Du coup, l'hypothèse, initialement peu vraisemblable, d'un basculement du Sénat à gauche, enjeu indirect majeur de ce scrutin, n'est plus si invraisemblable.

Réponse dans une semaine, le dimanche 27 mars, avec le second tour de ces élections cantonales. Mais déjà, l'ambiance glaciale au QG de l'UMP ne présage pas d'un score honorable en ce premier tour. Le parti de Nicolas Sarkozy affirme qu'il ne faut pas tirer de ce scrutin des enseignements nationaux. Même s'il prend une véritable "claque". D'où un appel à une "très forte mobilisation" pour le second tour lancé ce dimanche soir par le secrétaire général de l'UMP Jean-François Copé. Il veut le maintien au second tour de tous ses candidats qui le peuvent.

Sinon, "il n'y aura pas d'alliance avec le Front National" avec lequel l'UMP dit ne partager "aucune valeur". Même s'il a reconnu que "bon nombre de nos électeurs avaient voté pour le Front National". Un vote dans lequel il n'y a "aucun espoir". Pas question pour autant de "front républicain", à savoir un appel à voter pour le candidat de gauche quand l'UMP a été éliminée au premier tour car "la droite et la gauche, ce n'est pas la même chose".

Le Premier ministre François Fillon a lui aussi réagi, mais par un simple communiqué. "Ce soir, alors que les électeurs se sont fortement abstenus, je ne peux que regretter que les Français ne se soient pas mobilisés pour choisir les élus qui prennent des décisions importantes pour leur vie quotidienne. J'invite chacun à se mobiliser pour le second tour car, dans beaucoup de cantons, rien n'est encore joué. Plus que jamais, la droite républicaine doit se rassembler autour de ses valeurs et de ses projets. J'invite chaque électeur à la responsabilité car notre démocratie locale, loin des postures démagogiques, mérite des élus capables de construire l'avenir des départements".

Le ministre de l'Intérieur et ex-secrétaire général de l'Elysée Claude Guéant a semblé minorer la défaite du camp présidentiel en affirmant que la majorité avait emporté 32,5% des voix contre plus de 25% pour le PS sans lui ajouter les autres scores de la gauche. Le Modem de François Bayrou a estimé "irresponsable" le non-appel de l'UMP à voter systématiquement contre le Front National.

La gauche joue l'union pour le second tour

Pour le Parti Socialiste (PS), cette victoire demande toutefois confirmation car il a subi quelques échecs, par exemple à Aubagne où il est éliminé dès le premier tour au bénéfice du FN et de l'UMP. Mais plus largement, le PS devra compter avec les bons scores du front de gauche des communistes (7,87%) de Jean-Luc Mélanchon (0,96%) - qui a lancé : "Nicolas Sarkozy reçoit la monnaie de sa pièce de la réforme des retraites. La droite d'en bas a changé de chef" - et avec celui des écologistes (6,96%).

Des contacts et réunions ont eu lieu dès dimanche soir pour tenter de trouver des solutions communes à gauche en vue du second tour. Mais sans le co-président et fondateur du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon qui dénonce la "soirée privée de la péniche" réunissant les dirigeants du PS, d'Europe Ecologie, des Verts et du PCF.
 

Coupant l'herbe sous le pied aux autres ténors socialistes, la Première secrétaire Martine Aubry en tête alors que Dominique Strauss-Kahn est contraint au silence en raison de son poste de directeur général du FMI, le Fonds monétaire international, l'ex Premier secrétaire François Hollande, candidat putatif aux futures élections primaires au PS en vue de la Présidentielle de 2012, a appelé, au contraire de Jean-François Copé, à faire barrage au FN au second tour quitte à voter pour le candidat UMP. Il entend ainsi faire du Parti socialiste le ciment du barrage au Front national, en regrettant au passage la position "ambigüe" de l'UMP.

Cécile Duflot, la leader écologiste, a elle aussi lancé : "nous appelons tous les électeurs à faire barrage au FN", donnant une nouvelle indication de la position que veut afficher la gauche en vue du second tour.

Parmi les personnalités élues au premier tour figurent Bernadette Chirac en Corrèze (pour ce qui est sans doute sa dernière élection) avec 50,05% soit...deux voix d'avance, le Garde des Sceaux divers-droite Michel Mercier a été élu dès ce premier tour dans le Rhône, tout comme Eric Ciotti, le très droitier élu UMP dans les Alpes-Maritimes avec 76,84%. A Hénin-Beaumont, terre adoptive de Marine Le Pen, le FN obtient 65%. Au Nouveau Centre, François Sauvadet en Cote d'Or et Hervé Morin dans l'Eure ont été eux aussi largement élus.

Le nombre départements gérés par la gauche pourrait passer de 58 à 60. Le PS a fustigé la tentative de l'Elysée de lancer des débats par exemple sur l'Islam alors que les Français restent préoccupés surtout par les questions d'emploi et de pouvoir d'achat, mis à mal par la crise. Cela fait penser au fameux "it's economy, stupid" lancé par le camp de Bill Clinton contre celui de George Bush père, soulignant que ce sont les questions économiques qui préoccupent les électeurs et non celles de politique ou de diplomatie.