Geoffrey La Rocca, James Bond au pays des merveilles

Par Perrine Créquy  |   |  903  mots
Geoffrey La Rocca, cofondateur de Madeleine Market (crédits Marie-Amélie Journel)
Comme le héros de Ian Fleming, dont il a adopté les codes vestimentaires, le cofondateur de Madeleine Market est un réseauteur hors pair qui apprécie les merveilles gastronomiques de l'épicerie fine.

Élancé, costume cintré, Geoffrey La Rocca chemine dans la vie d'un pas alerte. À 26 ans, cet homme pressé n'a pas froid aux yeux. Avec Jules Trecco (un ancien de Jaïna Capital, le fonds créé par Marc Simoncini), il a lancé il y a un an MadeleineMarket.com, l'épicerie fine en ligne recommandée par le Gault & Millau.

Son objectif : démocratiser truffes, caviars et autres douces merveilles de luxe, à l'heure où les grands du secteur, comme Hédiard, s'essoufflent. Une sorte de James Bond -personnage qu'il adore -au service de sa majesté la gastronomie.

Ses armes ? Pas des gadgets, mais les réseaux sociaux et les supports de communication les plus créatifs. Sa dernière trouvaille est une « box » remplie chaque mois de produits sélectionnés par des chefs étoilés. Mais sa botte secrète, c'est son carnet d'adresses dans les médias, où il a fait ses classes.

« Adolescent, j'avais monté un journal télé avec des copains »

À peine âgé de 19 ans, il lance le JR, une agence de flashs d'informations pour des radios en France et en Belgique.

« J'avais implanté le siège social de l'agence avenue des Champs-Élysées, parce que l'adresse était mythique. C'était une fierté et un plaisir personnel, même si ce n'était qu'une boîte postale. »

Remarqué par RMC, Geoffrey La Rocca réalise des chroniques pour l'animateur phare de la radio, Jean-Jacques Bourdin, puis pour BFM Business, l'autre antenne du groupe NextRadioTV. Lors de la campagne présidentielle de 2007, lui vient l'idée de lancer un média pure player couvrant tous les déplacements de Nicolas Sarkozy. Le ton décalé d'ElyseeInside.fr génère 200.000 visites par mois. Ce succès pique la curiosité des ténors de l'information en ligne. Il est ainsi invité à témoigner devant les directeurs du Figaro.fr, dont l'un d'eux se souvient de « son calme et de son aplomb face à la contradiction ».

À cette époque, il multiplie les missions de consultant en « nouveaux médias ». Lui que ses proches disent complexé par son niveau d'études - une licence de droit, économie, gestion à la Sorbonne - devient professeur à l'École supérieure de journalisme de Paris, enseignant les ressorts des réseaux sociaux et du référencement sur Internet.

Fort de ces expériences, Geoffrey La Rocca est nommé en 2010 responsable Internet et activités numériques de RMC, et responsable du « social media » pour l'ensemble des entités de NextRadioTV. Mais il se heurte aux baronnies internes, tenues par des anciens qui voient d'un mauvais oeil l'arrivée de ce jeune premier.

« J'étais porté par l'enthousiasme et j'ai pu marcher sur quelques pieds sans m'en rendre compte », reconnaît-il aujourd'hui.

Car cette volonté d'aller vite lui permet de mener ses projets tambour battant, nouant des partenariats à tour de bras. Au risque d'oublier parfois d'y mettre les formes. Comme lors du lancement ultramédiatisé du Siècle Numérique, un « link tank » qui rassemble les décideurs du digital dans des dîners très privés, à l'instar du Siècle, club très fermé où se rencontrent les élites au-delà des clivages politiques. Mais la célèbre association née après la Libération a peu apprécié le clin d'oeil, et le cercle cofondé par Geoffrey La Rocca et Alexandre Malsch, le fondateur de Melty, a été rebaptisé en hâte Digital Century.

Ses armes ? les réseaux sociaux !

« Nous avons monté ce projet en deux jours », confie Alexandre Malsch, qui loue « le mérite et le courage » du cofondateur de Madeleine Market. « Geoffrey est réservé au premier abord, mais il est très ouvert. Il est cool. »

Geoffrey La Rocca n'en est pas à son coup d'essai en matière d'organisation d'événements de networking. Avec Benoît Raphaël, stratégiste éditorial et cofondateur de Trendsboard, il organise depuis quelques années la « Digital Beer », un apéro mensuel qui réunit les journalistes et acteurs du Web parisiens sur les plus belles terrasses de Paris dès le retour des beaux jours.

Serial networker à l'air mystérieux, on lui prête autant de conquêtes féminines que son James Bond d'idole. Mais le séducteur s'est « rangé des voitures ». Le voici désormais installé avec Alice Weill, la fille de son ancien patron à NextRadioTV. Côté professionnel aussi, il doit éviter de se disperser et « veiller à bien gérer sa bande passante », selon David Amsellem, fondateur de la conciergerie de luxe John Paul, et actionnaire de Madeleine Market.

« Geoffrey concilie l'effervescence créatrice propre à la jeunesse avec le flegme et la maturité d'un homme de 50 ans. C'est un chat qui retombe toujours sur ses pattes. Il a l'intelligence des gens simples : il sait trouver des solutions simples aux problématiques complexes. C'est un Charles Beigbeder en herbe », estime David Amsellem, qui ne cache pas son admiration pour le patron de Poweo, qui a été son mentor : « Il ne manque à Geoffrey qu'un peu plus d'expérience entrepreneuriale, et le succès. »

Madeleine Market espère clôturer son premier exercice fin 2013 avec 1 million d'euros de chiffre d'affaires. Atteindre cet objectif serait un premier fait d'armes pour Geoffrey La Rocca. Et un cadeau de Noël symbolique pour ce jeune entrepreneur qui, pour le moment, ne se rémunère pas.

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