Pass sanitaire : feu vert du Conseil constitutionnel sur la quasi totalité des mesures

Par latribune.fr  |   |  875  mots
Les Sages ont estimé que le pass sanitaire résulte d'une "conciliation équilibrée" entre libertés publiques et protection de la santé. (Crédits : Christian Hartmann)
Les Sages ont jugé conforme à la Constitution la proposition du gouvernement d'imposer des contrôles d'accès via un pass sanitaire pour lutter contre l'épidémie de Covid-19. Toutes ces mesures seront effectives en France jusqu'au 15 novembre. Et notamment pour l'accès aux cafés-restaurants, cars et trains longue distance, vols intérieurs ainsi que l'accès aux hôpitaux (mais là, avec des limites). De même, il valide l'obligation vaccinale pour les soignants et d'autres professions. Sinon, la rupture de CDD est retoquée, mais la suspension du contrat de travail sans rémunération est validée...

La décision était très attendue en France, mais la délibération rendue n'est pas une surprise. Alors que l'extension du pass sanitaire, annoncée par Emmanuel Macron lors de son allocution du 12 juillet fait débat, le Conseil constitutionnel a validé ce jeudi 5 août les points principaux de ce dispositif qui entrera donc en vigueur dans sa quasi totalité dès lundi prochain, le 9 août.

Les objections retoquées

Les Sages ont toutefois censuré plusieurs dispositions portant sur la rupture de certains contrats de travail, ainsi que le placement "automatique" à l'isolement. Et ils n'ont pas retenu ces trois objections: l'atteinte "disproportionnée" aux libertés, le problème des contrôles confiés à des serveurs de restaurant ou des contrôleurs de la SNCF, ni l'"obligation vaccinale déguisée".

Les juges constitutionnels ont estimé que l'isolement obligatoire des malades pour une période de 10 jours n'était pas "nécessaire, adapté" ni "proportionné".

Mais, dans l'ensemble, les Sages estiment que le pass sanitaire résulte d'une "conciliation équilibrée" entre libertés publiques et protection de la santé, dans une décision cruciale pour la mise en place prévue lundi de ce dispositif par le gouvernement.

Dans la foulée, Jean Castex s'est félicité de cette décision qui "permettra le plein déploiement de la stratégie de lutte contre la Covid-19", a estimé le Premier ministre.

Extension du pass sanitaire

Pour rappel, la présentation du pass sanitaire (attestant d'une double vaccination, ou test PCR négatif de moins de 48 heures ou certificat de rétablissement du Covid-19 de moins de six mois) doit s'étendre - après les lieux de culture et de loisirs - aux restaurants, bars, foires, salons professionnels, trains longue distance, cars longs trajets, vols intérieurs et, dans certaines limites, aux hôpitaux (lire plus bas).

Les jeunes entre 12 ans et 17 ans en sont exemptés jusqu'au 30 septembre.

Rupture de CDD retoquée, mais suspension du contrat de travail validée

Très critiquée en raison de la fragilisation du contrat de travail, la disposition qui devait permettre à un employeur de rompre "avant son terme" un CDD ou un contrat en intérim d'un salarié non vacciné a été retoquée.

"En prévoyant que le défaut de présentation d'un 'pass sanitaire' constitue une cause de rupture anticipée des seuls contrats à durée déterminée ou de mission, le législateur a institué une différence de traitement entre les salariés selon la nature de leurs contrats de travail qui est sans lien avec l'objectif poursuivi", indique le Conseil constitutionnel.

Le Conseil constitutionnel a en revanche validé la procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération. Les Sages ont jugé que la procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération pour les salariés concernés par l'obligation de pass sanitaire n'est pas contraire à la Constitution.

Ils observent notamment que la mesure est temporaire, l'obligation du pass ne courant que jusqu'au 15 novembre, que la suspension prend fin lorsque le salarié produit "les justificatifs requis" ou encore qu'un salarié peut se voir proposer un autre poste au sein de l'entreprise.

Hôpitaux: un pass sanitaire pour les patients non urgents, sauf si...

Le Conseil ne trouve également rien à redire à l'obligation vaccinale pour les soignants et d'autres professions en contact avec des personnes à risque.

Il a aussi validé l'obligation du pass pour les visiteurs ou les patients non urgents dans les établissements de santé (hôpitaux, cliniques...) et maisons de retraite tant que ce dernier ne fait pas "obstacle à l'accès au soins".

"La loi ne peut faire échec à l'accès aux soins", a précisé une source proche du Conseil constitutionnel, ajoutant que la décision sera laissée à "l'appréciation des soignants".

Pour les centres commerciaux, ce sera sur décision du préfet

Aussi, le Conseil constitutionnel a validé l'extension du pass à certains centres commerciaux "au-delà d'un certain seuil défini par décret" et si "la gravité des risques de contamination" à l'échelle d'un département le justifie.

L'autorité préfectorale pourra ainsi mettre en place le pass sanitaire dans les grands magasins et centres commerciaux tout en garantissant "l'accès des personnes aux biens et services de première nécessité ainsi qu'aux moyens de transport accessibles dans l'enceinte de ces magasins et centres", selon la loi adoptée le 25 juillet par le Parlement et validée par le Conseil Constitutionnel.

Le gouvernement avait annoncé mi-juillet que seuls les centres commerciaux d'une superficie supérieure à 20.000 mètres carrés devraient être concernés.

Les Sages de la rue de Montpensier avaient été saisis par le gouvernement et par trois groupes parlementaires après l'adoption du texte par députés et sénateurs le 25 juillet au terme de six jours de débats houleux et plusieurs inflexions.

Face au pass, la contestation ne retombe pas. La dernière manifestation samedi dernier contre ce dispositif a réuni quelque 200.000 personnes dans l'Hexagone, et des appels ont déjà été lancés pour samedi prochain à travers la France.

(avec AFP)

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