Le Crédit Agricole se prépare à tous les scénarios grecs

Par Séverine Sollier  |   |  764  mots
Jean-Paul Chifflet, directeur général de Crédit Agricole SA. Copyright Reuters
Malgré les efforts de réduction de son exposition à sa filiale grecque Emporiki, le Crédit Agricole reste fortement affecté au premier trimestre et se prépare à l'éventualité d'une sortie de la Grèce de la zone euro.

"Nous spéculons sur le fait que la Grèce restera dans la zone euro", a déclaré Jean-Paul Chifflet, directeur général de Crédit Agricole SA lors d'une conférence téléphonique de présentation des résultats trimestriels vendredi 11 mai. Pourtant il avoue travailler "depuis plusieurs mois sur ce scénario" de la sortie de l'euro avant d'ajouter "nous pensons supporter cette difficulté si elle survient". Concernant les conséquences financières pour le groupe, le directeur général a estimé que "les ressources financières internes devraient suffire" et qu'il n'y aurait a priori pas d'augmentation de capital. "Mais je ne veux pas m'y engager définitivement" a-t-il nuancé.

Une exposition au risque grec divisée par deux

Dans l'hypothèse d'une sortie de la Grèce de la zone euro, du retour à la drachme et d'une dévaluation, le Crédit Agricole pourrait perdre en effet une grande partie de son investissement. Pour cette raison, le groupe français s'évertue à réduire son exposition à Emporiki "à marche forcée", comme l'a précisé Jena-paul Chifflet. Concrètement, l'exposition totale est passée de 11,4 milliards d'euros fin mars 2011 (10,4 milliards au titre du refinancement net et 1 milliard en capital) à 5,2 milliards dont 600 millions en capital et 4,6 milliards en refinancement net. "

Nous avons poursuivi nos efforts de réduction du funding direct",  a souligné Jean-Paul Chifflet. Concernant la possiblité pour Emporiki d'avoir recours aux facilités de refinancement de la Banque centrale grecque, il a estimé que la banque pourrait "avoir droit à environ 3 milliards". Mais pour l'instant "la réponse est toujours non". La banque Emporiki étant considérée comme banque étrangère.

Sa filiale Emporiki est le cinquième établissement grec

D'autres mesures de réduction des effectifs d'Emporiki et de réduction des frais ont été prises. Elles se traduisent par une baisse des charges d'exploitation ce trimestre de 5,1% à 124 millions d'euros (contre 130 sur la même période en 2011). En parallèle, Emporiki a conduit "des efforts de collecte des dépôts" et de réduction des crédits. L'effet est de 320 millions d'euros.... Ce que Jean-Paul Chiffket résume en indiquant : "nous avons amélioré la gestion".

Même dans l'hypothèse, jugée pour l'heure la plus probable par le Crédit Agricole, du maintien de la Grèce dans la zone euro, la banque sera confrontée à une dégradation de l'économie du pays avec une augmentation potentielle des créances douteuses et des défauts de paiement.  Le groupe français n'a donc pas fini de payer pour cette filiale qui est le cinquième établissement bancaire grec. 

Le recentrage des activités du groupe est bien engagé

Pour le seul premier trimestre 2012, Emporiki pèse négativement sur le résultat net de Crédit Agricole SA à hauteur de 905 millions contre -139 millions  d'euros à fin 2011. Le coût du risque s'est considérablement accru bondissant de 220 millions à la fin mars de l'année dernière jusqu'à 829 millions d'euros au premier trimestre de cette année. Il est "lié à l'extension du PSI [le plan d'échange d'obligations souveraines grecques pour les créanciers privés, NDLR]"." En février, l'Etat grec a décidé d'inclure dans ce PSI trois entreprises publiques dont Emporiki est la banque, provoquant un alourdissement du coût pour cette dernière. Emporiki a subi par ailleurs une annulation du solde des impôts différés actifs au bilan pour un montant de - 130 millions d'euros.

Très regardée par les investisseurs la situation en Grèce ne doit cependant pas occulter que par ailleurs, le Crédit Agricole se dit "en avance" sur son plan d'adaptation car il a déjà atteint à 70% ses objectifs pour l'ensemble de l'année 2012 sur le besoin de liquidité et 91 % des objectifs de réduction des actifs pondérés à fin avril. De même, le "recentrage" des activités de Banque de financement et d'investissement est bien engagé selon le groupe. 

20 milliards de nouveaux crédits collectés

Mais surtout, "le Crédit agricole assume sa responsabilité de financement de l'économie", a souligné Jean-Paul Chifflet. Les crédits sont ainsi enhausse de 4,1% par rapport au premier trimestre 2011 et les dépôts. Au total, 20 milliards d'euros de nouveaux crédits ont été collectés en France par les Caisses régionales et le réseau LCL au premier trimestre. Le produit net bancaire du groupe ressort ainsi à 9,1 milliards d'euros ( + 1,3 %). Et le résultat net part du groupe reste positif à 804 millions d'euros malgré une forte baisse de -47,3 %.