UE : Bruno Le Maire devra faire des coupes dans le budget 2018

Par Florence Autret, à Bruxelles.  |   |  703  mots
Bruno Le Maire participe ce lundi à sa première réunion des ministres des finances de la zone euro
La trajectoire budgétaire devra être revue si la France veut éviter une nouvelle menace de sanctions. Cela n'a pas empêché Paris de reprendre la main, de concert avec Berlin, sur la réforme de la zone euro.

Pour sa première visite à Bruxelles ce lundi, le nouveau ministre de l'économie a reçu de celui qui a occupé sa place jadis à Bercy et est l'actuel commissaire à l'euro, Pierre Moscovici, quelques conseils de politique économique... et un avertissement budgétaire.

Paris n'est pas dans les clous

La France devra produire "un effort substantiel en 2018", avertit la Commission européenne qui note :

 "à politiques inchangées, il est prévu que le déficit s'élève à 3,2%", en 2018.

En clair : à l'heure qu'il est, la France ne respecterait pas ses engagements. L'effort à produire pour revenir "dans les clous" s'élèverait à 0,6% en 2018, sous peine de "déviation importante". Bruxelles s'inquiète aussi que la baisse du besoin de financement de l'Etat "repose prioritairement sur une amélioration du cycle économique et la persistance d'un environnement de taux bas, qui ne sont pas sous la maîtrise des autorités" françaises, ajoute-t-elle.

Bref! Pour l'instant Paris n'est pas en ligne et si le nouveau gouvernement a le bénéfice du doute, il devra donner des gages à l'automne prochain quand la Commission examinera le projet de budget 2018.

Lourdeur administrative et fiscale pointées du doigt

Sur le front des "réformes structurelles", les faiblesses pointées et les réformes recommandées sont sans grande surprise. La France devrait "réduire le coût du travail", "élargir la base fiscale" et prendre des mesures supplémentaires pour "mettre en oeuvre la réduction prévue du taux d'imposition des sociétés". Les profits sont actuellement taxés à 38,4% en France, mais la Commission prend note de l'engagement de baisser le taux légal à 28% en 2020.

Sans être l' "homme malade" de l'Europe, la France affiche des performances souvent inférieures à la moyenne européenne. Le chômage y est par exemple 1% supérieur, à 10,1%. Et les coûts administratifs liés à la croissance des entreprises, particulièrement pour passer les seuils de 10 et de 50 salariés, s'avèrent nettement plus élevés qu'ailleurs, ce qui explique aux yeux de la Commission la difficulté à créer un équivalent français du "Mittelstand" allemand, ce réservoir de moyennes entreprises qui assurent sa compétitivité.

Paris et Berlin prennent l'initiative pour réformer la zone euro

Le ministre de l'économie n'a pas commenté ces recommandations à son arrivée à Bruxelles. Il arrivait de Berlin où il venait de rencontrer son homologue Wolfgang Schäuble qu'il a accompagné en avion.

Les deux hommes ont pris de cours la Commission européenne en annonçant la création d'un groupe de travail franco-allemand sur la gouvernance de la zone euro. L'exécutif européen doit, lui, présenter la semaine prochaine une version mise à jour de sa feuille de route. Il lui avait été reproché de ne pas avoir elle-même créer un groupe d'experts, comme pourtant l'y avait invitée les chefs d'Etat et de gouvernement.

"Pour parvenir à une réelle convergence économique... une coordination et une intégration accrues des politiques économiques sont nécessaires", ont dit les deux ministres dans un communiqué commun.

Ni l'Allemand, ni le Français n'ont donné de détail sur ce qu'ils entendaient précisément promouvoir. La convergence est précisément tout l'enjeu des recommandations qui venaient d'être présentées par la Commission européenne et fait déjà l'objet de centaines de pages de législation.

"Nous ne pouvons que nous réjouir que deux grands pays de la zone euro adoptent une position commune", a commenté Pierre Moscovici à l'annonce de cette initiative, tout en invitant à ne pas inclure rapidement les autres pays dans la réflexion. "Il faut que tout le monde se reconnaisse dans ce processus", a-t-il ajouté.

Le commissaire européen a défendu le système existant de contrôle des règles. "Le Pacte de stabilité et de croissance a réussi par la règle et aussi la conviction et le dialogue à rendre nos économies plus saines", a-t-il assuré, alors que le Portugal et la Croatie venaient de voir abroger la procédure en déficit excessif qui les frappait. Seuls 4 pays, dont la France et l'Espagne restent sous surveillance rapprochée. Ils étaient 24 après 2009.

Mis à jour à 20h20