Nouveau cataclysme dans la finance mondiale après la fraude de 50 milliards de dollars

Par latribune.fr  |   |  1033  mots
Natixis, BNP Paribas, Crédit Mutuel-CIC, Axa, Santander et BBVA ont déjà chiffré leur exposition à la fraude présumée de 50 milliards de dollars de Bernard Madoff. HSBC vient de faire de même. Cette nouvelle tempête financière touche un secteur déjà ébranlé par la chute de Lehman Brothers.

Seulement trois mois après la faillite de Lehman Brothers, la planète finance n'avait pas besoin d'un nouveau cataclysme. C'est pourtant ce qui est en train de se produire avec la fraude présumée de 50 milliards de dollars, qui est en passe de devenir le plus gros scandale financier de l'histoire. Partout dans le monde, les annonces de pertes potentielles liées au scandale se multiplient.

En France, Natixis et BNP Paribas semblent les principales victimes de cette fraude pyramidale hors norme. Ce lundi matin, la filiale des groupes Caisses d'Epargne et Banque Populaire a déclaré y être exposée indirectement à hauteur de 450 millions d'euros via les placements de certains de ses clients.

Dimanche soir, la banque BNP Paribas a confirmé dans un communiqué qu'elle pourrait perdre 350 millions d'euros. Elle a précisé ne pas avoir investi directement dans les fonds spéculatifs du gérant, mais être exposée via "ses activités de marchés" et les prêts accordés à certains fonds, qui ont, eux, en revanche investi dans les "hedge funds" de l'Américain.

De leur côté, la Société Générale et le Crédit agricole ont fait savoir que leur exposition à la fraude était "négligeable, inférieure à 10 millions d'euros. Et l'assureur Axa évoque tout de même une exposition nette "bien inférieure" à 100 millions d'euros. Enfn, la banque franco-belge Dexia pourrait perdre 85 millions d'euros.

 

Le groupe bancaire français Crédit Mutuel-CIC pourrait perdre jusqu'à 90 millions d'euros au maximum dans la fraude, a-t-il annoncé mardi dans un communiqué. Le groupe explique n'avoir pas investi directement dans des fonds gérés par Bernard Madoff, mais qu'il "pourrait se trouver affecté" indirectement par cette escroquerie. Il reconnaît qu'il est "difficile à ce jour d'avoir une vue précise de tous les éléments" mais assure qu'il "entend exercer toutes les voies de recours" dont il dispose pour recouvrer son capital.

 

Un impact supérieur à la faillite de Lehman Brothers en Espagne

En Espagne, ça va beaucoup plus mal pour la première banque du pays, Santander. Celle-ci a précisé hier que les clients de son fonds spéculatif Optimal étaient exposés à hauteur de 2,33 milliards d'euros à la "fraude Madoff". Elle-même a affirmé avoir investi 17 millions d'euros pour son propre compte dans des produits du gérant de fonds, ex-star de Wall Street.

La seconde banque du pays, BBVA, vient d'annoncer qu'elle pourrait subir 300 millions d'euros de pertes. Cette nouvelle vient contredire le communiqué du groupe diffusé en fin de semaine dernière et dans lequel il indiquait ne pas avoir commercialisé auprès de ses clients des "produits gérés" par la société du gérant de fonds new-yorkais. D'après "El Pais", BBVA est toutefois affecté par la fraude présumée via de achats réalisés par son département de trésorerie.  L'impact de cette affaire sur le monde de la finance espagnole devrait dépasser celui de la faillite de Lehman Brothers en septembre.

En Italie, la première banque du pays, UniCredit, estime son exposition à 75 millions d'euros.

La banque néerlandaise Fortis a annoncé lundi qu'elle pourrait perdre jusqu'à 1 milliard d'euros. Et la banque privée autrichienne Medici est exposée à hauteur de 2,1 milliards de dollars d'investissements dans deux fonds internationaux frappés par la fraude présumée.

Les deux grandes banques suisses épargnées

La première banque européenne en revanche, HSBC, pourrait perdre un milliard de dollars (743 millions d'euros), dans l'affaire. L'établissement vient de confirmer une information du "Financial Times". Le quotidien affirmait que l'établissement s'est exposé en prêtant à des clients institutionnels, en particulier des fonds de fonds qui souhaitaient réaliser des investissements avec Bernard Madoff. Toujours outre-Manche, le fonds d'investissement Man Group chiffre à 360 millions de dollars la somme investie dans deux fonds gérés par l'Américain.

Parmi les clients de Bernard Madoff, outre les grandes banques internationales, on retrouve également les plus discrètes banques privées et certains "family offices", ces sociétés chargées de gérer le patrimoine des familles. Les banquiers suisses traditionnels, spécialisés dans la gestion de fortune pourraient ainsi perdre jusqu'à 5 milliards de dollars, selon le journal suisse "Le Temps". En ce qui concerne les grandes institutions financières du pays, Credit Suisse et UBS, leur exposition est "insignifiante" selon les intéressés.

Enfin au Japon, la société financière Nomura annonce une perte de 27,5 milliards de yen (225 millions d'euros), à cause de la fraude présumée.

En revanche, en Allemagne, les deux plus grandes banques du pays, Deutsche Bank et Commerzbank, refusent de préciser leurs expositions à ce nouveau scandale financier.

Jeudi, l'ancien président du conseil d'administration du Nasdaq, la Bourse américaine des valeurs technologiques, a été arrêté, accusé d'avoir monté une gigantesque fraude pyramidale de 50 milliards de dollars. Il utilisait le capital apporté par ses nouveaux clients pour verser les intérêts de ses anciens. Il a été libéré après avoir payé sa caution de 10 millions de dollars.

Des enquêtes de la SEC dès 1992

Dimanche, le "Wall Street Journal" a rapporté que l'autorité de régulation des marchés financiers américaine, la SEC, avait déjà enquêté plusieurs fois sur Bernard Madoff, mais toujours sans succès. Dès 1992, elle avait lancé une première investigation. Elle avait ensuite obtenu des informations remettant en cause les rendements extrêmement élevés proposés par Bernard Madoff à ses clients et avait repris son enquête en 2005 et en 2007, mais n'avait encore rien trouvé.

Cette révélation est un nouveau coup porté à la réputation de la SEC, déjà très critiquée pour ses défaillances en matières de maintien de l'ordre sur les marchés et pour son incapacité à empêcher la crise des subprimes de l'été 2007, qui a précipité la finance mondiale dans le rouge. Dimanche, Nicola Horlick, la présidente de la société de gestion Bramdean Alternatives à Londres et cliente de Bernard Madoff, a d'ailleurs dénoncé la "défaillance systémique" des autorités de régulation américaines.