Fraude fiscale : le plan de l'exécutif pour mieux chasser les fraudeurs

Par latribune.fr  |   |  562  mots
Selon le syndicat Solidaires Finances publiques, la fraude fiscale coûterait entre 60 et 80 milliards d'euros chaque année à la France. (Crédits : REGIS DUVIGNAU)
Un nouveau projet de loi anti-fraude doit être présenté, ce mercredi, en Conseil des ministres. Le texte prévoit de renforcer l'arsenal judiciaire hexagonal afin de lutter plus efficacement contre l'évasion fiscale, étend la possibilité de rendre public le nom des grands fraudeurs, mais ne remet pas en question le monopole de Bercy en matière de poursuites pénales.

Le gouvernement veut s'attaquer à la fraude fiscale. Le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin va présenter son projet de loi anti-fraude fiscale, ce mercredi, en Conseil des ministres, présenté comme la contrepartie de la loi sur le droit à l'erreur et des baisses d'impôts adoptées à l'automne. Il doit muscler les outils de l'administration dans la traque des gros fraudeurs fiscaux.

"Nous souhaitons bien distinguer les gens de bonne foi des fraudeurs", précise l'entourage du ministre. "L'objectif, c'est d'être plus efficace dans la lutte contre la fraude", ajoute-t-on.

Si ces dernières années, plusieurs mesures ont été adoptées pour rendre la traque des fraudeurs plus efficace, à l'image de la loi sur la lutte contre la fraude fiscale, votée dans le sillage de l'affaire Cahuzac, la série d'affaires révélées par la presse, des Panama papers aux Swissleaks, a montré qu'il existait encore des failles. Selon le syndicat Solidaires Finances publiques, la fraude fiscale coûterait entre 60 et 80 milliards d'euros chaque année à la France.

Ce nouveau texte sera débattu "avant l'été" au parlement, en vue d'une adoption définitive au début de l'automne, a indiqué Bercy.

Une police fiscale à Bercy

Le texte devrait comprendre la création d'un service d'enquête spécialisé au sein de Bercy, qui pourra être saisi par le parquet national financier (PNF) pour les affaires nécessitant une expertise fiscale pointue.

"Aujourd'hui, on bute sur des capacités d'enquête", souligne l'entourage de M. Darmanin, qui précise que 260 affaires sont aujourd'hui en attente d'un traitement judiciaire. "Cela permettra à la justice d'avancer", notamment "sur les dossiers complexes".

Depuis 2010, cette compétence était réservée à la Brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF), directement rattachée au ministère de l'Intérieur. Ce nouveau service, à compétence nationale et dirigé par un magistrat, sera doté entre 30 à 50 inspecteurs ou contrôleurs des impôts, sous statut d'officier fiscal judiciaire. Concrètement, ils auront la même formation et les mêmes pouvoirs que des policiers.

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Le "name and shame"

Mais la principale nouveauté devrait être la publication du nom du fraudeur obligatoire en cas de condamnation pénale, sauf décision expresse du juge, et la création d'une procédure de plaider coupable pour les fraudeurs poursuivis au pénal et disposés à reconnaître leurs torts. Jusqu'à présent, les redressements fiscaux étaient couverts par une strict secret fiscal.

Bercy semble donc décidé à appliquer ce qu'on appelle le "name and shame" ("nommer et faire honte", en français), autrement dit, faire de la publicité sur les sanctions données aux gros fraudeurs en les nommant explicitement.

Le "verrou de Bercy" toujours fermé ?

Rien n'est, en revanche, prévu concernant le fameux "verrou de Bercy", la mission parlementaire chargée de réfléchir à ce sujet épineux n'ayant pas encore rendu ses travaux.

Contesté, il octroie au ministère des Finances les pleins pouvoirs pour déclencher des poursuites judiciaires pour fraude fiscale. Comment ça marche ? Le fisc saisit la Commission des infractions fiscales (CIF) qui décide ensuite de transmettre ou pas le dossier à la justice. Cette petite "sélection", bien que la CIF n'invalide que 5% des plaintes, a toujours fait débat.

(Avec AFP)