Affaire Galleon : condamnation record pour un délit d'initié à Wall Street

Par Jérôme Marin, à New York  |   |  451  mots
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Raj Rajaratnam, le milliardaire fondateur du fonds d'investissements Galleon, a écopé de onze ans de prison pour avoir illégalement engrangé 72 millions de dollars de gains en Bourse.

Le verdict est tombé pour Raj Rajaratnam, le fondateur du fonds d'investissements Galleon. Il a été condamné jeudi à New York à 11 ans de prison - assortis d'une amende de 10 millions de dollars. Il s'agit de la plus forte peine jamais infligée aux Etats-Unis pour une affaire de délit d'initiés. Le milliardaire, dont la fortune était estimée en 2009 à 1,3 milliard de dollars par Forbes, avait été reconnu coupable en mai des quatorze chefs d'inculpation pesant à son encontre, portant essentiellement pour l'utilisation informations confidentielles sur plus d'une douzaine de sociétés cotées (Goldman Sachs, Intel, Google, IBM...). L'accusation estime ainsi qu'il a illégalement engrangé 72 millions de dollars de profits en Bourse. Des gains présumés que la défense n'évaluent qu'à 7 millions de dollars. Et qui auraient dû déboucher sur une condamnation maximale de 8 ans de prison, avaient fait valoir, auprès du juge Richard Holwell, les avocats de Raj Rajaratnam.

Des témoins à charge, soucieux de "sauver leur peau"

Au terme de sept semaines de procès, les douze jurés n'avaient pas retenu l'argumentaire de John Dowd, le principal avocat de la défense. Raj Rajaratnam n'a fait que son métier, qui consiste à collecter une mosaïque d'informations publiquement connues avant d'investir, avait-il tenté de convaincre. Fidèle à la stratégie offensive fixée dès le premier jour d'audience, ce ténor du barreau avait joué avec brio sa partition, malmenant des témoins à charge soucieux de "sauver leur peau" en coopérant avec le ministère public.

Lloyd Blankfein cité comme témoin

Mais cette stratégie n'avait pas pesé lourd face à l'imparable démonstration de l'accusation et à l'accumulation des témoignages, preuves et écoutes téléphoniques accablantes. "Merci pour ce tuyau. Merci, parce que grâce à vous je viens de gagner des millions", pouvait-on entendre dire Raj Rajaratnam sur l'une des nombreuses bandes diffusées au cours du procès. D'autres conversations avaient mis en lumière les informations glanées ici et là par l'investisseur. Auprès d'Anil Kumar, un ancien consultant de McKinsey, de Rajiv Goel, un ancien cadre d'Intel, ou encore de Rajat Gupta, un ancien administrateur de Goldman Sachs.

En septembre 2008, ce dernier avait averti Raj Rajaratnam que Warren Buffett s'apprêtait à injecter 5 milliards de dollars dans Goldman Sachs, lui permettant de réaliser un gain d'un million de dollars. Une violation de la politique de confidentialité qui s'impose aux administrateurs, avait expliqué à la barre Lloyd Blankfein, le PDG de la banque d'affaires, au cours d'une audition ultra-médiatisée. Cela faisait plus de vingt ans qu'un grand patron de Wall Street n'avait pas été cité comme témoin au cours d'une affaire criminelle.