Migrants : le gouvernement australien a-t-il payé des passeurs ?

Par latribune.fr  |   |  545  mots
Ne souhaitant pas commenter l'affaire, le Premier ministre australien a préféré annoncer que le gouvernement était déterminé à "stopper les bateaux par n'importe quel moyen".
Canberra est accusé d'avoir versé plusieurs milliers de dollars à des passeurs de migrants pour qu'ils emmènent ces derniers en Indonésie plutôt qu'en Australie. Après avoir démenti cette allégation, deux ministres n'ont pas réitéré le démenti lors d'un débat à l'assemblée.

Tout est parti de quelques déclarations. Le capitaine d'un navire et deux membres d'équipage, soupçonnés de se livrer au trafic d'êtres humains, ont affirmé à la police indonésienne que les autorités australiennes leur avaient versé à chacun 5.000 dollars australiens (environ 3.430 euros) pour qu'ils fassent demi-tour et ramènent vers les côtes indonésiennes les 65 migrants qu'ils acheminaient vers l'Australie.

D'emblée, la ministre australienne des Affaires étrangères, Julie Bishop, et Peter Dutton, ministre de l'Immigration avait démenti, vendredi 12 juin. Mais le Premier ministre australien Tony Abbott n'avait pas émis le moindre commentaire. Interrogé le lendemain lors d'une interview radio, il était à nouveau resté muet sur l'affaire mais précisait que le gouvernement était déterminé à "stopper les bateaux par n'importe quel moyen".

Tancés par l'opposition

Lundi 14 juin, l'opposition a violemment tancé le gouvernement australien, en particulier le Premier ministre:

"En s'abstenant de démentir les informations selon lesquelles des trafiquants criminels peuvent être payés jusqu'à 30.000 dollars, le gouvernement n'est-il pas en train d'inciter financièrement à ces traversées dangereuses ?", a demandé Bill Shorten, le chef de l'opposition.

Julie Bishop et Peter Dutton n'ont pas réitéré leurs dénégations, cette fois-ci, restant sur la ligne du Premier ministre.

Le gouvernement jette l'opprobre sur l'Indonésie

Le gouvernement australien a choisi de rejeter la faute sur l'Indonésie qui a exigé des explications claires sur cette affaire. Interviewée samedi, Julie Bishop avait déclaré:

"La meilleure façon pour l'Indonésie de résoudre ses problèmes est de durcir sa politique migratoire au-delà de ses frontières (terrestres)."

Par cette déclaration, la ministre australienne des Affaires étrangères faisait référence à la politique migratoire australienne drastique qui stoppe notamment régulièrement les bateaux des trafiquants au-delà des côtes australiennes pour les expulser ensuite vers des centres de rétention en Papouasie-Nouvelle-Guinée et sur la petite île de Nauru.

En Europe, Bruxelles veut plus de prise en charge des migrants

En Europe, la situation est en apparence plus favorable aux migrants, à l'exception des Britanniques qui sont les Européens les plus ouvertement contre. Ainsi, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a présenté mercredi un plan d'action pour l'immigration et l'asile, immédiatement rejeté par la Grande-Bretagne, opposée à toute solidarité pour la prise en charge des migrants et des réfugiés.

"Les migrants qui tentent de gagner l'Union européenne en traversant la Méditerranée devraient être renvoyés", a affirmé dans les médias britanniques la ministre de l'Intérieur, Theresa May, reconduite dans ses fonctions par David Cameron après sa victoire aux législatives. Quelques heures avant la présentation du plan de Jean-Claude Juncker, la Britannique insistait:

"Je suis en désaccord avec Federica Mogherini (la chef de la diplomatie européenne, Ndlr) quand elle soutient qu'aucun migrant ou réfugié intercepté en mer ne sera renvoyé contre son gré." (...)  "Une telle approche ne peut qu'encourager plus de gens à risquer leur vie."

Le plan d'action adopté mercredi 10 juin par la Commission européenne veut éviter les embarquements, secourir les migrants qui ont pris la mer et gérer leur accueil à leur arrivée dans l'Union européenne.