Dexia démantelé : une véritable "faillite organisée"

Par latribune.fr  |   |  1220  mots
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Le groupe franco-belge devrait être démantelé entre une "bad bank" et des entités séparées. Le titre a chuté de 22,46% en Bourse ce mardi.

Le groupe bancaire franco-belge Dexia va être démantelé entre d'une part une "bad bank" hébergeant ses actifs toxiques et d'autre part plusieurs entités séparées, a indiqué mardi le syndicat belge CSC sur la base d'informations fournies par la direction. Interrogé par Latribune.fr, un cadre de l'établissement évoque une "faillite organisée".

"On va créer -enfin- une structure pour héberger les actifs problématiques -une bad-bank- qui serait établie en France sous garantie de l'Etat français et de l'Etat belge", a indiqué dans un communiqué le premier syndicat belge, à l'issue de deux réunions avec la direction de Dexia à Bruxelles.
"Les autres parties du groupe seront mises en sécurité, mais traitées en tant qu'entités à part. Cela concerne Dexia Banque Belgique, Dexia Banque Luxembourg, Dexia Asset Management, Dexia Insurance et Denizbank en Turquie", ajoute la CSC.

"Si la direction réussissait à créer la bad-bank, nous pourrions quitter un modèle déséquilibré qui coinçait Dexia Banque Belgique. L'incertitude subsiste, mais de nouvelles opportunités pourraient voir le jour", ajoute le syndicat.

En Belgique, le groupe Dexia est depuis longtemps considéré comme déséquilibré, puisqu'il s'appuyait sur la collecte de l'épargne (essentiellement réalisée en Belgique et en Turquie) pour financer notamment les collectivités locales françaises, où la banque ne dispose pas de réseau d'agences de détails.

Si la CSC voit donc plutôt d'un bon oeil une scission entre les activités belges et françaises du groupe, elle craint toutefois qu'elle n'entraîne un "problème sérieux" pour quelque 150 salariés de Dexia Holding, qui chapeaute les activités transnationales du groupe.
A l'issue d'un conseil d'administration lundi soir, Dexia a ouvert la porte à son démantèlement en indiquant chercher des solutions à ses problèmes structurels.

La presse se fait l'écho depuis plusieurs semaines d'un projet de reprise de tout ou partie des activités de financement des collectivités ainsi que du portefeuille de prêts aux collectivités par la Caisse française des dépôts (CDC, bras financier de l'Etat) et la Banque Postale (établissement public français). Mardi, l'entourage de la CDC a confirmé que les deux institutions travaillaient sur ce scénario.

Cette source a par ailleurs récusé le terme de "démantèlement" utilisé dans la presse pour évoquer le futur du groupe bancaire, admettant néanmoins l'existence d'un programme de cessions d'actifs. Le ministre des Finances, François Baroin, a pour sa part souhaité une "solution rapide et efficace". Les opérateurs de marché n'ont pas été rassurés pour autant. L'action Dexia a perdu jusqu'à 38% mardi dans la matinée, atteignant ses plus bas niveaux historiques, pour ensuite limiter quelque peu ses pertes dans l'après-midi. Le titre a clôturé en repli de 22,46% à 1,01 euro

Sous l'égide de la Caisse des dépôts et de la Banque postale

« La constitution d'un pôle pour les collectivités locales est très probable ce pôle se ferait sous l'égide de la Caisse des dépôts et de la Banque Postale », a affirmé le sénateur Marini. Il a confirmé que l'Etat ne prévoit pas d'injecter de l'argent dans cette opération.

De son côté, le ministre belge des Finances Didier Reynders a déclaré : "nous devons regarder comment changer ce groupe. Nous devons retirer tous les éléments dangereux de la banque, c'est là que les garanties d'Etat entreront en jeu - c'est ce que l'on appelle une 'bad bank' - puis on pourra donner des garanties aux clients, qu'ils soient des déposants ou des solliciteurs de crédit". Le gouvernement belge devait se réunir mardi soir en séance extraordinaire "pour faire le point" sur la situation de Dexia , a ajouté Didier Reynders.

La pérennisation du financement des collectivités locales

La Caisse des dépôts et la Banque Postale travaillent à la reprise d'une partie des activités de financement et du portefeuille de crédits aux collectivités de la banque franco-belge Dexia , a indiqué ce mardi à l'AFP l'entourage de la CDC. La CDC souhaite "la pérennisation dans les meilleures conditions d'un financement des collectivités locales", a-t-on précisé, en indiquant que le directeur général de la Caisse, Augustin de Romanet, s'attachait à formaliser un projet "dans les meilleurs délais, sans doute dans les prochains jours".

Et les petits actionnaires ?

Deminor insiste pour que les actionnaires soient consultés avant toute décision sur un plan concernant l'avenir de Dexia , indique le cabinet de conseil aux actionnaires dans une lettre ouverte. Le conseil d'administration de la banque franco-belge Dexia , réuni tard lundi soir, a annoncé avoir lancé un processus destiné à résoudre ses "problèmes structurels".

"Il ressort de ce communiqué que les actionnaires de Dexia auraient d'ores et déjà assuré le management de son soutien pour la mise en ouvre d'un plan, dont les détails n'ont même pas été arrêtés à ce jour", souligne Deminor. "Afin d'éviter que les actionnaires soient mis devant le fait accompli à l'instar d'interventions précédentes, Deminor souhaite que les actionnaires et ceux qu'ils représentent, les employés et les coopérateurs puissent être consultés en amont".

Dexia à vendre ?

Bien que les responsables politiques contestent la perspective d'un "démentellement", les syndicats sont sceptiques.  "L'ensemble du groupe Dexia serait à vendre", a indiqué mardi un responsable syndical belge à l'issue d'une réunion des représentants de la direction et du personnel de la banque franco-belge, au bord du démantèlement trois ans après avoir échappé de justesse à la faillite. "Selon les informations dont nous disposons à l'issue de cette première réunion, tout serait à vendre", a déclaré à l'AFP le secrétaire général du syndicat socialiste belge Setca pour le secteur de la finance, Jean-Michel Cappoen.

Joint par téléphone, M. Cappoen s'exprimait à l'issue d'une réunion extraordinaire du bureau du comité d'entreprise européen de la banque, qui rassemble des représentants de la direction et des salariés belges, français et luxembourgeois. "C'est la fin d'une route. Maintenant, différents chemins vont être offerts à chacun. Les salariés sont inquiets. On n'en est même pas au stade de savoir quels seront les impacts sociaux", faute d'information communiquée directement par la direction, a de son côté déclaré Pascal Cardineaud, représentant du syndicat français CFDT au Comité d'entreprise de Dexia Crédit Local et au Comité d'entreprise européen de Dexia .

Une porte-parole de Dexia à Bruxelles, Ulrike Pommee, a confirmé la tenue de ce bureau du comité d'entreprise européen mais n'a pas donné d'information sur son contenu, indiquant simplement que les syndicats avaient été "informés de l'évolution de la situation".

Craintes pour l'emploi

Selon M. Cappoen, un comité d'entreprise de Dexia Holding, la structure qui chapeaute les différentes entités de Dexia , se déroule depuis 11h00. "Il y a 600 personnes qui travaillent pour le holding, 350 à 400 en Belgique et 200 à 250 en France. Notre première inquiétude est pour ces personnes", car si le groupe est démantelé, la raison d'être du holding n'existe plus, a souligné le syndicaliste.