Arbitrage du Crédit Lyonnais : cinq ans de prison ferme requis contre Bernard Tapie

Par latribune.fr  |   |  580  mots
(Crédits : Reuters)
Le ministère public a requis lundi cinq ans de prison ferme contre Bernard Tapie et trois ans de prison dont 18 mois avec sursis contre le PDG d'Orange, Stéphane Richard, dans le procès de l'arbitrage contesté de 2008 en faveur de l'ancien homme d'affaires dans son contentieux avec le Crédit Lyonnais.

Le ministère public a requis lundi soir cinq ans de prison ferme à l'encontre de Bernard Tapie pour "escroquerie" et "détournement de fonds publics" dans l'affaire de l'arbitrage controversé qui lui avait octroyé 403 millions d'euros en 2008 et qui a été annulé au civil pour "fraude". Cet arbitrage, censé solder un vieux litige entre l'homme d'affaires et le Crédit Lyonnais, était "truqué" et Bernard Tapie, qui souffre aujourd'hui à 76 ans d'un double cancer, son "co-organisateur" et son "bénéficiaire principal", ont estimé les représentants du parquet, Nicolas Baïetto et Christophe Perruaux.

Au terme d'un réquisitoire de plus de quatre heures et demi, ils ont également demandé au tribunal correctionnel d'ordonner la confiscation de l'ensemble des biens saisis au patron du groupe de médias La Provence et ex-ministre.

Les plaidoiries de la défense doivent débuter mardi matin et s'échelonner sur trois et éventuellement quatre jours. Le jugement n'est pas attendu avant plusieurs semaines.

Trois ans de prison requis contre Stéphane Richard

Bernard Tapie, 76 ans, souffre d'un cancer et sa peine ne serait sans doute jamais mise à exécution, a admis le procureur, qui s'est montré particulièrement sévère pour les anciens hauts fonctionnaires que sont le PDG d'Orange Stéphane Richard et l'ex-président du consortium de réalisation (CDR) chargé de gérer le passif du Crédit Lyonnais Jean-François Rocchi, lui aussi prévenu.

Le procureur Nicolas Baietto a ainsi requis à l'encontre de Stéphane Richard - qui était directeur de cabinet du ministre de l'Economie et des Finances Christine Lagarde à l'époque -, trois ans de prison dont 18 mois avec sursis ainsi que 100.000 euros d'amende et l'interdiction d'exercer toute fonction publique pendant cinq ans.

La même peine de prison et d'interdiction de fonction publique a été requise à l'encontre de Jean-François Rocchi, assortie de 50.000 euros d'amende.

La relaxe a au contraire été requise pour Bernard Scemama, autre fonctionnaire également jugé depuis le 11 mars.

Le PDG d'Orange cantonne son rôle à celui "d'exécutant"

Bernard Tapie, qui dit avoir été floué par le Crédit Lyonnais lors de la vente du fabricant d'équipements de sports Adidas en 1993, s'est vu accorder 15 ans plus tard, après de multiples péripéties judiciaires, 403 millions d'euros dont 45 millions pour préjudice moral.

Mais l'ex-homme d'affaires, qui se présente désormais comme exerçant la profession d'acteur, et son avocat Maurice Lantourne sont accusés d'avoir obtenu frauduleusement cet arbitrage, en collusion avec un des trois arbitres, Pierre Estoup, 92 ans.

A Stéphane Richard, il a notamment reproché de ne pas avoir loyalement informé Christine Lagarde, de lui avoir "désobéi" pour trouver avec Bernard Tapie un arrangement excluant le Crédit Lyonnais de l'arbitrage, qui plus est en utilisant sa signature, et écarté les avis défavorables à ce compromis. Autant d'accusations que le PDG d'Orange s'était employé à réfuter pendant le procès, affirmant avoir seulement fait son travail de directeur de cabinet et joué un rôle secondaire dans une décision qui avait selon lui le soutien du pouvoir exécutif.

Un argument balayé par Nicolas Baietto : "Qui peut croire que le directeur de cabinet d'un ministre n'a aucun pouvoir?"

Parties civiles au procès, l'Etat et le CDR ont demandé le paiement solidaire de 525 millions d'euros de dommages et intérêts. Ils réclament en outre respectivement un million et 500.000 euros au titre du préjudice moral.

(avec AFP et Reuters)