A Strasbourg, l'esquisse du programme du Docteur Macron

Par Olivier Mirguet, à Strasbourg  |   |  881  mots
Mardi soir, Emmanuel Macron est monté sur la scène du palais des congrès de Strasbourg, devant 1.200 militants et sympathisants, afin de présenter les premiers résultats de son "diagnostic" sur l'état de la France.
En meeting mardi soir à Strasbourg, le candidat putatif à l'élection présidentielle a posé son diagnostic sur l'état de la France et présenté le premier volet, démocratique et citoyen, d'un programme électoral qu'il entend limiter à une dizaine d'engagements.

C'était un galop d'essai. Le premier d'une série de trois meetings consacrés à l'engagement citoyen, à la vie quotidienne des français et au "vivre ensemble", que le fondateur du mouvement "En marche !" prévoit de poursuivre le 11 octobre au Mans, puis le 18 octobre à Montpellier. Mardi soir, Emmanuel Macron est monté sur la scène du palais des congrès de Strasbourg, devant 1.200 militants et sympathisants, afin de présenter les premiers résultats de son "diagnostic" sur l'état de la France. Fort des enseignements tirés de 25.000 questionnaires-entretiens collectés dans tout le pays, l'ex-ministre de l'Economie a laissé le soin à Bruno Bonnell, entrepreneur high-tech fondateur d'Infogrames, de présenter les éléments statistiques qui alimenteront les premiers pas de sa campagne.

"Un médecin ne vous donne pas les médicaments avant de vous expliquer votre maladie", a prévenu Bruno Bonnell, applaudi par une audience attentive mais pas forcément informée de l'identité du "Monsieur Loyal" de cette soirée.

"La démarche d''En marche!', consiste à essayer d'écouter les gens, à froid. Après ce diagnostic, viendra le temps des propositions", a prévenu Bruno Bonnell.

Le rythme n'était pas parfait : trop de diapositives et de graphiques projetés sur grand écran, semblaient se plaindre les invités. Voilà pour la forme.

Pas de déclaration de candidature à la présidentielle

Sur le fond, malgré le spectre étroit des thèmes abordés, Emmanuel Macron n'a pas déçu ses militants. Point de déclaration de candidature à l'Elysée, personne ne s'y attendait ce soir. Mais des idées. Première d'entre elles : introduire la proportionnelle aux élections législatives. "Nous allons faire rentrer le FN, vraisemblablement, dans la représentation du pays", a prévenu Emmanuel Macron, "mais il faut aller vers ce risque parce qu'il est démocratique". Applaudissements dans la salle. Deuxièmement : limiter le cumul des mandats dans le temps.

"Quand la politique n'est plus une mission mais une profession, les responsables politiques ne sont plus des engagés mais peuvent devenir des intéressés", a observé l'ancien banquier d'affaires.

Proposition approuvée par les militants. Troisième projet : créer une commission de citoyens, tirés au sort, chargés d'auditionner annuellement le chef de l'Etat et de vérifier la conformité de ses actes avec ses engagements. La commission serait assistée par le Conseil d'Etat, "dont c'est la mission". L'idée qui pourrait se rapprocher d'une mise sous tutelle du président de la République a convaincu, sous les bravos.

Au fil de son intervention d'une soixantaine de minutes, Emmanuel Macron a égrené quelques autres propositions, volontairement imprécises, sur la responsabilisation accrue des élus locaux au terme d'une nouvelle étape de la décentralisation ou sur la privatisation de certaines activités publiques.

Des  listes paneuropéennes, sur une idée de Daniel Cohn-Bendit

A Strasbourg, à quelques centaines de mètres du bâtiment où le parlement européen tient session cette semaine, il n'a pu s'empêcher d'évoquer le désamour de la population française pour les institutions de l'UE, proposant de réformer les règles de la représentativité européenne.

Reprenant une idée émise par Daniel Cohn-Bendit, Emmanuel Macron voudrait consacrer le quota des futurs ex-députés britanniques à la création d'un "vrai contingent de députés européens, élus sur des listes paneuropéennes". Aucun élu européen n'était présent dans la salle du meeting pour réagir à ces propos.

Des élus locaux pas très présents

Les élus locaux n'ont pas, non plus, fait le déplacement en masse. En milieu d'après-midi, Roland Ries, maire (PS) de Strasbourg avait prévu d'accompagner le fondateur d'"En marche" pour une déambulation dans les rues de la ville, à la rencontre de ses habitants. Le projet a tourné court, bloqué par une centaine de journalistes tournant autour du candidat putatif à la prochaine élection présidentielle.

Présent et bien en vue lors de la toute première soirée de présentation d'"En marche !", le 12 juillet à la Mutualité à Paris, Roland Ries s'est abstenu cette fois d'afficher un soutien trop marqué à celui qui semble être son candidat préféré. Alain Fontanel, premier adjoint au maire et secrétaire national aux fédérations et aux sections du PS, s'est présenté modestement comme adjoint à la culture quand il a fait visiter le Shadock, bâtiment totem de la communauté French Tech à Strasbourg, à l'ex-ministre dont la pré-campagne embarrasse manifestement le PS en Alsace.

A l'UDI aussi, les élus locaux semblent un peu gênés. "Il y a du bon dans les propositions de Macron", s'est enthousiasmée Pascale Jurdant-Pfeiffer, conseillère départementale du Bas-Rhin et élue municipale dans l'opposition à Strasbourg. "Jean-Christophe Lagarde, notre président, a tendu la main à Macron. J'aurais été gênée si des élus du PS étaient venus en masse ce soir à ce meeting", a-t-elle reconnu. "Les Républicains", dont Emmanuel Macron a moqué le processus des primaires, étaient évidemment absents. Le décloisonnement entre la gauche, le centre et la droite préconisé par Emmanuel Macron n'a pas encore franchi le barrage des clans politiques provinciaux.

Par Olivier Mirguet, journaliste correspondant Grand-Est