PEA-PME : les sociétés qui en profiteront ne sont pas (forcément) celles qui en ont besoin

Par Christine Lejoux  |   |  702  mots
Le PEA-PME devrait apporter 2 milliards d'euros aux "small et mid caps" françaises, en 2014, selon les prévisions du gouvernement. REUTERS.
42 sociétés, essentiellement dans le secteur des services aux entreprises, ne sont pas éligibles au PEA-PME, en raison des critères retenus par le gouvernement, qui ne tiennent pas compte de la capitalisation boursière.

Dans un mois et demi, les entreprises de taille moyenne disposeront d'une source de financement supplémentaire, avec l'entrée en vigueur du PEA-PME, le 1er janvier 2014. Pour mémoire, ce dispositif - adopté le 14 novembre par l'Assemblée nationale, et destiné à réorienter l'épargne des Français vers le financement de l'économie réelle - permettra aux particuliers d'investir - en direct ou via la souscription de parts de fonds communs de placement - jusqu'à 75.000 euros dans des titres de PME et d'ETI (entreprises de taille intermédiaire) françaises et, plus largement, européennes, cotées en Bourse ou non.

 Reste que les sociétés éligibles au PEA-PME ne sont pas forcément celles que l'on croit, tout au moins pour celles qui sont cotées à la Bourse de Paris.

 Les SSII ne sont pas éligibles au PEA-PME

 En effet, les critères d'éligibilité au PEA-PME définis par le gouvernement ne tiennent pas compte du seuil de 1 milliard d'euros de capitalisation boursière, en dessous duquel une entreprise est considérée par les gérants de fonds comme une valeur moyenne ou petite (mid ou small cap, en anglais).

Les critères retenus par le gouvernement sont en effet ceux utilisés par l'Insee pour définir les PME et les ETI. A savoir des sociétés employant moins de 5.000 collaborateurs, réalisant moins de 1,5 milliard d'euros de chiffre d'affaires annuel ou dont le total de bilan n'excède pas deux milliards d'euros.

 Conséquence,

"les sociétés de services informatiques (SSII), les sociétés d'intérim et, plus généralement, les entreprises de services, ne seront pas éligibles au PEA-PME, tout simplement parce qu'elles emploient beaucoup de main d'œuvre",

s'exclame Sébastien Faijean, directeur associé au sein du bureau d'analyses financières IDMidcaps. L'exemple de Steria est édifiant : la SSII pèse 472 millions d'euros seulement à la Bourse de Paris, mais emploie quelque 19.000 collaborateurs, un nombre près de quatre fois supérieur au seuil de 5.000 retenu par le gouvernement. Elle n'est donc pas éligible au PEA-PME.

 42 sociétés sont exclues du PEA-PME, leur effectif dépassant 5.000 personnes

 Même punition pour sa concurrente Steria, dont la capitalisation boursière se limite à 827 millions d'euros, mais qui compte 14.000 salariés environ. Leur rivale GFI, qui vaut 265 millions d'euros seulement en Bourse, n'aura pas non plus droit au PEA-PME, ses effectifs se montant à 9.000 personnes.

 Pour le même motif, les sociétés d'intérim Synergie et Groupe Crit ne sont pas non plus éligibles au PEA-PME, pas plus que l'équipementier automobile MGI Coutier ou le transporteur Norbert Dentressangle. Au total, 42 sociétés sont ainsi exclues du PEA-PME. "C'est dommage car ces entreprises créent des emplois et sont fiscalisées en France", regrette Sébastien Faijean.

 Le PEA-PME devrait apporter 2 milliards aux "small et mid caps" en 2014

 A l'inverse, des poids lourds de la cote parisienne, comme le groupe de vins et spiritueux Rémy Cointreau ou l'opérateur de satellites Eutelsat, qui pèsent respectivement 3,7 milliards et 4,9 milliards d'euros en Bourse, sont, eux, éligible au PEA-PME.

Ce qui est "contradictoire", estime Sébastien Faijean, ces sociétés n'étant pas celles qui ont le plus besoin des deux milliards d'euros que le PEA-PME devrait apporter dès 2014 au segment des valeurs petites et moyennes de la Bourse de Paris, selon les prévisions du gouvernement.

71% des sociétés de gestion prévoient de lancer au moins un fonds PEA-PME

 Une collecte de deux milliards qui, sur la base du flottant [part du capital réservée au public ; Ndlr] de 22 milliards d'euros des sociétés du CAC Mid & Small, devrait déboucher sur une hausse de 7% à 8% de cet indice, d'après les calculs de IDMidcaps. Indice qui affiche déjà une progression de 24% depuis le début de l'année, supérieure à celle du CAC 40, l'indice vedette de la Bourse de Paris (+18%).

 Face à cette perspective de gain supplémentaire, les sociétés de gestion se préparent : 71% d'entre elles projettent de lancer au moins un fonds PEA-PME, d'après un sondage publié le 19 novembre par la société d'analyses d'investissements Morningstar.