Paris sera la référence de la ville intelligente co-construite

Par Jean-Pierre Gonguet  |   |  871  mots
La première maquette du Wikibuiding
Plus de 600 équipes du monde entier ont déjà déposé un projet pour "Réinventer Paris". C’est au cœur de la démarche que Jean-Louis Missika va présenter pour faire de Paris la référence mondiale de la ville intelligente d’ici à 2020. Exemple de la méthode avec le Wikibuilding.

815 équipes du monde entier étaient en lice pour "Réinventer Paris". Plus de 600 avaient déjà déposé ces derniers jours leur projet pour l'un des 23 sites proposés à la "réinvention" par la mairie de Paris. Pour chaque site, 3 ou 5 projets vont être "short-listés" et, à la fin de l'année, un jury international désignera les lauréats.

La dynamique est impressionnante et il se dit même que Boris Johnson, le maire de Londres, pourrait, pour une fois, copier Paris.

"Réinventer Paris" est aussi l'un des axes essentiels du plan stratégique "Paris intelligent et durable, perspective 2020 et au-delà" que va présenter Jean-Louis Missika au Conseil de Paris d'ici à quelques semaines.

Il va rassembler ce qui a déjà été lancé en matière de ville intelligente et, surtout, va définir le fonctionnement de la co-construction de Paris pour en faire la référence mondiale de la ville intelligente "en 2020 et au-delà". La ville intelligente, c'est de l'innovation, et Paris a déjà mis en place un écosystème d'innovation performant ; il va être renforcé, la ville intelligente devrait en être boostée.

La "Parisian Touch", c'est l'ouverture au plus grand nombre

La philosophie ? La "Parisian Touch" :  Paris sera une ville "ouverte" qui "encourage la participation citoyenne, l'ouverture des données, la co-construction des projets, le soutien à l'écosystème de l'innovation et le croisement des réseaux".

Et c'est une démarche singulière : beaucoup de métropoles mondialisées s'en remettent trop au numérique pour résoudre leurs problèmes d'urbanisation, de transports, de pollution ou de sécurité.

Anne Hidalgo a toujours pensé l'inverse : il faut ouvrir les données et les politiques au plus grand nombre au lieu de les confier à un seul acteur.

Les acteurs de la ville, bâtiment, informatique, déchets, GAFA, etc., ont toujours eu un peu de mal à comprendre pourquoi, à Paris, on ne leur donne pas les clés du camion pour la construire eux-mêmes, cette ville intelligente de 2020.

Mais ils vont s'y faire. Pour la plupart, ils participeront aux groupes de travail et de discussion qui seront lancés dans les prochains mois. Ils ont compris qu'Anne Hidalgo ne changerait pas d'avis et qu'elle n'avait peut-être pas tout à fait tort. "Réinventer Paris" le montre. Par exemple, avec l'idée du Wikibuilding. Nul ne sait s'il sera lauréat, mais il a déjà gagné : il est né de la rencontre d'architectes, d'urbanistes, de promoteurs, de spécialistes de la mobilité et de quelques rêveurs numériques à cause du concours "Réinventer Paris".

Il y a deux mois, La Tribune avait expliqué la philosophie du projet. Aujourd'hui, il tient vraiment debout. Et, avant la fin de l'année, les démos auront fait le tour de l'Europe et seront même allées en Chine.

Concevoir des bâtiments comme des plates-formes numériques

L'Open Innovation est centrale dans le Wikibuilding. C'est un bâtiment qui est pensé comme une plateforme pour que l'intelligence des professionnels de tous bords puisse fonctionner de manière collaborative. C'est un type de bâtiment qui se construit avec l'agilité des startups, de manière collégiale et itérative, avec une multiplicité de points de vue et de solutions.

Tout s'y mélangera, de la startup à l'habitat, du Fab Lab à la conciergerie. C'est de l'architecture dans un monde numérique, destinée à être en complète évolution, tout est en Open source. C'est malin, c'est parisien et c'est surtout totalement et immédiatement exportable. Les porteurs du projet (l'agence Host et la start-up UFO) ont été, selon Alain Renk -l'un des initiateurs-, "étonnés par la manière dont les acteurs traditionnels du bâtiment, dans le cadre de Reinventer.paris, se sont mis à penser différemment. En brisant les silos métiers, en demandant à chacun des acteurs de l'équipe de conception de s'exprimer librement -tout le monde est architecte, acousticien ou ingénieur agronome...-, les réunions de co-conception avec le promoteur et le développeur fabricant ont donné lieu à de tels brainstormings que, dès la deuxième réunion, il a été impossible de faire des comptes-rendus classiques sans perdre 80% des échanges".

"Que ferait un Uber du logement ?"

L'idée était de construire un démonstrateur à petite échelle de la ville contributive à venir. Pour faire exister cette micro-ville contributive, les collaborations ont été lancées avec trois cercles de personnes : d'abord les concepteurs et bureaux d'études, ensuite les partenaires industriels, startups, académiques et associatifs et, enfin, la société civile.

Résultat : en moins de trois mois, un foisonnement d'innovations architecturales et économiques surprenantes. Au milieu, une idée un peu iconoclaste :

"Et si Uber se lançait dans les logements ? Le problème le plus apparent aujourd'hui, continue Alain Renk, est la pénurie de logements en France. Pourtant, un deuxième problème pourrait être pointé. L'inadéquation de l'offre de logements figés vis-à-vis de vies en mouvement et évolutives. Que ferait un Uber du logement ? Il réinventerait probablement des lieux mutables pluriels, facilement mutables, qui faciliteraient nos vies, bref, le contraire de ce que nous prenons aujourd'hui pour la norme."