Accord migratoire en Allemagne : Merkel sauve sa coalition, mais reste fragilisée

Par latribune.fr  |   |  574  mots
Après presque 13 ans au pouvoir, Angela Merkel doit redoubler d'efforts pour restaurer son autorité et consolider sa fragile coalition gouvernementale, entre son parti de centre-droit CDU, la droite bavaroise CSU et les sociaux-démocrates. (Crédits : Reuters)
La chancelière allemande Angela Merkel a réussi à sauver, lundi 2 juillet au soir, in extremis, son gouvernement en trouvant un compromis avec son ministre de l'Intérieur Horst Seehofer (CSU) pour restreindre le nombre de demandeurs d'asile en Allemagne. Le compromis prévoit la mise en place de "centres de transit" à la frontière entre l'Allemagne et l'Autriche. Mais la coalition gouvernementale reste menacée : le troisième partenaire, le parti social-démocrate, doit encore dire s'il accepte les termes de l'accord.

Voilà Angela Merkel réjouie. La chancelière allemande est parvenue à préserver sa coalition en concluant, lundi soir, à l'arraché, un compromis avec son ministre de l'Intérieur (rebelle) Horst Seehofer sur la politique migratoire. Il prévoit la mise en place de "centres de transit" à la frontière entre l'Allemagne et l'Autriche afin d'y installer les demandeurs d'asile arrivant dans le pays, mais déjà enregistrés dans un autre État européen, en attendant leur expulsion vers le pays d'entrée en Europe.

Hier, l'Allemagne était au bord de la crise politique dès lors que Horst Seehofer, qui réclamait un durcissement des conditions d'accueil des migrants en Allemagne, a proposé de démissionner de son poste de ministre de l'Intérieur ainsi que de la présidence de la CSU. Cela aurait pu déclencher de nouvelles élections et mettre Angela Merkel sur la touche. Mais malgré cet accord, la chancelière reste fragilisée : les sociaux-démocrates, troisième force la coalition, hésitent encore à le soutenir.

Une victoire en demi-teinte

Contestée par son allié conservateur bavarois de la CSU, Angela Merkel a, en apparence, obtenu une victoire en sauvant son gouvernement - une coalition composée du centre-droit CDU, de la droite bavaroise CSU et des sociaux-démocrates -, et en se maintenant au pouvoir. Mais sur le fond, elle a accepté de fortes restrictions à l'immigration. Le compromis trouvé avec le chef de file de la droite conservatrice Horst Seehofer marque ni plus ni moins la fin de la politique migratoire généreuse inaugurée en 2015 par la chancelière. Cette année-là, Angela Merkel avait décidé de laisser entrer sur le territoire allemand des milliers de réfugiés syriens bloqués en Hongrie.

Pour l'un des proches du ministre de l'Intérieur, Markus Blume, l'accord conclu lundi constitue "un tournant de la politique d'asile" allemande. Si Horst Seehofer s'en est forcément félicité - "il s'agit d'un accord clair sur la façon d'empêcher l'immigration illégale aux frontières entre l'Allemagne et l'Autriche" -, le troisième partenaire de la coalition gouvernementale, le parti social-démocrate SPD, fait la moue. Ce dernier, hésitant, doit encore se prononcer en faveur ou non de cet accord. S'il le rejette, la coalition gouvernementale est à nouveau sérieusement menacée.

L'Autriche menace d'en faire de même avec ses frontières du Sud

L'Autriche, première concernée par ce revirement de la politique migratoire allemande, a déjà fait savoir qu'elle ne se satisfaisait pas des termes du compromis.

Car en principe, les renvois de migrants doivent se faire en accord avec les pays d'entrée et non de manière unilatérale par l'Allemagne. Mais si des accords ne peuvent être trouvés, il est prévu de refouler les migrants vers l'Autriche. Le gouvernement autrichien, qui associe l'extrême-droite et les conservateurs, et qui vient de prendre la présidence tournante de l'Union européenne, a prévenu qu'en pareil cas, il prendrait des mesures identiques à ses propres frontières, notamment avec l'Italie et la Slovénie. Avec le risque d'un effet domino en Europe.

"Si l'Allemagne croit qu'ils peuvent simplement renvoyer des gens en Autriche, en bafouant le droit international, nous expliquerons aux Allemands que nous ne les accueillerons pas", a prévenu la semaine dernière le ministre de l'Intérieur autrichien Herbert Kickl.

 (avec AFP et Reuters)