Pétrole : Washington s'inquiète de l'offre, l'AIE révise à la baisse la demande

Par latribune.fr  |   |  601  mots
Joe Biden s'inquiète de l'opinion des automobilistes américains quand ils passent à la pompe, un indicateur toujours significatif pour la cote de popularité d'un président états-unien. (Crédits : Reuters)
L'administration Biden a appelé l'Opep+ a alimenté davantage le marché pétrolier pour faire baisser des cours du baril qui ont doublé en presque 9 mois. Il n'est pas sûr que l'organisation réponde favorablement. Selon le dernier rapport mensuel de l'AIE, qui a révisé à la baisse son estimation de la demande mondiale en 2021, en raison de la propagation du variant Delta, le marché pourrait même être excédentaire en 2022.

Depuis son dernier point le plus bas, fin octobre 2020, le cours du pétrole WTI, la référence américaine, s'est apprécié de quasi 100%, évoluant autour de 70 dollars ces derniers jours, après avoir touché les 75 dollars la semaine dernière. Jeudi, en fin d'après-midi, il s'affichait à 69,10, en léger retrait (-0,20%).

Cette hausse a poussé mercredi l'administration Biden a critiqué l'Opep et ses 10 alliés, l'Opep+, lui reprochant de "ne pas en faire assez" pour fournir suffisamment le marché, ce qui représente, selon la Maison Blanche, une menace pour la reprise de l'économie mondiale qui peine à sortir de la crise sanitaire.

Joe Biden, qui vient de voir accepté par le sénat son plan de relance de 1.200 milliards de dollars pour soutenir l'économie, s'inquiète visiblement de l'opinion des automobilistes américains quand ils passent à la pompe, un indicateur toujours significatif pour la cote de popularité d'un président états-unien.

Modeste hausse de l'offre de l'Opep+

De son côté, l'organisation n'a augmenté que modestement sa production depuis le début de l'année après l'avoir drastiquement coupée l'an dernier, pour faire remonter les cours. Selon le rapport mensuel de l'Agence internationale de l'énergie, publié ce jeudi, "si tout se passe comme prévu, la production de pétrole de l'Opep+ devrait augmenter de 2 millions de barils par jour (mbj) d'ici la fin de 2021", estime l'agence, qui prévoit que "pour l'ensemble de l'année 2021, la production totale de l'Opep+ devrait augmenter de 1,2 mbj en moyenne, contre une baisse de 5,5 mbj l'année dernière".

Pour autant, considère l'AIE, "le marché pétrolier pourrait encore être légèrement déficitaire au quatrième trimestre cette année". Selon ses projections, qui intègre les pays producteurs de l'Opep+ mais aussi les pays non membres de l'Opep+, ce déséquilibre serait de 200.000 bj pour la fin de l'année.

La reprise de la demande de brut devrait en effet ralentir sur le reste de l'année après avoir brusquement chuté en juillet en raison de la propagation du variant Delta du coronavirus.

L'AIE évalue la chute de la demande à 120.000 barils par jour (bpj) le mois dernier et prévoit que la demande sera inférieure d'un demi-million de bpj au second semestre par rapport à son estimation du mois dernier, soulignant que certains changements étaient dus à des révisions de données.

Ainsi, dans son rapport, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) a révisé à la baisse son estimation de la demande mondiale pour 2021 "en raison de la détérioration de la situation sanitaire due à la progression de la pandémie". Elle table désormais sur 96,2 mbj en 2021, soit 5,3 mbj de plus qu'en 2020. En 2022, les besoins mondiaux devraient encore augmenter de 3,2 mbj.

Pouvoir de marché

En attendant de connaître la position du cartel, la demande de Washington est une façon d'admettre que "seule l'Opep+ a actuellement la capacité d'augmenter de manière significative l'offre de pétrole dans le monde, ce qui lui confère un grand pouvoir sur le marché", a estimé Carsten Fritsch, analyste chez Commerzbank, cité par l'AFP.

Surtout, l'organisation veut éviter à tour prix une dégringolade des cours en cas d'excédent de l'offre, comme cela a pu arriver dans le passé.

Loin de partager les craintes de l'administration Biden, l'AIE estime pour sa part que le marché pourrait même "redevenir excédentaire en 2022" si l'Opep+ continue à abandonner ses restrictions de production, et si les autres pays producteurs hors cartel pompent davantage de brut pour profiter de cours plus élevés.