Plus jamais « Charlie » !

Par Philippe Cahen  |   |  402  mots
L'édition "des survivants" datée du 14 janvier, une semaine après l'attentat à Charlie Hebdo.
« Je suis Charlie », « je suis flic, je suis juif, je suis Charlie » ! Les immenses manifestations du 7 au 11 janvier ont été un message de rage, d'émotion, un message pour la nation, pour nos enfants. Et après ? La répression ! Et après ? Voici quatre axes de travail pour qu'il n'y ait « plus jamais ça ! ».

Le premier axe est mondial. Il s'agit d'éteindre le djihadisme, pas seulement par les armes. Les guerres d'Afghanistan, d'Irak et du Mali montrent leurs limites.

L'Organisation de la conférence islamique (OCI), qui regroupe 60 États musulmans - car c'est bien l'islam qui est concerné au premier chef -, doit travailler avec l'ONU à ce but, car ce sont bien les 192 États de cet organisme qui sont concernés. Le deuxième axe est occidental. En effet, hors les pays musulmans eux-mêmes, le djihadisme tue dans les pays occidentaux. Non seulement il faut échanger sur le plan sécuritaire, mais il faut aussi tendre à des définitions communes - ce qui est le plus compliqué -qui encadrent le djihadisme pour mieux comprendre la place de l'Islam dans le monde occidental et contribuer à organiser la société musulmane. Sur ce point, la France a une place particulière, avec les musulmans les plus nombreux et un principe de laïcité qu'elle est seule à comprendre...

Le troisième axe est national. Il est d'ailleurs le reflet des fissures de notre société : résoudre le vivre-ensemble et non créer le vivre-à-côté. Ce sont bien les « banlieues », les « quartiers », qui sont les ferments de ces djihadistes.

Résoudre par exemple soixante ans d'échec de politique urbaine en constatant le gouffre financier de la politique de la ville (des dizaines de milliards d'euros dépensés en pure perte), résoudre quarante ans d'errements dans l'enseignement pour arriver à un classement Pisa catastrophique, notamment pour les élèves des banlieues.

Le quatrième axe est aussi national : comment changer la pensée unique qui étreint et éteint la nation. Ce sujet est évoqué sans cesse depuis plus d'une trentaine d'années. Reconnaître, accepter, changer la pensée unique, c'est écouter l'Autre, c'est voir différemment le vivre-ensemble. C'est ne pas proposer année après année des solutions identiques qui ne fonctionnent pas. C'est ne pas être dans l'opposition ou l'accord systématique. C'est changer le regard sur la nation, avoir une vision, être dans le champ et dans le chant du monde.

Utopique ? Peut-être, mais urgentissime si l'on ne veut pas un dixième anniversaire « chaud brûlant » des émeutes des banlieues de la fin 2005.

Je repars en plongée.

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L'ouvrage le plus récent de Philippe Cahen :
Les Secrets de la prospective par les signaux faibles, Éditions Kawa, 2013.