Le patron de Titan reprend la plume, Washington tente de calmer le jeu

Par MT  |   |  710  mots
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Duel épistolaire, round 3. Le patron de Titan, Maurice M.Taylor a renvoyé une réponse cinglante à Arnaud Montebourg jeudi soir. Le département d'Etat américain, par la voix d'une porte-parole a tenté de calmer les esprits en rappelant les très anciens liens entre la France et les Etats-Unis. Ce vendredi, Maurice Taylor a persisté, se demandant si le ministre était "stupide" et le qualifiant d' "imbécile".

Liaisons dangereuses. Entre le PDG du fabricant de pneus américain Titan et Bercy, l'orageuse relation épistolaire se poursuit. Maurice Taylor a renvoyé un courrier au ministre du Redressement productif jeudi soir. Depuis la publication d'une première lettre au vitriol le 19 février, il maintient ses propos dans de nombreux entretiens à la presse. "Mais pourquoi il m?embête avec ça votre ministre? Il est stupide ou quoi? On parle de l?usine Goodyear et il s?adresse à moi. Vous devriez poser vos questions à cet imbécile!", a-t-il ainsi tempêté au micro d'Europe 1 ce vendredi.

La veille, la réponse écrite d'Arnaud Montebourg, qui qualifie ses propos "d'extrémistes" l'ont incité à reprendre la plume. Florilège d'une prose qui devrait raviver encore un peu la polémique...

"Votre gouvernement [manque] de connaissance sur la façon de bâtir une entreprise"

Maurice Taylor y attaque à nouveau le gouvernement Français. "L'extrémiste Monsieur le ministre, c'est votre gouvernement et son manque de connaissances sur la façon de bâtir une entreprise. A aucun moment, Titan n'a demandé de baisser les salaires. Nous avons juste dit que si on voulait être payé pour sept heures de travail, il fallait en travailler au moins six", écrit-il, en référence aux "trois heures" de travail quotidien qu'effectueraient les employés de l'usine Goodyear d'Amiens-Nord, dont son entreprise avait étudié la reprise d'une partie de l'activité.

Il attribue un peu plus loin la responsabililité du chômage en France à l'équipe au pouvoir par cette question réthorique: "Pourquoi le chômage est-il si élevé en France, et particulièrement chez les jeunes? C'est à cause de la politique de votre gouvernement, monsieur."

"Les barjots du syndicat communiste"

Maurice Taylor, un habitué des coups d'éclat, reprend également ses attaques contre les syndicats. "Votre gouvernement a laissé les barjots du syndicat communiste détruire les emplois les mieux rémunérés", clame-t-il. Dans sa première lettre, le patron de Titan international avait qualifié les représentants du personnel de "fous".

"J'ai eu plus de commentaires positifs que négatifs"

Plus loin, le PDG, remercie ironiquement le ministre "d'avoir fait fuiter [sa] lettre". Sa première missive, datée du 8 février, avait été publiée par Les Echos et le Canard Enchaîné le 19 février. "J'ai eu plus de commentaires positifs que négatifs" s'amuse-t-il, évoquant "beaucoup de compatriotes, hommes et femmes", qui seraient d'accord avec ses propos sur la "passivité [d'Arnaud Montebourg] face à l'afflux en France de produits provenant de Chine et d'Inde".

Un peu plus loin, Maurice Taylor affirme ne pas être "la bonne personne avec qui croiser le fer". "Je ne sais pas trop ce que valent vos politiciens, mais je ne suis pas la bonne personne avec qui croiser le fer. Votre équipe aurait dû s'en apercevoir en faisant des recherches sur Internet."

Francophobe Maurice Taylor?

Sur la France, "Morry" Taylor dit apprécier les "belles femmes" et le "vin fantastique". Il affirme avoir été baptisé Maurice en mémoire du chanteur français Maurice Chevalier, et avoir prononcé de nombreux discours "pour remercier les Français et Lafayette" lors de sa campagne pour les primaires républicaines avant l'élection présidentielle de 1996. Et de conclure par une référence au Débarquement: "J'ai visité la Normandie avec ma femme. Je sais ce que nous avons fait pour la France."

Washington intervient...

Peu avant la publication de cette nouvelle lettre, la diplomatie américaine s'est exprimée sur cette querelle. "Cela ressemble à une affaire privée et pas à une question entre deux gouvernements. Mais vous connaissez notre relation avec la France, notre plus vieille alliée, nos liens larges et profonds, notamment avec beaucoup d'entreprises américaines qui réussissent en France et beaucoup d'entreprises françaises qui réussissent aux Etats-Unis", a ainsi commenté la porte-parole du département d'Etat, Victoria Nuland.

En réponse à une question sur les affirmations du "Grizzly" à l'encontre de travailleurs français jugés fainéants, la porte-parole s'est montrée beaucoup moins affirmative. "J'ai une affection particulière pour la France, je crois que je vais en rester là", a-t-elle répondu en souriant. Une intervention qui n'a visiblement pas calmé le patron américain...